Des élus de toute la France réagissent suite à l’interdiction du foie gras dans les réceptions officielles de plusieurs villes écologistes. A quelques jours des fêtes de Noël et alors que la filière est à nouveau frappée de plein fouet par la grippe aviaire, ils invitent à ne pas « gâcher les fêtes ».
La liste des signataires ne cesse de s’allonger. On compte même désormais trois députés lyonnais. Cinq villes françaises, dont Lyon, ont décidé de bannir le met du sud-ouest lors des réceptions officielles. « Certains élus sont allés encore plus loin en appelant de leur vœux que cette décision inspire les restaurateurs à renoncer à servir du foie gras », dénoncé la tribune.
"Ne gâchez pas les fêtes"
Les 127 parlementaires lancent un message clair en réponse, « ne gâchez pas la fête ». Pour eux il s’agit « d’un appel au boycott de quelques édiles qui tentent un coup de com’ avant les fêtes ». Ils rappellent que « 91% des Français disent consommer du foie gras chaque année. Pour eux, c’est un mets synonyme de fête et de retrouvailles. Deux choses dont nous avons tous tant besoin après deux ans de crise sanitaire ».
"Respect des valeurs et traditions"
Les élus mettent en garde sur les conséquences économiques que cela pourrait avoir. « Les fêtes de fin d’année représentent 80% de la consommation de foie gras en France ». Max Brisson, sénateur des Pyrénées-Atlantiques fait partie des signataires. « Je suis élu dans un département où l’activité du canard gras est très importante et ancestrale », rappelle-t-il. « Elle est inscrite dans nos traditions. Aujourd’hui elle est confrontée à des difficultés avec des séries d’épidémies qui se succèdent.
"Il est naturel de manifester ma solidarité avec les paysans et éleveurs dont certains ont de toutes petites exploitations face à des maires qui veulent stigmatiser une profession ».
Max Brisson
« On va toujours vers le « tout interdire » sans respecter les valeurs et la tradition », se révolte Olivier Damaisin. Le député du Lot-et-Garonne a lui aussi signé la tribune. « Cela suffit, c’est très ancré dans le sud-ouest, certains en vivent, et ce sont souvent ceux qui interdisent qui sont les premiers à en manger ».
Contexte sanitaire et économique difficile
Comme les Landes voisines, les Pyrénées-Atlantiques sont une nouvelle fois touchées par la grippe aviaire. Ce dimanche 19 décembre, un élevage a dû être abattu à Came. Seize communes du département sont en zone de protection et en zone de surveillance. C’est-à-dire que les animaux doivent être mis à l’abri et aucun mouvement n’est autorisé. « Je comprends le refus de certains éleveurs de procéder à la claustration », poursuit Max Brisson. « La claustration se pose pour protéger contre grippe aviaire, mais beaucoup s’interrogent par rapport au bien-être animal et les conséquences sur la qualité produit ».
Deux visions qui s'opposent
Le sénateur dit avoir reçu des dizaines de mails menaçants suite à cette tribune. « Ce sont des mails copiés-collés, je les mets à la corbeille directement », dit-il. Même constat pour Olivier Damaisin. Une cinquantaine de mails reçus avec parfois des menaces de mort. « C’est sûr le gavage n’est pas un bon moment pour l’animal", dit-il, "mais un animal d’élevage naît pour être consommé. Alors on a qu’à interdire l’élevage et ne plus manger de viande ».
Pour moi le gavage est un acte ancestral, je le défends car je ne mets pas l’animal et l’homme sur le même plan
Max Brisson
« Je ne suis pas opposé à l’abattage des animaux ni à leur gavage", poursuit le sénateur des Pyrénées-Atlantiques. "Je ne ne m’inscris pas dans un courant qui combat la consommation de la viande. Je pense que c’est une régression profonde de notre société, c’est un repli ».
Pour ce qui est du sujet de la maltraitance des animaux, le sénateur distingue les filières courtes des filières longues. Mais il souhaite que le sujet soit évoqué dans sa globalité « sans manichéisme ». « La filière courte assure aujourd’hui une vie aux animaux, avant qu’ils ne soient abattus, qui est tout à fait correcte. Quand la filière est longue et industrielle, elle offre du foie gras à bas prix, contrairement à filière courte. On oublie cela, mais l’agriculture productiviste a nourri tous les hommes notamment une génération entière d’hommes et de femmes qui ont connu la faim. Je crois qu’Il faut tout mettre sur la table".
"Un cadre légal existe"
Dans la tribune, les signataires rappellent qu’une charte a été élaborée par la Commission Européenne, garantissant les bonnes pratiques des éleveurs. « Il y a des lois, insiste Max Brisson, le cadre légal existe, la maltraitance doit être combattue dans une certaine mesure, la mesure où ces animaux doivent être gavés et tués.
L’abattage est un acte violent, il a été enfermé. Avant on faisait cela dans la rue. La société a écarté la violence de l’acte. Il suffit d’aller au Maroc, par exemple, pour voir que cela demeure. Notre rapport à la violence et à la mort est rejeté alors que cela fait partie de la vie. Je ne justifie pas des actes illégaux, mais, pour cela, il y a les services vétérinaires, la police et la justice. N’allons pas stigmatiser une population qui travaille dur et subit de nombreuses crises ». Selon les signataires de la tribune, la filière foie gras représente 100 000 emplois.
Olivier Damaisin se félicite de cette tribune. « Nous, on a réagi, dit-il. Cela a eu l’effet inverse de ce qu’ils voulaient, car jamais autant de gens n’ont acheté de foie gras qu’en ce moment. J’ai été voir les producteurs, et ils m’ont dit qu’ils n’avaient jamais aussi bien travaillé que cette année ».