Le long-métrage a peu de chance de faire un gros score au box-office. A Paris, le street artiste Toolate expose devant trois cinémas l’affiche d’un film imaginaire, pour dénoncer le manque de considération du gouvernement.
C’est un "très très long métrage basé sur une histoire vraie d’un monde traversant une pandémie, dans lequel, le gouvernement manque de considération pour les lieux culturels". L’artiste Too Late, originaire de Nice, a imaginé l’affiche de Non Essentiel, le "seul film à l’affiche depuis le 30 octobre 2020". L’œuvre, ironique, est visible devant l’Escurial dans le XVIIIe, le Majestic Bastille dans le XIe, et le Reflet Medicis dans le Ve.
Too Late raconte avoir eu l’idée en passant un jour devant un cinéma : "J’ai eu l’impression qu’il était abandonné, avec ses vieux films encore à l’affiche. Comme dans une ville fantôme. Alors je me suis dit que passer un message sur les façades concernant la situation actuelle serait une bonne idée."
Le street artiste a alors contacté le groupe Dulac Cinémas (ex-Les Écrans de Paris), qui lui a "laissé carte blanche" pour trois de ses cinq établissements indépendants dans la capitale. L’exposition a été pensée "comme une sortie officielle", même si le long-métrage ne sera évidemment jamais diffusé en salle.
"Le monde de la culture a été considéré comme "non essentiel" par le gouvernement durant cette crise sanitaire, et en tant qu’artiste ça me paraissait important de le dénoncer, souligne Too Late. La culture est fondamentale. Empêcher d’ouvrir les lieux de pensée et de liberté, c’est nous empêcher de rêver. C’est empêcher l’essentiel."
"J’aurais préféré que mon film ne voit jamais le jour"
Dans un premier temps, le street artiste pensait créer l’affiche "manuellement" avec sa technique habituelle, des pochoirs. "Mais j’avais trop de contraintes, notamment le manque de temps par rapport à la quantité à réaliser, détaille-t-il. Alors j’ai travaillé sur une réalisation numérique que j’ai envoyée dans une salle d’un cinéma partenaire."
A l’affiche, on peut observer le titre du film, en rouge, qui surplombe deux personnages de Pulp Fiction, de Quentin Tarantino, armés de bombes de peinture aérosol. "Cette crise est une fiction devenue réalité, raconte Too Late. Pulp Fiction est un film culte, cette scène a été reprise par beaucoup d’artistes dans le milieu du street art, John Travolta et Samuel L. Jackson braquent des hommes et s’ensuit un véritable carnage. Sur ma version le carnage est d’avoir considéré les cinémas comme "non essentiel"."
"A vrai dire, j’aurais préféré que mon film ne voit jamais le jour, que la culture ait sa place dans la société pendant la crise, poursuit l’artiste. Depuis octobre 2020, les cinémas sont dans le flou, il n’y a pas encore de date officielle de réouverture, le manque de considération est encore et toujours d’actualité. Pourtant des mesures auraient pu permettre d’ouvrir les lieux culturels. De plus, 400 films sont en attente, ce qui va entraîner des complications surtout pour que les films d’auteurs trouvent une place face aux blockbusters." Il espère toujours, "comme beaucoup", une réouverture rapide.
Too Late précise avoir d’autres projets en cours dans la capitale. En Novembre dernier, il avait d’ailleurs décidé d’encadrer et exposer dans les rues de Paris des masques chirurgicaux usagés jetés par "50 connards". Une série d’œuvres conçue pour dénoncer cette source de pollution, dans le contexte de pandémie.