La mission d'inspection des Ministères de l'Agriculture et de l'Ecologie sur la cohabitation entre les éleveurs de brebis et l'ours a rendu son rapport. Elle conclut notamment à la possibilité de faire coexister le plantigrade et le pastoralisme.
C'est l'association Pays de l'Ours qui le révèle. Le rapport de la mission d'inspection des Ministères de l'Agriculture et de l'Ecologie sur la cohabitation élevage-ours est disponible et consultable sur le site du ministère de la Transition Ecologique et Solidaire.
Pour l'association, c'est une base de travail intéressante qui met en exergue plusieurs mesures permettant une cohabitation entre l'élevage et les ours. À ses yeux, l'avantage des rapporteurs est qu'ils sont extérieurs au dossier donc plus objectifs, moins sensibles à l'émotion que suscite le sujet.
Une évolution du pastoralisme
La mission d'inspection rappelle tout d'abord que la cohabitation entre l'activité pastorale et l'ours est "une réalité historique à l’échelle du massif pyrénéen" et une obligation de la France pour "une espèce dotée d’un statut de protection".Elle souligne et reconnaît les difficultés entre les éleveurs et les ours, notamment les attaques, parfois massives comme le dérochement en juillet 2017 en Ariège où 209 brebis étaient mortes.
Les rapporteurs relèvent aussi que la pratique du pastoralisme ces dernières années s'est faite de manière très extensive dans les estives, souvent sans berger donc sans surveillance. La présence des ours aujourd'hui conduit les éleveurs à revenir à des pratiques qui existaient avant les années 50-60, à savoir la présence des bergers et de chiens de protection, ce que les éleveurs voient comme une contrainte.
Enfin, la mission estime que "l’amélioration du dispositif d’accompagnement des éleveurs soumis à la prédation est nécessaire tant pour la poursuite du développement de la population ursine que pour une cohabitation apaisée entre les éleveurs et l’ours."
Six recommandations principales
La mission préconise différentes recommandations dont six ressortent principalement :
- Mettre en place les conditions d’un renforcement des moyens de prévention des prédations s’appuyant sur le « triptyque » de protection (gardiennage - chiens de protection - regroupement nocturne du troupeau), de manière proportionnée dans les estives par la réalisation d’un diagnostic pastoral couplé à un diagnostic de vulnérabilité. Assurer la formation initiale et permanente des bergers et des éleveurs à la gestion des troupeaux face à la prédation.
- Renouer une relation d’appui avec les éleveurs dans leur démarche de développement de l’élevage pastoral en présence de l’ours : - en privilégiant la transparence dans la diffusion de l’information sur la population ursine et la confiance avec la mise en place de l’auto-constat déclaratif ; - en développant les actions d’appui facilitant la vie des éleveurs et des bergers (bergers supplémentaires, équipement en cabanes et en téléphonie, techniques d’effarouchement…) et les démarches de promotion de la qualité des produits.
- Améliorer le dispositif d’indemnisation (en rapprochant les barèmes ours et loup) et d’appui et accompagnement des éleveurs par l’ONCFS (effarouchement, diagnostics de vulnérabilité, veilles technologiques…).
- Expérimenter des actions de « fixation » de l’ours en secteurs forestiers par plantations et nourrissage, d’effarouchement et de répulsion, de suivi de la population ursine, en s’assurant d’un suivi scientifique.
- Relancer des initiatives pour une gouvernance ours et pastoralisme à l’échelle du massif des Pyrénées comme à l’échelle des territoires.
- Renforcer les soutiens financiers au pastoralisme, à la prévention des prédations au sein du massif des Pyrénées, à la formation et à la communication.
Faire évoluer les pratiques
Pour Alain Reynes, de l'association Pays de l'Ours, ces préconisations vont dans le bon sens. Pour autant, il faut les analyser et voir si "elles sont réalisables, si les budgets sont débloqués et si les anti-ours les accepteront."
C'est vrai que nous sommes du côté des pro-ours mais nous accepterons des mesures d'effarouchement d'un ours par exemple s'il est avéré qu'il est un prédateur très actif.
Alain Reynes déplore en revanche la mauvaise formation des éleveurs et bergers aux techniques de protection des troupeaux et une méconnaissance de l'ours.
Chaque année, on a des bergers qui partent en estive sans connaître les techniques de protection. C'est là qu'il y a des problèmes.