Réouverture des restaurants : "On ne saute pas au plafond"

Les terrasses des restaurants et des cafés vont pouvoir rouvrir dans trois semaines, à partir du 19 mai, avec des tables de six personnes maximum et un couvre-feu repoussé à 21 heures. Réaction mitigée pour Laurent Besson, gérant de la Taverne Gambrinus en Essonne. 

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Son histoire avait été beaucoup relayée sur les réseaux sociaux. Il y a cinq mois, la veille de Noël, nous avions interrogé Laurent Besson. Son établissement, la taverne Gambrinus, à Saint-Michel-sur-Orge, dans l'Essonne, était durement frappé par l'épidémie de la Covid-19, comme beaucoup d'autres établissements de restauration ou bars de la région. M. Besson avait alors fait appel à la générosité de ses clients et des internautes pour tenter de sauver son travail à travers une cagnotte en ligne. Malgré les recettes obtenues la situation est délicate.

Laurent Besson a, comme beaucoup de Franciliens, pris acte de l'interview du président de la République concernant le plan de déconfinement. Celui-ci indique que les restaurants pourront ouvrir leurs terrasses dès le 19 mai avec un couvre-feu décalé à 21 heures. Et le 9 juin, les restaurants pourront rouvrir dans leur totalité et le couvre-feu sera décalé à 23 heures. Tout cela, évidemment, si la situation sanitaire le permet. Si le taux d'incidence est inférieur à 400. Nous avons recueilli le témoignage de M. Besson, cinq mois après notre dernière entrevue, pour avoir son sentiment sur cette nouvelle phase qui s'ouvrira dans quelques semaines... si tout va bien.

Quel est votre ressenti suite aux annonces du Président ?

"Je suis partagé. On ne saute pas au plafond. Mon établissement ouvre la nuit, dès 18h30. Les "Happy hours" ont lieu jusqu'à 20h. Donc, avec le couvre-feu à 21h, cela fait deux heures d'ouverture. Ce serait un problème pour nous. Par ailleurs, seules les terrasses pourront rouvrir au début, donc l'affluence dépendra de la météo. Si on a un temps mitigé, ce sera compliqué d'ouvrir. Donc, honnêtement, je pense rouvrir mon établissement quand le couvre-feu sera décalé à 23h (dès le 9 juin, ndlr). Cela nous permettrait d’ouvrir complètement, plus longtemps et d’assurer notre service restauration. Mais je suis toujours en réflexion sur cette question."

 

Depuis le mois d’octobre, je n’ai eu absolument aucun revenu et je n’ai pas touché d'aides de l’Etat.

Laurent Besson, gérant de la Taverne Gambrinus

Quelle est votre situation actuelle ?

"Depuis le mois d’octobre, je n’ai eu absolument aucun revenu et je n’ai pas touché d'aides de l’Etat. J’ai pu avoir le chômage partiel pour mes salariés, mais n’étant pas salarié je n’ai pu prétendre à aucune aide. Il y a à peu près 10 000 euros par mois qu’on aurait dû recevoir depuis octobre, et on n’a absolument rien touché. Donc j’espère que ce problème va bientôt se résoudre. C’est une lenteur administrative absolument scandaleuse.

Et en plus de tout ça, on continue à voir des charges qui courent. Mais je ne suis pas le seul dans cette situation. Heureusement que j’ai reçu des soutiens d’amis et de la famille. Je suis dans une situation financière très compliquée. Je suis relancé vingt fois par jour, par exemple par mon opérateur téléphonique qui ne veut pas faire preuve d’un peu de patience et qui menace de couper ma ligne. J’ai beau essayer d’expliquer ma situation, rien à faire. Aujourd’hui, je vis dans la maison de campagne de mes parents. Je ne suis pas à la rue. Mais c’est toujours vexant psychologiquement, à 47 ans, d’aller demander de l’aide à droite à gauche. Jusque-là, j’étais entrepreneur et tout se passait bien. Ça fait un moment que je ne suis pas retourné dans ma taverne. Je suis passé seulement relever le courrier, c’est tout."

Qu’en est-il de la cagnotte que vous avez mis en place ? Vous a-t-elle aidé à garder la tête hors de l’eau ?

"Cette cagnotte a permis de régler une partie des dettes qu’on avait contracté auprès des fournisseurs. Elle a été complètement bouffée aujourd’hui. On a réussi à récupérer 40 000 euros. Cet argent est venu de clients mais aussi du réseau du milieu artistique et de groupes de musique qu’on a pu faire jouer chez nous. En seize ans, on a organisé environ 800 concerts. Des gens de toute la France ont relayé l’information. La cagnotte a permis de se mettre à jour financièrement. Sans elle, on aurait rien de rien."

N’avez-vous pas intérêt à ouvrir quand-même ces deux heures, surtout que la réouverture est d’autant plus importante pour vous pour sortir la tête de l’eau ?

Rouvrir le 19 mai normalement risque d’être à perte pour moi. Et je ne peux pas me le permettre.

"Il faut que je calcule pour voir si c’est intéressant pour moi ou pas. Si je perds le bénéfice du chômage partiel, qui est la seule chose que j’ai, pour ça, ça ne va pas être intéressant. Je vois la réouverture du 19 mai comme un ‘échauffement’ avant de reprendre à 100% de nos capacités. Mais le truc, c’est que rouvrir le 19 mai normalement risque d’être à perte pour moi. Et je ne peux pas me le permettre."

Surtout qu’à partir du 1er juin, les aides seront attribuées au prorata de la reprise d’activité…

"Il faut que je me renseigne davantage sur cette question. Peut-être qu’on ouvrira que les week-ends. Je ne sais vraiment pas comment procéder. Je dois consulter mes équipes et ma comptable et voir avec eux ce qui est vraiment intéressant. Par ailleurs, l’Essonne figure parmi les départements les plus touchés par l’épidémie. Et comme l’Etat peut employer des freins si la situation sanitaire ne va pas, alors ça nous complique encore plus les choses. Il y a un autre point sur lequel je me pose des questions, c’est la reprise du rythme d’avant. Cette période a été tellement dure qu’on a peur d’avoir du mal à se remettre dans le bain psychologiquement. Retrouver l’énergie pour y retourner n’est pas évident."

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