"J'ai vécu des choses extraordinaires" : ces lycéens qui effectuent un séjour linguistique et éducatif à travers le monde

Chaque année, l'association AFS Vivre sans frontière permet à des lycéens du monde entier de pouvoir partir vivre quelques mois dans une famille d'accueil. L'expérience étant moins connue en France, certains jeunes et certaines familles font part de leur expérience pour tenter de nouveaux candidats.

L'association AFS (American Field Service) Vivre sans frontière trouve son origine lors de la Première Guerre mondiale. Des étudiants américains en médecine sont venus en France en tant qu’ambulanciers pour pouvoir soigner les soldats sur le champ de bataille. Ils sont revenus durant la Seconde Guerre mondiale, mais cela fut de courte durée.

Dans les années 1950, l'association change complètement sa forme et souhaite promouvoir des échanges entre différents lycéens partout dans le monde entier jusqu'à aujourd'hui. Chaque année, 12 000 jeunes passent par AFS pour effectuer un séjour linguistique et éducatif à travers le monde.

Une préparation au voyage de plusieurs mois

Adèle Raspotnik habite Vivonne (Vienne) avec le reste de sa famille. Elle a eu l'opportunité de partir trois mois au Danemark grâce à cette association. "Au départ, c’est une amie à ma mère qui a accueilli des jeunes qui m’a parlé d'AFS. J’avais envie de découvrir une autre culture. Ce n’était pas l’envie de mes parents de me voir partir toute seule au début", raconte-t-elle. Depuis son plus jeune âge, Adèle a envie de partir, découvrir de nouveaux horizons, de nouvelles cultures.

Alors, elle se rapproche d'AFS pour tenter l'expérience d'une vie, celle de partir plusieurs mois dans une famille encore inconnue, dans un pays qui lui est totalement étranger. Mais un séjout avec AFS ne se fait pas en claquant des doigts : "en septembre 2021, j’ai commencé à regarder pour préparer mon voyage et je suis partie l'année d'après. On a plusieurs week-ends de temps d’échange avec des bénévoles de l’association : cela a permis de voir comment se déroulerait l’échange, et d’évaluer aussi mon envie de partir, ma maturité... Ils viennent aussi te poser des questions, afin de savoir si tu es capable de vivre avec une personne seule, une famille homoparentale, si tu peux vivre dans une famille pratiquante, etc."

Avant de partir, on échange via mails, des visios entre l’enfant et la famille d’accueil. Il faut que l’enfant crée un lien avant même d’arriver là-bas.

Fanny Raspotnik

Mère d'Adèle, partie trois mois au Danemark avec AFS

Avant de partir, Adèle devait constituer un dossier médical, un dossier scolaire, mais elle devait également écrire une lettre descriptive d'elle-même pour qu’une famille puisse la choisir. "Mes parents aussi ont dû rédiger une lettre pour décrire leur relation qu’ils ont avec moi", ajoute-t-elle. Pour eux, un an de préparation est nécessaire. "Le fonctionnement de l’association est très rassurant sur ce point. Cela permet aux jeunes de laisser mûrir leur idée, d’aborder plusieurs sujets. Il faut savoir aussi que c’est la famille étrangère qui choisit le jeune, ajoute Fanny Raspotnik, la maman d'Adèle. "Avant de partir, on échange via mails, des visios entre l’enfant et la famille d’accueil. Il faut que l’enfant crée un lien avant même d’arriver là-bas." Coût du voyage, 4 000 euros pour trois mois.

"Je n'avais qu'une envie, c'était de partir"

Arrive le mois de septembre 2022 et Adèle fait le grand saut, non plus vers l'inconnu, car elle connaît désormais assez bien sa famille d'accueil. "Je suis partie trois mois, jusqu'au mois de décembre. Le Danemark, c’est un pays très anglophone qui m’attire particulièrement. Je n’avais qu’une envie, c’était de partir. Une fois arrivée sur place, on est parti dans un camp pour plusieurs jours. Après cela, je suis partie en bus afin de rencontrer ma famille d’accueil. Et tout

s’est fait naturellement, il n’y avait aucune barrière. Je vivais dans une famille danoise à 200 km de Copenhague. Ils étaient contents de m’avoir chez eux."

J'ai même fait un baptême de viking où j’ai dû plonger dans l’eau gelée.

Adèle Raspotnik

Lycéenne partie trois mois grâce à AFS

L'engouement a même pris le dessus sur l'émotion lors du tout premier repas avec sa famille d'accueil. "J’ai pleuré parce que j’étais si heureuse d’être là. Les trois mois se sont enchaînés très vite : c’était parfait, j’ai vécu des choses extraordinaires. J’ai pu faire le parc Legoland, accompagné la petite fille Karma au cheval, chasser les champignons, faire des kanelslegle (des roulées à la cannelle), visiter Copenhague avec une copine espagnole... J'ai même fait un baptême de viking où j’ai dû plonger dans l’eau gelée."

Si ce que raconte Adèle a tout l'air d'être un voyage touristique de plusieurs mois, l'association AFS propose uniquement des séjours interculturels. Il faut donc être présent en classe, ne pas faire de stop, ne pas conduire, ne pas consommer de drogue ou d’alcool. "C’est un cadre strict : si tu ne le respectes pas, c’est retour à la maison immédiatement", ajoute la maman d'Adèle.

Au niveau des grandes différences, Adèle fut choquée par le système scolaire danois. Bien plus intelligent et plus éducatif selon elle : "Les cours se déroulent de 7 h 30 à 15 h et tu as 30 minutes pour manger. J’ai l’impression d’avoir plus travaillé qu’en France. Ils appellent leur professeur par leur prénom. Tous les deux mois, une grande fête est organisée par le lycée. Ils ont aussi une tout autre façon de gérer les cours : il y a beaucoup plus de travail en groupe, ou sinon ils travaillent sur ordinateur... Tu peux manger et boire en classe, c'est fou."

Une plongée dans la vie familiale

Adèle fait partie de ses jeunes lycéens français qui ont pu partir grâce à l'association AFS. De jeunes étrangers débarquent aussi dans l'Hexagone. C'est le cas d'Ellinor Bachman, d'origine finlandaise, qui a posé ses valises pendant dix mois dans la Vienne. Ellinor vient d'un petit village à l’ouest de la Finlande, à deux heures de route de la capitale Helsinki. Après avoir étudié le français durant un an, elle a décidé, elle aussi, de sauter le pas et de découvrir la France.

Cette jeune finlandaise est arrivée dans la Vienne en septembre 2023. Elle comptait bien améliorer son français : "Je voulais apprendre la langue, découvrir une nouvelle culture et me faire de nouveaux amis. Avant de partir, mon français n'était vraiment pas terrible. J’avais juste les bases et un peu de grammaire." Contrairement à Adèle, l'intégration dans sa famille d'accueil ne fut pas si simple. "Au début du séjour, notamment les deux premiers mois, c’était difficile. Parce que je ne comprenais rien (rires). Quand je suis arrivée dans la famille d’accueil, ils ne parlaient pas du tout anglais, c’était très compliqué. Mais ils étaient très sympas avec moi. Et puis, cette famille habitait à la campagne, très loin du lycée et de Châtellerault."

Les premières semaines furent un gros choc pour elle. "Ce qui m'a le plus marqué, c’était l’heure où l’on mange. En Finlande, on dîne vers 17 h ou 18 h. Ici, on mangeait vers 20 h 30 ou 21 h. Ce qui m’a choqué aussi, ce sont les horaires du lycée. En Finlande, on termine vers 14 h ou 15 h, alors qu’en France, on peut terminer à 18 h... et ça, c’est vraiment horrible ! Parce que je ne savais pas que c’était possible."

Au niveau de l’intégration, je me suis fait de très bons amis.

Ellinor Bachman

Finlandaise venue dix mois en France grâce à AFS

Après trois mois de vie commune, Ellinor a donc décidé de partir vers une autre famille d’accueil. Et les sept derniers mois furent les plus beaux de sa vie. "Tout s’est super bien passé. J’ai beaucoup voyagé en France : Paris, Annecy, Lyon, La Rochelle, Nantes, la Normandie avec Omaha Beach. J’allais au lycée avec la fille de la famille d’accueil : au niveau de l’intégration, je me suis fait de très bons amis. On a beaucoup parlé de la différence entre la Finlande et la France, j’ai pu faire quelques soirées avec des lycéens. Certains ont rigolé de moi à cause de mon accent en me disant : "eh, mais tu n’es pas Française ? T’as un accent bizarre", etc. Mais à part ça, c’était top."

AFS recherche des familles d'accueil

Son séjour s’est tellement bien passé qu’Ellinor souhaite revenir en France : "je veux revoir mes amis et ma famille d’accueil. En quelques mots, mon année d’échange a été très riche au niveau éducatif. Je conseille à ceux qui voudraient se lancer dans un échange de regarder les cultures et les différences, parce que pour moi, ça a été un vrai choc. Peut-être faire un peu de recherches avant de partir."

Quant à Adèle, le retour a été très compliqué, pendant environ deux mois. "Le retour à la réalité du système éducatif français a été vraiment difficile. Désormais, je me sens franco-danoise, j’ai eu un vrai coup de foudre. J’aimerais y retourner le plus vite possible. J’ai gagné de la confiance en moi, mon anglais s’est complètement amélioré et ça m’a rendu plus mature. Ce voyage permet d’apprendre d’autres cultures, d’autres personnes, d’autres langues."

À la suite de cela, la famille d’Adèle a accueilli une jeune brésilienne pendant dix mois, de septembre 2023 à juin 2024. Cependant, tout cela se fait de manière bénévole. "Lorsqu’une famille accueille un ou une jeune, elle ne bénéficie pas d’indemnités. Il faut se mettre dans une posture d’accueil, précise Jean-Marie Rivière, responsable accueil AFS de l'antenne Poitou-Charentes. Les familles peuvent malgré tout bénéficier d’aides, notamment au niveau des transports ou pour la cantine scolaire."

Moins connu qu'Erasmus ou que le Rotary Club en France, l'association AFS Vivre sans frontière recherche des familles d'accueil. "Il faut que l’on fasse un renouvellement des familles. En France, le coût du carburant les freine beaucoup", ajoute-t-il. De plus, l'association manque de bénévoles et cela ne permet pas aux plus jeunes de savoir qu'il existe ce type d'initiatives. "C’est très compliqué pour nous de pouvoir faire parler d’AFS dans les établissements scolaires. On n’est pas assez nombreux de bénévoles pour être présents sur plusieurs sites. Il faut aller au contact direct : sachant que les proviseurs changent en général tous les cinq ou six ans, ce n’est pas simple. On essaye d’être présent au Toit du Monde à Poitiers, mais globalement ce n’est pas facile", conclut Jean-Marie Rivière.

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