Deux morts dans une nouvelle fusillade mortelle à Sevran, l'hypothèse d'une guerre de territoire liée au trafic de drogue ?

Moins de 48 heures après une fusillade qui a fait un mort et plusieurs blessés à Sevran en Seine-Saint-Denis, une nouvelle fusillade fait deux morts dans la même ville. Les autorités attribuent ces faits au trafic de drogue.

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Les deux hommes ont été tués vers 18 h 00, allée des Lilas, dans le quartier Montceleux-Pont Blanc, à moins de 2 km du lieu de la fusillade mortelle de vendredi soir. Ils étaient âgés de 35 et 31 ans, selon le préfet de police Laurent Nuñez. Ils étaient connus pour violences et trafic de stupéfiants, a indiqué une source policière à l'AFP. "On a de bonnes raisons de penser que les faits de ce soir ne sont pas complètement étrangers au trafic de stupéfiants", a ajouté le préfet lors d'un point presse dans le commissariat de Sevran.

Peu après les faits, deux corps gisaient à terre sous des draps blancs, au pied de la maison de quartier Edmond-Michelet, près d'un parc avec des jeux pour enfants, a constaté une journaliste de l'AFP. Un paravent a été installé pour masquer les corps et les lieux, sécurisés par de la rubalise jaune. Des personnes en larmes se tenaient à proximité.

"J'étais chez moi quand j'ai entendu des tirs, j'ai eu très peur. C'est terrible car je les ai vus grandir, mais quand on choisit cette voie, c'est malheureusement la prison ou la mort", a témoigné une habitante du quartier d'une cinquantaine d'années, qui a demandé l'anonymat. L'une des victimes est père de famille, selon des riverains.

Deux unités de forces mobiles ont été envoyées sur place, a précisé une source policière. Le ou les suspects des homicides ont pris la fuite, selon une autre source policière.

"C’est quasiment du jamais-vu" 

Ce drame à Sevran dimanche soir s'est produit 48 heures après une autre fusillade mortelle dans la même ville. Dans la nuit de vendredi à samedi, un homme de 28 ans a été tué et quatre autres blessés dans la cité des Beaudottes, quartier emblématique de cette ville de 52.000 habitants située à 25 km au nord-est de Paris. Trois autres blessés par balles s'étaient également présentés à l'hôpital plus tard dans la nuit, l'un d'eux repartant avant d'être examiné.

La fusillade s'est produite vers 23 h 45 quand deux personnes sont arrivées sur un parking à bord d'une Peugeot 5008. Le passager, un individu cagoulé selon des témoignages, est sorti du véhicule puis a tiré à plusieurs reprises avant de prendre la fuite, a indiqué une source policière. Sur place, 25 douilles de 7.62, un calibre notamment utilisé pour les armes de type Kalachnikov, avaient été retrouvées. Plusieurs unités de forces mobiles, dont la CRS8, unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, ont été envoyées samedi dans le secteur en renfort.

Concernant les fusillades du 3 et du 5 mai, Eric Mathais, le procureur de la République de Bobigny précisait dans un communiqué diffusé lundi après-midi que concernant la fusillade de dimanche soir, "l'hypothèse d'un règlement de compte en lien avec le narcotrafic est privilégiée. En revanche, aucun lien ne peut être objectivé à ce stade avec la fusillade mortelle du 3 mai à Sevran", vendredi soir.

Pour Reda Belhaj, porte-parole Île-de-France du syndicat de police Un1té (ex-Unité SGP police), la répétition de ces deux fusillades impliquant des habitants de Sevran, son mode opératoire, "c’est quasiment du jamais-vu, parce que tirer en rafale ( .. ) Jusqu’à preuve du contraire, ça s'est jamais vu".

En ce qui concerne le mobile, il faut attendre des conclusions de l'enquête pour savoir si ces fusillades sont liées à un trafic de drogue, rappelle-t-il. À ce stade, "il faut être extrêmement prudent" sur le lien entre ces deux affaires, a insisté le préfet Nuñez, rappelant qu'un autre homicide a aussi eu lieu à Aulnay-sous-Bois, la commune voisine, quelques jours plus tôt. "Il y a un gros point de stup sur Aulnay-sous-Bois qui est géré par une bande de Sevran. Théoriquement parlant, deux bandes : une bande d'Aulnay et une bande de Sevran se disputent ce gros point de stup qui est très lucratif. Est-ce que c'est lié à ça ? Je ne sais pas, mais ça se pourrait...", explique le porte-parole Île-de-France du syndicat de police Un1té.

Les suites de l'opération "place nette" à Sevran du 25 mars ?

Le 25 mars, Sevran après Marseille, avait fait l'objet d'une opération antidrogue "place nette XXL". Avec l'objectif de porter un coup d'arrêt aux trafics. Dans cette ville, le point de deal de la cité Rougemont avait été "éradiqué", avait indiqué samedi la préfecture de police. "Place nette", ou d'autres opérations antidrogue, "ce sont des opérations qui dérangent. Et seconde chose, quand vous délogez une équipe d'un point de stup, une équipe de la même bande ou une équipe d'une autre bande essaie de récupérer le point. C'est vrai que c'est compliqué", reconnaît Reda Belhaj.

Concernant l'opération "Place nette", "évidemment, on a conscience que quand on fait ça, on déstabilise le trafic, on crée des convoitises et parfois, il y a des affrontements (...) pour récupérer des territoires", a ajouté dimanche Laurent Nuñez. "Mais on va quand même continuer", a-t-il ajouté. "Il y a encore beaucoup de batailles à gagner", mais la lutte contre le trafic de stupéfiants est une "guerre qui est loin d'être perdue", a-t-il encore dit.

Un "déchaînement inouï" de violence

Une enquête a été ouverte pour homicide volontaire en bande organisée et tentatives d'homicides volontaires en bande organisée, a indiqué le parquet de Bobigny à l'AFP.

Elle a été confiée à la brigade criminelle de la police judiciaire parisienne, tout comme l'enquête relative à la seconde fusillade. Les auteurs de la fusillade dans laquelle deux hommes ont été tués dimanche à Sevran en Seine-Saint-Denis sont toujours recherchés selon une source policière.

Dans un communiqué publié samedi, le maire DVG de la ville, Stéphane Blanchet, a dénoncé un "déchaînement inouï" de violence qu'il attribue à "l'argent sale de l'économie de la drogue", une "économie de mort qui pourrit nos villes". Le maire demande une action et un engagement "déterminés de l’Etat, à long terme, dans nos villes, avec des moyens financiers et humains à la hauteur de l'enjeu".

 "Il faut renforcer en urgence les effectifs sur l'Île-de-France et notamment sur la Seine-Saint-Denis", insiste le porte-parole Île-de-France du syndicat de police Un1té. Reda Belhaj, au passage, rappelle l'intérêt "dissuasif" que représentait, selon lui, la police de proximité (instauré en 1998 et supprimé en 2003) "Cette proximité avec les gens, c'était essentiel. Parce qu'on avait des renseignements. On arrivait à les obtenir parce que les gens nous faisaient confiance".

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