Propriétaire d'une trentaine de magasins en France, Alinéa a été placé en redressement judiciaire en mai 2020. En attendant le 31 août et la décision de justice concernant deux offres de reprise, les salariés du magasin de Poitiers déplorent que le groupe leur impose de rester sur le site.
Ouvert en 2016, le magasin d'ameublement Alinéa de Poitiers fermera prochainement ses portes. Le site poitevin, comme une trentaine en France, est tributaire du placement en redressement judiciaire du groupe. Celui-ci justifie sa mauvaise santé économique par les crises successives des gilets jaunes en 2018 et de la grève liée à la réforme des retraites, "puis l'épidémie du Covid-19 a mis a plat tout le plan de redressement de l'enseigne," explique la communication.
Deux offres de reprise du magasin de Poitiers sont étudiées par le tribunal de commerce de Marseille (le siège social d'Alinéa est à Aubagne dans les Bouches-du-Rhône, NDLR). Elles émanent de deux enseignes déjà présentes dans l'agglomération et proposent de sauvegarder respectivement 25 et 28 des 33 emplois du site. En attendant la décision judiciaire le 31 août, les salariés s'insurgent. Selon eux, le groupe Alinéa, propriété de la famille Mulliez, ne leur laisse pas le choix quant à leur avenir : qu'importe le repreneur, ils devront rester sur le site ou démissionner.
"On a l'impression d'être du bétail"
"On a l'impression d'être du bétail que l'on transporte de camion en camion," résume amèrement l'un de ces salariés qui se voit imposer un transfert de contrat vers la nouvelle enseigne qui reprendra le site."On nous a indiqué que le secteur d'activité serait sensiblement similaire. Mais peut-on imposer à un employé d'hôtel cinq étoiles de travailler dans un hôtel une étoile ? (...) Si on ne souhaite pas travailler pour les repreneurs, on se voit dans l'obligation de démissionner. Ce qui veut dire qu'on ne percevra ni de chômage ni de prime de licenciement", souligne-t-il.
Alinéa reprise par ses propres actionnaires ?
L'une des deux offres provient des actuels actionnaires, la famille Mulliez, qui pourrait ainsi reprendre une petite dizaine des sites Alinéa sous l'enseigne Néomarché, créée en 2018. "Ça leur permet de régler leurs dettes sans trop influer sur les chiffres du chômage," glisse un salarié de Poitiers-sud qui se pense victime, au même titre que ses collègues, d'un tour de passe passe financier.Contacté, le groupe Alinéa souligne le rôle prépondérant de la justice dans l'affaire. "Il n'y a pas de décision de la part des dirigeants, assure-t-on du côté de la communication nationale du groupe. Tout cela se fait sous l'égide du tribunal de Marseille, qui s'assure que toutes les parties soient satisfaites. La seule chose qui nous préoccupe, c'est la sauvegarde d'un maximum d'emplois, ce qui est préférable à une cessation d'activité toute simple."