La défense de Salah Abdeslam ne plaide pas l'acquittement mais insiste sur le "renoncement" et l'amendement possible de son client. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité incompressible.
Salah Abdeslam pourra-t-il un jour "revenir dans la société" ou est-il "définitivement irrécupérable"? Au procès des attentats du 13-Novembre, la défense du seul membre encore en vie des commandos a eu lieu ce vendredi après-midi pour tenter de lui éviter la prison à vie.
Le premier des avocats du Français de 32 ans à se lever, demande à la cour d'aller au-delà des "certitudes" avec lesquelles beaucoup étaient arrivés au début du procès, au sujet de celui qui a gardé le silence pendant les six années d'enquête. Avant de largement s'exprimer au cours du procès.
Peine maximale requise
Le parquet national antiterroriste (Pnat) a réclamé contre Salah Abdeslam la plus lourde peine du code pénal, la réclusion criminelle à perpétuité incompressible. Cette sanction rarement demandée, prononcée à quatre reprises seulement, rend infime la possibilité d'une libération.
Le ministère public l'avait justifiée "au regard de l'immense gravité des faits", mais aussi de la personnalité du principal accusé. Il "reste convaincu de n'avoir tué personne" et a adopté "une stratégie de minimisation constante des faits, c'est dire le changement qu'il lui reste à parcourir", avait avancé le Pnat.
"Cela me paraît normal que ses avocats réclament une justice qui ne cède pas à la vengeance. C'est ce qu'on réclame depuis bientôt 7 ans. Maintenant, c'est à la cour de trancher, pas aux victimes", a réagi après l'audience Arthur Dénouveaux, rescapé du Bataclan et président de l'association de victimes Life for Paris.
"Ça s'appelle la loi du talion"
Une peine digne d'un "tribunal militaire" qui juge des "ennemis" et non "des accusés", répond Me Vettes au ministère public. "Ce procès ne doit pas être une continuation de la guerre contre le terrorisme par d'autres moyens".
"On vous demande de sanctionner Salah Abdeslam et ses co-accusés à la hauteur des souffrances des victimes, ça s'appelle la loi du talion", clame Me Martin Vettes, selon le récit de franceinfo. Et de poursuivre, face aux juges : "Quand vous réfléchirez à votre décision et que vous répondrez par oui ou par non à un très grand nombre de questions, je vous demande de vous demander : est-ce que la peine que nous allons prononcer nous rendra meilleurs ?"
De son côté, Arthur Dénouveaux rétorque que : "personne n'a jamais nié que Salah Abdeslam était humain. Ça serait ridicule de croire que, parce que les attentats sont horribles, c'est inhumain. On a le droit de parler de son humanité, cela n'empêche pas non plus de le condamner à perpétuité".
Ce dernier attend avant tout un verdict "inattaquable en droit" qui illustrerait "la force de notre démocratie pour répondre au terrorisme". Et d'ajouter : "l'important, c'est que le verdict soit accepté par la société plus que par les victimes".
Renoncement sincère ?
Salah Abdeslam qui avait fièrement revendiqué, au premier jour du procès le 8 septembre, son appartenance à l'État islamique, avait conclu son dernier interrogatoire, mi-avril, en versant des larmes et en présentant ses excuses "à toutes les victimes".
Des larmes "spontanées et sincères", soutient son avocat. "Il n'y a pas eu de stratégie lacrymale de la défense".
Le "dixième homme" des commandos djihadistes qui ont fait 130 morts à Paris et Saint-Denis n'a cessé, au cours des débats, d'affirmer qu'il avait "renoncé" à tuer le soir du 13 novembre 2015, refusant "par humanité" d'actionner sa ceinture explosive. Sans convaincre l'accusation qui a critiqué la parole sélective de l'accusé.
"Le fait de ne pas avoir appuyé sur le bouton ne fait pas d’Abdeslam un lâche car cela reviendrait à considérer ceux qui se sont donnés la mort en emportant avec eux des innocents sont courageux", répond Olivia Ronen, autre avocate de Salah Abdeslam.
La défense de Salah Abdeslam, qui a reconnu certains allers-retours en Europe pour récupérer les commandos de retour de Syrie, la location de voitures et d'appartements, n'a pas plaidé l'acquittement. Mais a insisté, devant la cour d'assises spéciale de Paris, sur ce "renoncement" et l'amendement possible de son client.
"Je ne présente aucun danger pour la société", avait affirmé sans ciller Salah Abdeslam à l'audience.
Avant de rendre son verdict mercredi 29 juin en fin de journée, la cour donnera une dernière fois la parole aux 14 accusés présents - six le sont par défaut - lundi matin.
Retrouvez sur ce lien, tous les articles publiés sur le procès des attentats du 13 novembre 2015 par la rédaction de France 3 Paris-Île-de-France.