À l'INSEP, (Institut National du Sport de l'Expertise et de la Performance), elle s'entraîne deux fois par jour. Le reste du temps, elle se partage entre des cours de marketing international et son activité de conférencière. En cette journée internationale des droits des femmes, rencontre avec Jade Maréchal, en quête perpétuelle de réussite.
"J'ai plusieurs casquettes." Dès le début de l'entretien avec Jade Maréchal, le ton est donné. La sportive de 23 ans est une femme pressée. C'est ce que reflète son parcours atypique. Soutenue par une famille où la détermination est un credo, la pensionnaire de l'Institut National du Sport de l'Expertise et de la Performance (INSEP) a autant d'ambitions sur les pistes d'escrime que sur les bancs de la fac. Elle y affine son avenir en tant qu'entrepreneuse.
Jade démarre l'escrime à 9 ans sous les yeux et le mentorat de son père. "J'étais président du club où elle s'entraînait dans la région de Bordeaux donc je gardais toujours un œil sur son évolution", indique Pascal Maréchal. Dès ses débuts, la jeune fille progresse vite. Il faut dire que l'escrime est une institution chez les Maréchal. "J'aurais pu commencer avant, mais l'une de mes grandes sœurs ne voulait pas que je fasse le même sport qu'elle, pour éviter qu'il y ait un esprit de compétition entre nous deux", explique Jade. La compétition, c'est bien ce qui anime la famille Maréchal au quotidien.
"On a toujours transmis à nos 5 filles la faculté de se donner à fond et à ne rien lâcher", analyse Pascal Maréchal. D'après ses parents, elle avait déjà compris les bases du sport avant de monter sur la piste. "Elle avait vu sa sœur, elle comprenait les déplacements donc elle apprenait vite", se souvient sa mère Sylvie Maréchal.
Pour Jade et ses parents, les week-ends se remplissent vite car la jeune fille démarre rapidement la compétition. "Nous assurions tous les déplacements du club et accompagnions Jade sur ses compétitions nationales donc nous étions souvent sur la route", se rappelle Sylvie Maréchal. Jade gravit les échelons au niveau départemental, régional puis dispute à 16 ans le championnat de France seniors qu'elle remporte. "J'ai alors compris que je pouvais faire quelque chose de bien dans ce sport car j'étais en avance", note la spécialiste du fleuret. Son nom circule alors de plus en plus chez les recruteurs des grands clubs. En 2019, elle décroche la consécration pour tout jeune sportif : l'INSEP lui propose d'intégrer ses rangs.
"L'INSEP ça ne se refuse pas"
"C'était quelque chose d'énorme pour moi. J'avais attendu cela depuis des années. 19 ans, cela peut paraître tard pour y entrer, mais en escrime, la maturité vient plus tard que dans d'autres sports", indique la championne.
Pour ses parents, c'est une fierté, mais également une nouvelle donne à laquelle il faut s'adapter. "On savait qu'elle ne pouvait pas dire non car l'INSEP ça ne se refuse pas. En revanche, elle devait déménager sur Paris et vivre en internat. Cela allait lui demander une période d'adaptation. Pour nous en tant que parents ce n'était pas non plus facile de voir la petite dernière quitter la maison", confie la maman.
À l'INSEP, elle découvre l'intensité des entraînements au plus haut niveau. "À Bordeaux, je ne m'entraînais pas tous les jours alors que maintenant j'étais sur la piste deux fois par jour, c'était différent et plus intense. Dans mon ancien club, il y avait moins d'athlètes de haut niveau, donc les entraînements étaient plus personnalisés. À l'INSEP j'ai appris à prendre mes responsabilités et à travailler en autonomie."
Travailler en autonomie pour enchaîner les succès. Notamment en 2023 lorsqu'elle remporte le titre de championne d'Europe par équipes avec ses copines de l'INSEP.
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Autre difficulté : elle doit jongler entre le sport de haut niveau et les études. Elle intègre en 2020 l'équivalent de son école de marketing international bordelaise à Paris. "Il a fallu aménager mon emploi du temps pour que je puisse me concentrer également sur mes études car j'ai conscience que ma carrière d'escrimeuse ne va pas durer éternellement. Il faut être préparée pour l'avenir."
Pendant ses années collège et lycée, ses parents ont d'ailleurs toujours refusé de la mettre en sport études. "On voulait qu'elle priorise ses études avant tout pour qu'elle puisse être sereine après sa carrière de sportive", détaille Pascal Maréchal.
Entrepreneuse et mannequin
C'est dans cette optique que dès son arrivée à l'INSEP, elle est devenue chef d'entreprise en tant que conférencière. "J'ai pu aller en entreprise pour raconter mon quotidien en tant qu'athlète de haut niveau."
L'objectif : rapprocher le monde du sport et celui de l'entreprise qu'elle a également lancé une entreprise de formation avec Eva Lacheray. "Elle est dédiée aux entreprises et se fait en ligne. On demande à des sportifs de donner des conférences sur des valeurs transposables dans ces deux mondes", explique-t-elle au sujet du concept.
Même mentalité lorsqu'on évoque avec elle les prochaines échéances comme les JO de Paris 2024. "Je saurais en avril prochain si j'y participe. Dans tous les cas, ce ne sera qu'une étape et il faudra voir plus loin", répond-elle avec aplomb.
En plus de ces trois activités, elle est également mannequin. "C'est un passe-temps que j'aime beaucoup, j'ai commencé à 19 ans." Elle est notamment égérie pour une marque de sport et a pris la pose récemment pour présenter les collections d'équipements que portera l'équipe de France pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques.
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"J'ai fait des choix, mais pas de sacrifices"
Dans toute cette "success story", il y a quand même des axes à améliorer selon son père. "On travaille toujours sur la gestion de l'échec pour qu'elle puisse trouver la meilleure façon de se relever. C'est important qu'elle prenne cela comme une étape nécessaire dans la construction de n'importe quel athlète. On sait néanmoins qu'elle cherchera à avoir un ou deux coups d'avance en cas d'échecs", précise celui que sa fille décrit comme un père pragmatique et factuel dans ses constats.
Selon la jeune adulte, cette vie à 100 à l'heure façonne sa personnalité. Là où d'autres sportifs évoquent des sacrifices liés à leur pratique, elle préfère parler de choix. "Toutes les choses que je n'ai pas pu faire comme les soirées étudiantes les sorties entre amis, je ne les regrette pas, car je sais qu'à la place de cela, j'ai fait quelque chose d'important dans ma vie. Des choses qui m'ont permis d'avancer et de progresser."
Progresser toujours pour avancer encore. Voilà qui semble être la devise de Jade et de ses parents dans cette quête perpétuelle de réussite.
Cette quête, Jade espère qu'elle pourra inspirer des petites filles à suivre son exemple en cette journée internationale des droits de la femme : "J'espère être un exemple pour elles en tant que femme qui trouve un équilibre entre ses activités. Je veux leur montrer qu'il ne faut pas avoir peur de viser haut, même si on rate ses objectifs car on récolte tellement d'autres choses au passage."