Depuis lundi et jusqu’au vendredi 17 novembre, les animateurs du périscolaire à Paris sont en grève pour dénoncer leurs conditions de travail. Un rassemblement était organisé devant l'Hôtel de Ville de Paris. Paroles de manifestants.
Lou, à 22 ans, elle vient de passer le concours pour devenir animatrice dans les écoles de la ville de Paris. Elle est stagiaire titulaire depuis septembre et travaille dans le 19e arrondissement. "Parfois", raconte-t-elle, "on se retrouve à deux pour encadrer une soixantaine d'enfants".
"Aujourd'hui dans mon école, je me suis retrouvée seule avec 32 enfants". "C'est le quotidien en ce moment", déplore, Lou. Et de poursuivre "lorsque des vacataires viennent travailler chez nous. Et qu'ils voient leur paie à la fin du mois, ils ne reviennent pas et je les comprends", insiste la jeune fille.
Au total, 2 000 titulaires, 1 000 contractuels et 4 000 à 5 000 vacataires interviennent chaque jour dans les écoles de Paris. À l'appel des syndicats, le SUPAP-FSU et la CFDT, un rassemblement était organisé ce mardi devant l'Hôtel de Ville de Paris.
Parmi les revendications des manifestants, la précarité du statut d'animateur et un personnel en sous-effectif chaque jour ou presque dans les écoles. "De nombreux vacataires sont sur des postes qui sont en réalité de vrais emplois", explique Nicolas Léger, co-secrétaire général du SUPAP-FSU.
"Les vacataires n’ont pas de contrat de travail, ils sont payés à la pièce. La ville ne leur fournit même plus une décision de travail qui est un ersatz de contrat d’engagement. Ce sont des collègues qui viennent travailler dans les écoles qui n’ont aucun lien avec la ville de Paris par un contrat et qui reçoivent une paye, deux mois après le premier service effectué", précise Nicolas Léger. "Ce n’est pas satisfaisant pour les collègues et la Ville est dans l’illégalité la plus complète sur ce sujet. On a des vacataires qui sont là depuis des années sur des postes réguliers qui devraient être en CDI depuis longtemps", dénonce le responsable syndical.
Shahinez et sa copine Samantha sont présentes devant l'Hôtel de Ville. Animatrices vacataires dans une école du 19e arrondissement, elles sont venues toutes les deux cet après-midi rejoindre le rassemblement. "Je suis là aujourd'hui parce que je trouve que notre travail n'est pas assez mis en valeur", explique Shahinez. "Lorsqu'on est vacataire c'est souvent très compliqué, on ne sait pas si on va travailler chaque jour, c'est un peu comme de l'intérim". "Un directeur peut t'envoyer un message pour te demander de travailler le lendemain et parfois ça peut être juste pour la pause méridienne de 2 heures et ce jour-là on ne gagne pas grand-chose", reconnaît la jeune femme.
Pour Samantha, c'est un métier de passion. “Nous sommes fiers de faire ce métier-là et lorsqu'on a un manque de reconnaissance, cela peut être très frustrant", insiste Samantha. Elle souhaiterait continuer dans ce métier et réussir à en vivre correctement. Pour l'instant, elle vit chez ses parents et explique encore pouvoir se permettre d'avoir des contrats précaires.
Des personnels en sous-effectif
Même constat pour Lou qui gagne aujourd'hui 1 500 euros net à temps complet pour 33 heures en moyenne par semaine. "J'ai été vacataire, pendant, plusieurs mois et effectivement, quand je me retrouvais seule. Dans certaines écoles avec 50 enfants. Eh bien, je ne revenais pas. C'était trop dur", témoigne-t-elle. "Et cela peut poser des problèmes de sécurité surtout quand on travaille avec des tout-petits", insiste Lou.
Elle ne veut pas travailler la boule au ventre. "Si un enfant se blesse, c'est nous qui sommes responsables. Nous sommes en souffrance dans notre travail, nous n'avons pas de collègues pour nous aider"."Aujourd'hui, un parent d'enfant, m'a remercié de faire grève", raconte-t-elle."Faites grève parce que c'est super important, pour vous, mais aussi pour nos enfants", m’a dit-il dit.
Titulaire depuis 20 ans, Fatiha parle d'un quotidien qui se dégrade. "Depuis la réforme en 2013, les choses ont beaucoup changé, les agents sont titularisés de plus en plus difficilement et de nombreuses personnes restent trop longtemps vacataires. Et ça, ce n'est pas normal", explique-t-elle. Elle cite l'exemple d'un collègue dans son école qui travaille depuis des années en tant que vacataire "Il n'est pas titularisé, même pas contractualisé, les vacataires non aucun statut et s’ils sont malades, ils ne sont pas payés", rappelle-t-elle.
Prime et évolution statutaire
La Ville de Paris doit faire des propositions sur les effectifs, la dé-précarisation des vacataires, les salaires et le niveau des primes, expose Nicolas Léger, présent dans le rassemblement.
Sur les rémunérations, il y a deux leviers, explique le responsable syndical qui demande l’attribution de plusieurs primes pour faire face à l’inflation et la dégradation du pouvoir d’achat de ses collègues. Mais aussi que la mairie de Paris ouvre des négociations pour des évolutions statutaires des animateurs.
Une réunion avec la mairie est prévue lundi
Les élus en charge du dossier, Olivia Polski et Patrick Bloche envisagent de recevoir lundi une délégation. "Ça ne nous convient pas du tout", expose Nicolas Léger. "Il y a une assemblée générale des personnels jeudi à la Bourse du travail. Les collègues devront se positionner en fonction des négociations avec la Ville. Nous n’allons pas arrêter la grève jeudi après-midi. On se disant qu’on va nous annoncer des choses positives lundi", désespère-t-il.
Le groupe Changer Paris et le groupe Communiste et citoyen ont chacun déposé des vœux sur le thème du périscolaire pour le Conseil de Paris qui devraient être discutés jeudi. Aujourd'hui, le groupe Communiste citoyen a refait un courrier à Anne Hidalgo, pour demander de recevoir les représentants des animateurs dans le cadre de la mobilisation de cette semaine.