OB pour Ondarearen Batasuna. Le "parti du patrimoine" en basque. Une signature jamais encore apparue, retrouvée taguée sur les agences immobilières de St-Pée-sur-Nivelle. Il menace : "après la peinture, des bombes".
"C'est dommage que l'on soit pris à parti aussi violemment. On n'est pas que des agents immobiliers, on est aussi des humains, on a nos émotions, " se désole Virginie Gouarde, salariée de l'agence Guy Hocquet de St-Pée-sur-Nivelle. "Et ça fait deux fois, j'espère qu'il n'y en aura pas une troisième".
Son agence, comme les quatre autres du village, a été copieusement taguée dans la nuit du mardi 22 au mercredi 23 mars. Comme en novembre dernier.
"Aujourd'hui la peinture, demain les bombes"
Mais cette fois-ci les messages ont un ton différent.
"Gaur tindua Bihar bonbak" est-il écrit sur la façade d'une d'entre elles. Comprendre "aujourd'hui la peinture, demain les bombes".
"Oui on l'impression que la colère monte en intensité, les messages ne sont plus du tout les mêmes et les agences sont complètement recouvertes de tags, c'est beaucoup plus visible qu'il y a 4 mois" s'inquiète Lionel Olaizola à la tête, avec son frère, de l'agence du même nom.
Même s'il ne prend pas la menace pour lui, il regrette que les agences soient les cibles. "Je comprends qu'il y ait un problème de logement au pays basque, mais est-ce les agences qui régulent les prix ? Non, c'est aux politiques d'agir".
Il explique que nombre de propriétaires veulent profiter de l'attrait pour le pays basque et insistent pour vendre à des tarifs très élevés.
"Il y a une réalité, les prix ont vraiment flambé. C'est un problème de demande par rapport à l'offre tout simplement" explique Virginie Gouarde.
Pas la bonne cible
"Nous sommes bien conscients du problème" ajoute Frédéric Diana, un troisième agent victime des tags, "mais nous, agents, nous ne sommes que des conseils, on ne décide pas des prix, c'est le propriétaire".
Il dit comprendre la grogne, il est même d'accord avec les revendications. "Seulement on vit ici, on habite ici, on consomme au village, nos enfants y sont scolarisés, on a à coeur de le faire vivre. On a le sentiment de ne pas être la bonne cible".
Lionel Olaizola donne l'exemple d'une famille qui a hérité d'une très grande maison. Pas question pour elle de la louer à l'année ou de la diviser pour en faire des appartements qui pourraient être destinés aux familles du coin. "Ils s'y réunissent chaque été au mois de juillet et le reste du temps ils ont décidé de la mettre en location saisonnière. C'est la seule façon pour eux de faire face aux frais d'entretien et de rénovation". Une situation assez fréquente et somme toute légitime.
Aux élus d'agir
Tous ont le même discours. C'est aux élus de mettre en place des politiques de logement efficaces.
"Les mairies pourraient préempter du foncier, peut-être avec des aides" suggère Lionel Olaizola. Elles pourraient ainsi construire des habitations à loyer modéré. Aujourd'hui on ne peut pas continuer à laisser le marché dans cette situation. Il va falloir des mesures pour favoriser l'accès au logement des jeunes et des familles aux revenus moyens."
Les nouveaux tags apparus cette semaine sont signés "OB" pour "Ondarearen Batasuna" soit le "parti du patrimoine" en langue basque. Ils sont accompagnés d'un logo lui aussi inédit : un arbre avec une hache plantée sur le tronc.
Certains s'interrogent. Est-ce la naissance d'un nouveau mouvement radical qui serait prêt à replonger la région dans la violence ? Personne ne le souhaite, plus de 20 ans après les dépôt des armes des militants nationalistes.
Voir le reportage d'Allende Boutin et Christian Etchegarray :