INTERVIEW. "On risque une thrombose du système" : le secteur du transport logistique inquiet face à l’arrivée des voies olympiques

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À partir de juillet 2024 et jusqu’à mi-septembre, des axes routiers seront réservés aux personnes accréditées pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. Jean Pierre Gaumet, président du groupement des activités de transports et manutention d’Île-de-France craint un été compliqué pour le secteur du transport logistique.

De nombreux axes routiers parisiens et franciliens seront exclusivement réservés aux personnes accréditées pour les JO de Paris du 1er juillet au 15 septembre 2024. En tout, la région parisienne comptera 185 kilomètres de "voies olympiques" dans lesquelles uniquement les athlètes, journalistes et personnels médicaux pourront circuler entre 6h et minuit.

Le secteur du transport logistique pourrait être fortement impacté. La livraison et l'acheminement de marchandises seront plus compliqués qu'à la normale. C'est ce que craint Jean-Pierre-Gaumet, président du groupement des activités de transport et manutention d’Île-de-France.

Quel impact ces "voies olympiques" risquent-elles d’avoir sur le travail des transporteurs ?

Jean-Pierre Gaumet : Cela se répercutera surtout sur leur travail d’approche. Des grands axes de circulation comme le périphérique vont être coupés et ce sont des artères primordiales du réseau routier pour les transporteurs. La "livraison du dernier kilomètre" sera très peu impactée mais l’approvisionnement des supermarchés, des grands magasins et des pharmacies le sera. Des tronçons de l’A1 seront inaccessibles la journée, or, c’est par le nord de Paris que viennent la plupart des marchandises acheminées vers l’Île-de-France. 

Le transport et la logistique sont comparables au système sanguin de l’économie, lorsqu’ils ne peuvent pas irriguer l’ensemble des territoires correctement et qu’on en réduit les artères, on risque la thrombose du système.

Quelles répercutions ce rétrécissement des voies utilisables par les transporteurs aura-t-il sur le grand public ? 

Jean-Pierre Gaumet : Nous risquons d’avoir de nombreux dysfonctionnements au moment des livraisons. Cela pourrait créer beaucoup de retards, une qualité amoindrie au moment où le client est livré, ou pire, des services risquent de ne pas être rendus. Une fois le créneau horaire dépassé, certaines personnes n’attendent plus. On s'attend à de nombreux mécontentements de la part des clients. Cela s’explique par le fait que les tournées exécuées ne tiendront pas compte des bouchons et des déviations. Cela crée automatiquement des retards. 

Nous risquons également d'avoir moins de conducteurs en région parisienne et donc de plus longs délais de livraison. Par exemple, des transporteurs qui viennent de province risquent de se détourner de la région francilienne, car leur temps de trajets pourrait être beaucoup plus long qu’à la normale. 

Comment anticipez-vous cette période ?

Jean-Pierre Gaumet Cela va être compliqué, il va falloir s’organiser et prendre en compte cette nouvelle donnée. Cela aura un impact certain sur le moral des chauffeurs dans un secteur qui est déjà sous tension, et dans lequel il manque 40 000 conducteurs à l’échelle nationale. En Île-de-France, on livre chaque année 200 millions de tonnes de marchandises, cet objectif risque d’être mis à mal par ces déviations. Nous espérons pouvoir faire accréditer des camions sur les voies dédiées. À un peu plus de 500 jours des Jeux, nous n’avons toujours pas de réponse sur la problématique des livraisons. Nous attendons des décisions pragmatiques de la part des pouvoirs publics. Pour pallier les manques, ils nous proposent de livrer la nuit, mais c’est irréalisable. Les conditions de travail sont déjà compliquées durant la journée pour nos conducteurs. Entre les soucis de santé et les longs horaires sur la route, beaucoup n'accepteront pas de travailler entre minuit et 6h. De plus, la nuit, il nous faut deux salariés obligatoirement. 

De plus, il faut s’attendre à un afflux important de visiteurs en juillet et début septembre. La région parisienne se vide autour du 15 août, mais pour le reste de l’été, beaucoup de Franciliens restent vers chez eux. Ajoutez à cela, la venue de visiteurs étrangers pour les JO et vous avez une situation où les demandes en livraison vont être plus importantes que sur d’autres, mais le réseau routier sera moins accessible. Cela risque de poser de gros problèmes.           

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