Harcèlement scolaire : que faire concrètement si votre enfant est concerné ?

Le ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, a réclamé ce lundi 25 septembre "un électrochoc" dans la lutte contre le harcèlement scolaire et annoncé d'ores et déjà quelques pistes pour lutter contre ce "fléau" qui conduit au suicide des enfants. Des propositions concrètes seront évoquées lors de la Nuit du Droit le 4 octobre à Limoges. Voici les points à garder en tête.

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Un plan interministériel sur le harcèlement scolaire - qualifié de "fléau" par la Première ministre Elizabeth Borne en juin dernier après le suicide de Lindsay, 13 ans, doit être présenté ce mercredi.

Ce lundi 25 septembre, Gabriel Attal, ministre de l'Éducation nationale, a rencontré les syndicats de l'enseignement et annoncé d'ores et déjà quelques mesures qui devraient se retrouver dans ce plan interministériel. Après cette rencontre, il s'est rendu au rectorat de Versailles, dans la tourmente après qu'une lettre, qualifiée "de honte" par le ministre, a été adressée à des parents qui dénonçaient un harcèlement subi par leur enfant.

Le 4 octobre prochain, à l'occasion de la Nuit du Droit, des professionnels, adjudant de gendarmerie, avocate du barreau de Limoges, juge des enfants au tribunal judiciaire de Limoges et président du tribunal administratif de Limoges, échangeront justement avec le public autour du harcèlement numérique. Ici, comme ailleurs, les cas de harcèlement existent. 

Une plus grande conscience collective

« Je veux un électrochoc à tous les niveaux… insuffler un changement de culture dans l’administration pour remettre de l’humain » rapporte Gabriel Attal.

La prise de conscience est collective, familles, enseignants et direction d’établissements, rectorats, gendarmes, policiers... Les associations attendent des réponses concrètes pour agir auprès des enfants.

Nathan Smadja, victime de harcèlement scolaire et fondateur de l'association "Résiste" demande qu'une enquête soit systématiquement ouverte lorsqu'un signalement est fait. La première association, « Marion la main tendue » créée en 2013, souligne que c’est déjà ce qui était demandé. Le film "Marion, 13 ans pour toujours" du réalisateur Bourlem Guerdjou avec Julie Gayet, Fabrizio Rongione et Luàna Bajrami est disponible actuellement en replay sur France TV.

Mais depuis, d’autres enfants se sont suicidés. 

D'après le ministère de l'Éducation nationale, 6,7 % des collégiens subiraient au moins cinq agressions répétées pendant l'année scolaire (violences, insultes, mises à l'écart). Mais des cas se présentent dès le primaire. Le défenseur des droits a eu à connaître d'un cas de harcèlement en CM1, preuve que le phénomène n'est pas réservé à l'adolescence. 

Concrètement, que faire ?

1. La première chose est de ne pas minimiser. Les professionnels constatent que c’est le premier réflexe « ça va passer, c’est pas grave, tu sais la vie est dure », sont encore des paroles entendues, alors que l’enfant commence à lâcher un ressenti. Or, avec l’importance prise par les réseaux sociaux dans la vie des jeunes aujourd’hui, on est loin des tensions de récréation que beaucoup d’entre nous ont connu dans l'enfance. Le harcèlement, c'est un vrai rapport de domination avec une volonté de nuire et une omerta vis-à-vis des adultes. Sous-estimer est donc une fuite de responsabilités. Il faut le rappeler, le harcèlement est un délit prévu par le Code pénal, avec action en responsabilité à la clé.

2. Repérer des signes, même si ce n'est pas chose aisée. Il peut être constaté une baisse des résultats scolaires, un repli sur soi, des troubles du sommeil, une agressivité anormale avec l’entourage, un changement dans les goûts et les envies. 

Mais il y a aussi des enfants qui ne montrent absolument rien, qui souffrent en silence en serrant les dents. "On découvre cette souffrance au moment des idées suicidaires" souligne Nathalie Préguimbeau, avocate au barreau de Limoges. 

3. Mettre l’enfant en condition de se confier, de parler. En famille bien sûr, mais aussi à l’école. Certains établissements scolaires ont déjà des élèves volontaires pour devenir ambassadeur anti-harcèlement. Ils ont été formés, ils connaissent l’engrenage, quand un groupe commence à rire de mauvaises blagues au détriment d'un élève, quand on refuse de s’asseoir à la cantine à côté de lui ou d’être avec lui dans un atelier de travaux dirigés… Ce sont déjà les signes de l'emprise d’un collectif pour isoler un élève. Le gouvernement va annoncer la généralisation de cette mesure dans tous les établissements.

4. Assurer une confidentialité absolue de la parole recueillie. C’est là qu’intervient l’avocat. Et ne pas s’imaginer que c’est compliqué, payant et inaccessible. Toute une équipe d’Avocats "AVO DROITS LES JEUNES" est formée pour être aux côtés des mineurs. En tout anonymat et gratuitement. On les trouve à la maison de l’avocat à Limoges, en face de la cité judiciaire, sans rendez-vous le mercredi après-midi, ainsi qu'à la Maison des adolescents le 3ᵉ mercredi du mois. Ces avocats ont également une permanence toute la semaine en appelant ce numéro "Permanence SOS JURIDIQUE MINEURS" 05.55.34.40.63 de 8 h 30 à 12h et de 13 h 30 à 17h.

Rappelons qu'un numéro national existe également : le 3020.

5. Sauvegarder sans tarder les preuves, comme les messages postés sur les réseaux sociaux, en faisant des captures d'écran ou en imprimant les posts. 

6. Exercer son contrôle parental et bloquer les correspondants toxiques.

7. Signaler le harcèlement à la direction de l'établissement scolaire. Il ne faut surtout pas chercher à régler le problème soi-même ou riposter en enchérissant sur les réseaux sociaux.

8. Déposer une plainte auprès de la gendarmerie ou de la police.

Les preuves disparaissent très vite, il faut vraiment les conserver aussitôt et ne pas hésiter à déposer une plainte en le signalant à l'établissement scolaire. En plus de la sanction pénale, des sanctions disciplinaires peuvent aussi être prises à l'encontre du ou des harceleurs, même s'ils sont dans un autre établissement scolaire.

Nathalie Préguimbeau, avocate au barreau de Limoges

à France 3 Limousin, rédaction web

C'est également une mesure qui devrait être annoncée dans le plan interministériel. "On pourra éloigner le harceleur, y compris dans le primaire, et non pas le harcelé. C'est incompréhensible que l'élève qui est harcelé doive quitter son école", souligne le ministre de l'Éducation nationale.

Un décret pris fin août prévoit déjà qu'un élève responsable de harcèlement scolaire pourra désormais être transféré dans un autre établissement scolaire et sanctionné même s'il est lui-même déjà dans un autre établissement, mais sa promulgation est encore attendue.

La création d'un "couvre-feu numérique"

Parmi les mesures possibles annoncées ce mercredi, le juge des enfants pourrait interdire à des jeunes poursuivis pour cyberharcèlement d'utiliser internet, par exemple de 18 heures à 8 heures du matin. Une interdiction qui reposerait sur la surveillance des parents. Ce serait aux parents de faire respecter cette interdiction judiciaire. Le non-respect de cette disposition pourrait être considéré par le juge des enfants comme une circonstance aggravante dans la procédure pour harcèlement et viendrait alourdir la sanction prononcée.

Des associations soulèvent déjà la difficulté de mise en œuvre de cette mesure, l'enfant harceleur pouvant toujours détourner cette obligation en empruntant un autre téléphone.

Le ministre a également évoqué la confiscation possible du téléphone portable des enfants accusés de harcèlement, tout comme l'existence d'une "majorité numérique" empêchant les moins de 15 ans de s'inscrire sur les réseaux sociaux sans l'accord de leurs parents.

Un audit lancé dans chaque académie

Un audit sur la gestion des cas de harcèlement de septembre 2022 à septembre 2023 sera lancé dans chaque académie. Les conclusions sont attendues dans quatre semaines. Les résultats de la lutte contre le harcèlement menée par les rectorats seront évalués chaque année. 

Des cours d'empathie à l'école

Plus globalement, c'est aussi vers une évolution de la société que tendent les réflexions. "Remettre de l'humain" veut dire revenir à plus de respect dans les relations à l'école et s'inspirer des programmes développés au Danemark et en Finlande qui, depuis les années 2000, développent les aptitudes psychosociales, comme les émotions, l'estime de soi et l'empathie pour ressentir ce qu'un élève mis à l'écart, insulté, violenté peut éprouver ou responsabiliser l'enfant harceleur en lui faisant prendre conscience des conséquences de ses actes.

Mais les effectifs sont-ils suffisants dans les rectorats ? Les formations sont-elles suffisantes ?

Autant de questions auxquelles le plan interministériel, attendu ce mercredi 27 septembre, devra répondre.

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