Alors que l’entreprise Bridge Énergies, qui exploite une concession pétrolière à Nonville, souhaite construire de nouveaux puits, le projet est contesté devant la justice par Eau de Paris. Menace pour l’eau potable, risque de pollution… Des associations ont soutenu la régie publique lors de l’audience au tribunal administratif.
"Puits de pétrole à Nonville, c’est non", pouvait-on lire sur des banderoles affichées devant le tribunal administratif de Melun ce jeudi matin. Des associations écologistes s’y sont rassemblées à l’occasion de l’audience sur le fond concernant un recours déposé par la régie Eau de Paris contre un arrêté préfectoral autorisant deux nouveaux forages pétroliers à Nonville. Tandis que Bridge Énergies exploite déjà trois puits sur place, ouverts entre 2012 et 2014, l’entreprise a obtenu de l'État d'en ouvrir deux autres d'une profondeur de 1 500 mètres.
Un projet contesté par Eau de Paris, qui pointe du doigt un risque de pollution pour deux de ses captages d'eau, à Villeron et Villemer, qui alimentent 180 000 Parisiens et Seine-et-Marnais en eau potable. "Le pétrole de Nonville qui menace l’eau potable, c’est non !", dénonce sur X Dan Lert, président d’Eau de Paris et adjoint à la mairie de Paris en charge de la Transition écologique, présent lors de la manifestation.
🛢️🚰 Le pétrole de Nonville qui menace l’eau potable, c’est non !
— Dan Lert (@danlert) January 9, 2025
Aujourd’hui a lieu l’audience au tribunal administratif pour faire annuler les autorisations de forage pétrolier, suite au recours d’@eaudeparis.
Merci aux assos et aux militant·e·s pour leur soutien ! pic.twitter.com/R9zRlC8E33
Six associations, dont France Nature Environnement (FNE) et le Réseau Action Climat, ainsi que plusieurs communes, dont Paris et Nonville, ont déposé des interventions volontaires au soutien du recours.
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"Des risques très concrets"
"Les interventions volontaires, ce sont des textes complémentaires pour soutenir la démarche, avec des interventions des avocats des associations lors de l’audience", résume Louis-Marie Barnier, administrateur à FNE Seine-et-Marne. Il indique que le tribunal a notamment demandé à Bridge Énergies de "préciser son étude d’impact sur les espèces protégées".
"Ce projet présente des risques très concrets pour l’eau, qui est un bien public, et pour la rivière du Lunain, zone Natura 2000, et la nappe phréatique du Champigny. Il y a aussi les odeurs. Une pollution aux hydrocarbures, c’est quasi définitif pour une nappe phréatique. Ce n’est pas juste un incident. Le raffinage n’est pas local, des camions sont envoyés au Havre. Et tout ça est en contradiction avec les engagements de la France à sortir des énergies fossiles, et lutter contre le réchauffement climatique", liste Louis-Marie Barnier.
S’engager à sortir le pays des énergies fossiles… Et continuer à étendre les activités de forage pétrolier ? Le tout à proximité de sources d’eau potable de Paris ❓❗️
— Réseau Action Climat (@RACFrance) January 9, 2025
C’est le scandale en cours à Nonville, pour lequel on se rend ce matin devant le tribunal de Melun. (1/8) pic.twitter.com/lH0oTXAuxf
Contacté, Jean-Claude Belliot, le maire de Nonville, dénonce lui aussi des "risques réels" pour sa commune : "Ce projet n’est pas adapté à une zone urbaine. Lors de travaux de maintenance réalisés en octobre et novembre sur l’exploitation, on a pu constater que les camions et engins ne respectaient pas le Code de la route. Voies inadaptées, feux de chantier… Le cadre de sécurité n’est manifestement pas une priorité pour eux, ça nous inquiète."
"Le droit est très clair"
Bridge Énergies, qui est titulaire d'une concession d'exploitation du gisement courant jusqu'en 2034, produit quotidiennement 10 m³ de pétrole brut. Alors que la production de pétrole sur le territoire national représente moins de 1 % de la consommation française, l’entreprise rassemble trois emplois directs et 25 indirects.
Charlotte Michelet, l’avocate de Bridge Énergies, refuse de s’exprimer sur le fond du dossier, mais réfute l’existence d’une "zone grise", alors qu’une loi de 2017 prévoit l’interdiction progressive de l'exploitation d'hydrocarbures en France d'ici à 2040. "Le droit est très clair, il dit qu’au 1er janvier on arrête tout. Mais d’ici là, on peut continuer à exploiter dans les conditions qui sont fixées par la réglementation. C’est aussi simple que ça", indique-t-elle à France 3 Paris Île-de-France.
La décision du tribunal est attendue fin janvier.
Avec Farid Benbekaï.