"Le suicide devrait être l’exception, le recours ultime” : 9,2 % des 18-24 ans déclarent avoir déjà tenté de se suicider

Le professeur Ludovic Gicquel, chef du pôle universitaire de psychiatrie enfant et adolescent du centre hospitalier Laborit de Poitiers, estime que cette "majoration des pensées suicidaires est le reflet d’une fragilisation de ces jeunes à faire face à un moment vulnérable de leur vie".

Selon une étude publiée par Santé Publique France, les jeunes adultes les plus touchées par les pensées ou des tentatives de suicide sont les jeunes adultes. Une augmentation qui concerne aussi bien les hommes que les femmes. En 2021, 9,4 % des femmes âgées de 18-24 ans déclarent avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois, contre 4 % en 2010. Pour les hommes : 5 % d'entre eux âgés de 18-24 ans déclarent avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois, contre 2,5 % en 2010.

Au sujet des tentatives de suicide, le constat est le même selon ce rapport. En 2021, 12,8 % des femmes âgées de 18-24 ans déclarent avoir tenté de se suicider au cours de leur vie, contre 8,1 % en 2000. 5,8 % des hommes âgés de 18-24 ans déclarent avoir tenté de se suicider au cours de leur vie, contre 4,5 % en 2000.

Une "fragilisation" dès le plus jeune âge

Si l'impact de la crise sanitaire qu'a pu avoir sur la santé mentale des jeunes adultes est indéniable, l'inflation ou bien l'angoisse écologique ne font qu'agrandir ce phénomène d'impuissance et de mal-être. Un rapport qui questionne grandement Ludovic Gicquel, chef du pôle universitaire de psychiatrie enfant et adolescent du centre hospitalier Laborit de Poitiers depuis une dizaine d’années. "Les jeunes de 18-24 ans, sont les adolescents d’hier et les enfants d’avant-hier. Ce rapport doit nous questionner sur tout ce qui peut contribuer, à un moment donné, à un individu sur pourquoi il ne voit pas d’autres solutions à ses problèmes que d’en finir avec lui-même".

Toujours selon le professeur Gicquel, ce sentiment de mal-être vient avant l'adolescence, voire avant l'enfance. "Ce sur quoi cela doit nous faire réfléchir, c’est la manière dont, durant l’enfance et l’adolescence, ces jeunes ont pu, ou pas, se développer, se stabiliser, se structurer pour faire face aux difficultés de la vie. Je pense que cette majoration des pensées suicidaires est le reflet d’une fragilisation de ces personnes-là à faire face à un moment vulnérable de leur vie. Un individu se développe dans le bain sociétal dans lequel on le plonge. Ce sont une multitude de facteurs, qui, ensemble, ont certainement contribué à fragiliser ces enfants qui deviendront jeunes adultes".

La tentative de suicide devrait être l’exception, le recours ultime.

Ludovic Gicquel

Chef du pôle universitaire de psychiatrie enfant et adolescent du centre hospitalier Laborit de Poitiers

Avant de devenir chef du pôle universitaire dans lequel il exerce, Ludovic Gicquel avait mené une étude en 2012, permettant d'établir une photographie précise de la santé et du bien-être des adolescents de 11 à 15 ans. "Dans une classe, j’ai demandé : vous est-il déjà, une fois dans votre vie, arriver de vous blesser volontairement ? J’avais demandé ça à plus d’un millier de collégiens et de lycéens de 15 ans. 34 % m’ont répondu oui, et près de 40 % étaient des filles".

Une problématique sociétale

Selon le professeur Ludovic Gicquel, "il faut préserver nos enfants et nos adolescents en intégrant leur vulnérabilité, c’est ça qui est fondamental. Il n’est pas le même individu à tout point de vue par rapport à l’adulte, qui a des capacités défensives face au monde qui se présente face à lui. Que ce soit au niveau familial, scolaire, relationnel, mais également faire face au cyberharcèlement, etc. Il faut garantir à nos enfants, une certaine sécurité développementale pour qu’il ait le temps de se construire, à faire face, à pouvoir s'apaiser et se sécuriser".

Au sein de son service, l'arrivée en nombre de jeunes adultes et d'adolescents ne fait qu'exploser. Une situation qui inquiète fortement le chef de pôle universitaire. "Particulièrement chez nous au service d’urgence et des centres médico-psychologiques, on a davantage de jeunes qui vont mal en nombre et qui vont mal en intensité. Il s’agit là d’une véritable problématique sociétale, qui devrait alerter nos pouvoirs publics. La société dans laquelle nous laissons nos enfants n’est pas suffisamment protectrice et ne garantit pas leur bien-être".

Le suicide, une affaire de tous

De nombreux numéros téléphoniques et dispositifs d'écoutes existent sur ce sujet :

  • 31 14 : numéro national de prévention du suicide, gratuit et accessible 24h/24 et 7j/7
  • 0 800 737 800 : Cnaé, un dispositif pour tous les étudiants vivant une situation de mal-être, violence ou discrimination
  • 05 49 45 71 71 : SOS Amitié Poitiers, service d'aide pour toutes les personnes ressentant le besoin d'être écouté et entendu ou vivant une période difficile.
  • 05 49 45 33 54 : Services Universitaire de Santé, mettant à disposition infirmières, médecins, sage-femme, psychologues, psychiatre et assistantes sociales pour tous les étudiants de Poitiers
  • Dispositif Mon soutien psy, permettant à toute personne angoissée, déprimée ou en souffrance psychique, de bénéficier de séances d’accompagnement psychologique avec une prise en charge par l’Assurance Maladie
  • Picta'Dom, maison des adolescents et des jeunes adultes de la Vienne, répondant à toutes les questions liées à la santé, la sexualité, le mal-être, les addictions, l'orientation scolaire, etc.
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