Quelque 200 personnes se sont rassemblées ce vendredi, aux abords du ministère du Travail et des Invalides. Fermement opposées à la réforme des retraites, elles dénoncent l'augmentation du nombre d'accidents et de morts au travail en cette journée mondiale de la santé et la sécurité au travail.
"Ça plane pour moi, Hou-hou-oou-oou!", aux abords du ministère du Travail, la musique de Plastic Bertrand se fait entendre sur les enceintes de la CGT. Si l'ambiance semble légère, le sujet du rassemblement, lui, ne l'est pas du tout. Car c'est à l'appel du syndicat que se sont réunies plusieurs centaines de personnes ce vendredi 28 avril, à l'occasion de la journée mondiale de la santé et de la sécurité au travail.
"L'omerta sur la mort au travail commence à se fissurer, mais l'impunité patronale perdure. […] Il faut faire cesser cette hécatombe de malades, de morts et d'estropiés", déclame un cégétiste au moment d'une prise de parole publique.
Morts au travail, première bataille syndicale
En effet, selon les derniers chiffres d'Eurostat, la France serait le pays en Europe où il y a le plus d'accidents par travailleur, et le 9e sur 27 en termes d'accidents mortels. Un classement et une réalité qui érige ce problème en "première bataille syndicale", selon Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT présente sur les lieux.
"Il n'y a aucune fatalité à mourir au travail", martèle-t-elle. Pour la nouvelle patronne de la CGT, plusieurs mesures doivent être rapidement mises en place afin de limiter les accidents et d'améliorer les conditions de vie des travailleurs. Elle revendique entre autres une augmentation des effectifs au sein de l'inspection et de la médecine du travail, mais également plus de sanctions pour les entreprises qui ne respectent pas les normes de prévention et de sécurité.
Réinstaurer les CHSCT
En cette journée de mobilisation, la CGT a également appelé au retour des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), remplacés lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron par le comité social et économique (CSE).
Pour Philippe, un retraité d'Air France de 65 ans, la simplification des CHSCT en CSE en ont fait des "chambres d'enregistrement" dans lesquelles les salariés sont moins pris en compte.
Christophe, qui travaille dans le BTP, avoue également constater une dégradation de ses conditions de travail : "Il y a beaucoup de sous-traitance dans le bâtiment avec des gens qui ne parlent pas souvent le français et qui sont exploités. Nous voulons faire une grande grève pour toucher les profits, car les patrons ne sont sensibles qu'à cela".
Un travail qui rend malade
Maria-Dolores a 52 ans, et Mina 37 ans, toutes les deux travaillent pour la sécurité sociale en Île-de-France. Au quotidien, elle constate une perte de sens chez leurs collègues, que le travail "rend malade".
"Nous manquons de personnes, de moyens, la pression des chiffres, les objectifs inatteignables, l'autoritarisme et la mise en concurrence fatiguent nos collègues qui vont rarement au bout de leur carrière, ils terminent souvent en arrêt maladie ou en retraite pour inaptitude", confie Maria-Dolores, qui travaille depuis 30 ans à l'Assurance maladie.
"La devise de la sécurité sociale c'est d'agir ensemble, mais c'est faux ! Nos supérieurs mettent en application une politique du chiffre et de fermeture des centres pour atteindre un centre par département, évidemment qu'à la fin les assurés n'en peuvent plus, et nos collègues non plus", ajoute Mina.
Pour une meilleure reconnaissance des maladies professionnelles
Ce manque de considération des salariés est également dénoncé par Danielle Simonnet, députée LFI de la 15e circonscription de Paris. "On se préoccupe de moins en moins des travailleurs et des travailleuses dans une logique libérale de rendements, au mépris de leur sécurité." Le chantier du Grand Paris Express est, selon elle, un exemple de cette "logique absurde" où pour tenir les délais des Jeux Olympiques de Paris "les conditions de travail n'ont pas été respectées", faisant cinq morts sur les chantiers.
Selon l'élue, cette journée mondiale de la santé et de la sécurité au travail est l'occasion de rappeler "que le nombre de morts au travail repart à la hausse". Elle plaide également pour la réouverture des CHSCT, la reconnaissance de certaines maladies professionnelles comme les burn-out ou encore le moindre recours à la sous-traitance. "Il faut lutter contre la précarité au travail, mais également sur les problématiques environnementales, comme les composantes cancérigènes avec lesquelles certains professionnels comme les agriculteurs sont en contact."
La CGT appelle à une grande manifestation festive et "bon enfant" le 1er mai prochain. L'objectif étant de faire pression sur les parlementaires pour qu'ils votent la proposition de loi d'abrogation de la réforme des retraites qui doit être soumise au vote le 8 juin prochain.