Retour sur les moments forts des visites de l'ancien Président de la République sur les terres du sud-ouest à Pau, Bayonne, Agen, Libourne ou Bordeaux. Et sur sa rivalité avec Jacques Chaban-Delmas. Les deux hommes étaient tous deux candidats à la présidentielle de 1974
Valéry Giscard d'Estaing est décédé mercredi soir des suites de la covid-19 à 94 ans, entouré de sa famille, dans sa demeure du Loir-et-Cher. Les réactions à la disparition de l'ancien chef d'Etat français, profondément européen et fondateur de l'UDF, sont nombreuses.En Aquitaine, François Bayrou a salué l'homme auprès duquel il a fait ses débuts en politique et avec lequel il s'est battu pour défendre un mouvement de centre-droit.
#VGE Nous avons été élus députés en même temps, en 1986. J'étais le benjamin du groupe. Lui, dans son incroyable autorité était la figure de proue du groupe. 3 ans plus tard, lorsqu'il a été élu Président de l'#UDF, j'ai été son secrétaire général, durant 5 ans. #RTLMatin
— François Bayrou (@bayrou) December 3, 2020
Pour des générations entières, notamment pour ceux qui se sont engagés auprès de lui dans leur jeunesse, Valéry Giscard d’Estaing a fait souffler un grand vent de modernité sur la société française, un immense espoir de dépassement et de rassemblement. #VGE
— François Bayrou (@bayrou) December 3, 2020
Présidentielle de 1974 : la rivalité avec le maire de Bordeaux
En avril 1974, seulement deux jours après le décès soudain de Georges Pompidou, Jacques Chaban Delmas, maire de Bordeaux et ancien premier ministre, se présente aux élections présidentielles anticipées. Il veut porter son projet de société nouvelle avec, notamment, l'ambition de réconcilier patronat et travailleurs.
Valéry Giscard d'Estaing part lui aussi, de son côté, en campagne, avec le soutien de Jacques Chirac désigné fils spirituel et politique de Pompidou. Il prône le changement dans la continuité et veut fédérer les non gaullistes et le centre droit.
Le politologue bordelais Jean Petaux rappelle le contexte : "Jacques Chaban Delmas se déclare très tôt, ce qui lui sera reproché. Il veut en quelque sorte préempter la candidature à droite et au centre. Il va y avoir une succession de coups tordus, la droite se déchire. Chirac choisit Giscard. Et en moins d'un mois le 1er tour est plié".
Jacques Chaban Delmas sera éliminé au 1er tour ne réussissant à rassembler que 15,11% des suffrages contre 30,62% pour VGE. Ce dernier sera élu face à François Mittérand au second tour avec 50, 81% des voix.
"Ce sont deux personnalités très différentes" poursuit Jean Petaux, "Chaban était premier ministre entre 1969 et 1972 avec un programme audacieux, la nouvelle société, mais Valéry Giscard d'Estaing était 100 coudées au-dessus en terme de méthode et de volonté d'y arriver. On avait en quelque sorte d'un côté le coeur et la passion avec Chaban et de l'autre la raison, la méthode et parfois un peu la froideur de VGE".
1979 : tournée de 3 jours du président Giscard en Aquitaine
Il faudra attendre 5 ans, après son élection, pour que VGE retourne sur les terres du sud-ouest.Il se rend d'abord en Lot-et-Garonne, en mai, à Agen mais aussi dans un petit village de campagne. Il échange avec une institutrice de l'école communale en charge de 12 élèves. Dans les images conservées par l'INA on aperçoit également sa jeune épouse Anne-Aymone.
Puis entre le 4 et le 6 octobre 1979, deuxième voyage officiel en Aquitaine largement commenté par les médias.
Première étape à Agen où il évoque les "difficultés que traverse la France" et qu'elle "surmontera". Le pays est alors touché par la crise, le chômage et l'inflation."Je souhaite que chacun comprenne que notre intérêt à tous c'est de se serrer les coudes dans le respect de ce que nous sommes, un pays démocratique et républicain où chacun à le droit de s'exprimer, de critiquer et de proposer".
Le 5 octobre, il se rend à Pau où il veut s'afficher avec le maire socialiste André Labbarrère. Les deux hommes font face à une manifestation de syndicats et partis de gauche à leur sortie de l'hôtel de ville, place Royale où des échauffourrées éclatent avec la police. Les slogans : "non à l'austérité", "liberté d'expression".
Ce même 5 octobre, le Président se rend à Salles en Gironde, puis à Libourne auprès de Robert Boulin ("visite considérée comme un signe selon lequel R. Boulin pourrait succéder à Raymond Barre à Matignon, mais le corps de R. Boulin est retrouvé sans vie dans un étang de Rambouillet le 30 octobre" précise Jean Petaux) et St Emilion avant de terminer sa journée à Bordeaux où il retrouve Jacques Chaban Delmas.
"Il dîne au Palais-Rohan où il retrouve Jacques Chaban Delmas pour la première fois depuis sa défaite au premier tour de la Présidentielle de 1974" commente Jean Petaux. Le maire de Bordeaux "a pu reconquérir le « Perchoir » et la présidence de l’Assemblée nationale lors des Législatives de 1978. Il semble réconcilié avec VGE. Les Bordelais non. En 1981, à Bordeaux au second tour de la Présidentielle, Mitterrand est devant VGE".
Ces journées passées en Aquitaine seront placées sous le signe d'un appel au dialogue avec l'opposition.
L'ère UDF
Valéry Giscard d'Estaing reviendra en 1981 dans le sud-ouest, à Bayonne, pour un meeting avant les présidentielles qu'il perdra face à François Mitterrand.
En juin 1989, il est de retour à Bordeaux, cette fois en campagne pour les européennes. Jacques Chaban Delmas l'introduit lors du meeting avec cette phrase : "nous allons entendre Valérie Giscard d'Estaing, et à chaque fois que nous l'entendons, c'est à la fois un enseignement et un plaisir". VGE enchaînera avec une phrase en allemand.
Trois ans plus tard, il reviendra dans le port de la lune pour présider les assises dela démocratie locale de l'UDF devant 1200 élus locaux.