Comme les 864 chibanis, ces travailleurs marocains présents au procès en appel contre la SNCF, Mohamed Aouichi attend beaucoup de l'audience. Il a consacré 42 ans de sa vie à la compagnie de chemin de fer et sa lutte dure depuis quinze ans. Il réclame la revalorisation de sa retraite.
Mohamed Aouichi, 68 ans, est un chibani, l'un de ces travailleurs marocains recrutés dans les années 70 par la SNCF. A 24 ans, il est embauché à Casablanca pour travailler au Havre pour la SNCF. Visite médicale et contrat de travail, tous les papiers sont signés sur place. Il embarque en bateau le 6 avril 1973. Il ne quittera plus jamais la ville portuaire. Il y aura travaillé pendant 42 ans.
A la SNCF, il était cheminot. Mais son statut portait le nom administratif de "PS 25". "Un régime particulier" explique-t-il, qui ne lui donnait pas les mêmes droits que ses collègues français...
"Pas d'augmentation de salaires, pas d'augmentation dans les échelons, pas le droit à la prime de résidence, des conditions pénibles...", le chibani égrène les différences de traitement avec les autres salariés. Et de conclure : "J'ai subi une discrimination."Pas d'augmentation de salaires, pas d'augmentation dans les échelons, pas le droit à la prime de résidence, des conditions pénibles...
15 ans de procédure
Il a attendu une dizaine d'années pour passer de la qualification A à la B, qui lui donne plus d'avantages. Il s'estime chanceux : " Certains collègues sont restés qualification A toute leur carrière !" Malgré ses nombreux courriers de réclamation, il évolue en catégorie C en 2007, soit six ans seulement avant de prendre sa retraite, en avril 2013. Il a 64 ans... alors que ses collègues cheminots français sont déjà retraités, depuis leurs 55 ans."Si j'étais parti avec seulement 40 ans d'ancienneté, j'aurais eu une retraite de misère, explique-t-il, alors j'ai continué."
Malgré ses nombreuses lettres de réclamation, Mohamed Aouichi n'a jamais obtenu gain de cause. Sauf en septembre 2015, lorsque le conseil de prud'hommes condamne la SNCF à verser 170 millions d'euros de dommages-intérêts aux chibanis. Quinze ans après... Une décision dont la compagnie des chemins de fer a fait appel. Le délibéré sera rendu le 31 janvier 2018.