C'est une question que beaucoup se posent au moment de jeter une bouteille dans la poubelle jaune du tri sélectif : faut-il ou non l'écraser et, si oui comment ? Au centre de tri de Poitiers, on a la réponse !
C'est un casse-tête pour beaucoup de foyers de Nouvelle-Aquitaine. Quand je jette mes bouteilles en plastique dans la poubelle jaune du tri sélectif, faut-il la jeter telle quelle, l'aplatir, ou au contraire l'écraser par le haut, en accordéon ?
Au centre de tri de Poitiers Saint-Eloi, géré par Suez, la question fait sourire : "L'important, c'est de la jeter avec le bouchon vissé au bout !", lance Mohammed Jahrani, responsable de production.
"Oui, sinon, le bouchon est trop petit et passe à travers les mailles des machines et n'est pas recyclé", précise-t-il. "Alors que s'il est vissé à la bouteille, il est recyclé avec."
Les écraser... un peu
Autour de moi, la question amuse décidément beaucoup. Non pas qu'elle soit naïve, mais on sent qu'elle a dû susciter pas mal de débats en interne."En théorie, il n'y a pas de consignes particulières", précise Quentin Roy, responsable de maintenance au centre de tri de Poitiers Saint-Eloi. Mais, "en pratique..., si vous voulez nous aider, oui, quand même".
"En fait, il faudrait préférer les écraser un peu", explique-t-il dans un sourire. "Mais, par le haut."
Car, sinon, vous risquez d'engendrer un surplus de travail aux équipes en charge des dernières opérations de tri, ces hommes et ces femmes qui jettent un dernier coup d'oeil au travail effectué par les machines.Si vous aplatissez la bouteille en plastique, la machine va la confondre avec du papier ou du carton !
- Quentin Roy, responsable de maintenance au centre de tri de Poitiers Saint-Eloi
"Si vous aplatissez la bouteille en plastique en l'écrasant avec vos chaussures, elle va être fine comme une feuille et la machine de tri va la confondre avec du papier ou du carton !", explique Quentin Roy.
Du plastique, dans la ligne de tri du papier, forcément, ça fait désordre. D'autant plus, qu'ensuite, les balles de matière (plastique, papier, métal...) sont destinées à être revendues à des usines de recyclage.
Nouvelle ou ancienne génération ?
Mais comme rien n'est tout à fait évident, l'option à retenir dépendrait, en fait, des machines qui équipent le centre de tri en charge de la collecte de vos déchets recyclables."On est en ce moment dans une situation où cohabitent en France des centres de tri nouvelle génération avec des centres de tri ancienne génération", explique Thomas Bataille, directeur des activités de tri mécanique Nouvelle Aquitaine et Occitanie pour Suez.
"Historiquement, on demandait aux usagers d'écraser leurs bouteilles en hauteur", poursuit Thomas Bataille. "Ca donnait un objet en 3D identifiable par les balistiques qui les différenciaient du reste en 2D. Il n'y avait à l'époque pas d'autres moyens pour les machines de tri d'identifier les bouteilles."
En France, les communes ont désormais obligation de mettre en oeuvre la collecte de l'intégralité des emballages dans les poubelles jaune, d'ici à 2022.Aujourd'hui, même si une bouteille est écrasée, le séparateur optique va reconnaître la matière et l'envoyer vers la bonne ligne de tri
- Thomas Bataille, directeur des activités de tri mécanique Nouvelle Aquitaine et Occitanie pour Suez
Bonne nouvelle, le centre de tri de Poitiers Saint-Eloi fait partie de ces sites "nouvelle génération". Il est désormais équipé pour collecter les sacs plastique, les pots de yaourts et même les barquettes.
Cette modernisation a une conséquence positive sur la manière dont on doit jeter nos bouteilles en plastique. Les nouveaux centres de tri sont équipés de lecteurs optiques qui permettent de différencier le plastique du papier et du métal...
"Aujourd'hui, même si une bouteille est écrasée comme une crêpe, elle va certes être d'abord repérée par la machine comme étant une feuille de papier ou du carton", poursuit Thomas Bataille. "Mais ensuite, le séparateur optique va reconnaître la matière comme étant du PET (le plastique de la bouteille), et l'envoyer vers la bonne ligne de tri."
Et comme un progrès n'arrive jamais seul, les nouvelles machines optiques sont capables de distinguer le plastique clair du plastique coloré et l'envoyer sur deux lignes de tri différentes.
Donc, en résumé, faites un peu comme vous voulez. Aplatie, légèrement écrasée ou complètement écrasée par le haut, les machines nouvelle génération devraient venir à bout de toutes les difficultés et envoyer votre bouteille vers la bonne ligne de tri.
Des milliers de tonnes recyclées
Dans la région, le travail de recyclage semble porter ses fruits.Chaque année, Grand Poitiers trie 11.000 tonnes de déchets recyclables, dont 3.000 tonnes de plastiques divers.
60% de ce tonnage (soit 1800 tonnes) sont des bouteilles plastique en PET. A noter que 10 à 12% du plastique collecté sont constitués de films plastiques.
Le centre de tri de Poitiers Saint-Eloi accueille également les déchets recyclables de la communauté d'agglomération de Niort et des environs, soit environ 7.000 tonnes par an, selon des données statistiques de Suez.
D'autres déchets arrivent aussi en provenance d'autres communes de la Vienne, évalués à 3 à 4.000 tonnes annuelles.
En tout, selon Suez, le centre de tri de Poitiers Saint-Eloi recycle entre 22.000 et 25.000 tonnes de déchets recyclables par an.
En Charente-Maritime, le centre de tri de La Rochelle, également exploité par Suez et récemment modernisé, trie jusqu'à 24.000 tonnes de déchets recyclables à l'année. Ils proviennent de l'agglomération rochelaise mais aussi d'autres communes du département, jusqu'à Saintes.
Le plastique trié est envoyé vers des usines de recyclage. Il est transformé en granules, puis fondu pour redevenir du plastique. La matière obtenue sert au rembourage des polaires. D'autres matières plastiques, celle des bouteilles de lait par exemple, sont fondues pour devenir des tuyaux de plomberie, pour l'évacuation des eaux usées des toilettes notamment.
Pour Grand Poitiers, l'objectif reste de parvenir à diminuer ces tonnages.
"On essaye d'accompagner les usagers à utiliser moins de plastique", explique Céline Besnard, directrice des déchets de Grand Poitiers. "Une partie du plastique peut être éviter. Je pense à certains emballages."
Les communautés de communes sont en fait incitées à améliorer leurs performances en matière de tri sélectif. A la fois mieux trier mais aussi réduire la consommation des usagers en déchets recyclables.
Citeo (anciennement "éco-emballages") soutient financièrement les agglomérations, proportionnellement à leur performance. Ainsi, la taxe d'ordures ménagères (114 euros par ménage à Grand Poitiers) correspond au coût de la collecte et du tri des déchets, moins leur revente et les incitations financières de Citeo.