Japan Expo à Paris-Nord : 3 questions à une auteure de manga sur le handicap

La Japan Expo à Paris-Nord Villepinte fête ses 20 ans. Parmi les invités, Rie Aruga, une mangaka auteure d'une romance particulière : lui est en fauteuil roulant. Le handicap est abordé frontalement sans fard. A découvrir pour mieux comprendre le quotidien de ceux qui vivent avec un handicap.
 

Au parc des expositions de Paris-Nord-Villepinte (93), la mangaka Rie ARUGA présente le neuvième tome de sa série Perfect World, lors des 20 ans du festival Japan Expo, du 3 au 5 juillet 2019. L’auteure japonaise donne rendez-vous au public pour une conférence publique, une masterclass et des séances de dédicaces. Depuis son lancement en 2014, Perfect World, ce shôjo (genre de manga destiné à priori aux jeunes femmes), a remporté plusieurs prix au Japon et en France.

En abordant sans tabou le thème du handicap, elle a conquis de nombreux lecteurs, notamment en France où son manga rencontre un succès ! Cette série se démarque par la justesse de son propos. Avec les huit premiers tomes, la série compte près de 85 000 exemplaires vendus. Elle a été auréolée par de nombreux prix, dont le “Animeland Grand Prix du meilleur shôjo 2016”, le “Meilleur Shôjo 2016” lors du tournoi Manga-news. Et surtout en mai dernier, le "prix du meilleur shôjo 2019" lors des Kodansha Awards.Nous lui avons posé 3 questions :

  • Le thème du handicap est très peu traité dans les mangas… Pourquoi avez-vous choisi de vous emparer de ce sujet ?
Pour être honnête, c’est une demande de la part de mon responsable éditorial de la revue Kiss, qui est destinée aux femmes plutôt adultes et qui est habituée des sujets de société. Mon éditeur m’a proposé de dessiner une histoire d’amour autour de cette thématique.
  • Tout est construit comme une romance classique d’amour après le lycée. Sauf que vous choisissez de donner tous les détails de la vie d’une personne en situation d’handicap sur un fauteuil : vous parlez de fécalome, de douleurs "fantômes", d'insuffisance rénale mais aussi des doutes du conjoint, de la famille … Pourquoi ?

Dans le « shôjo » manga, l’aspect romantique est très récurrent. Et au début, même si j’avais intégré la thématique du handicap, la première version du projet était moins directe, allant moins en profondeur. Quand nous avons montré cette première version au rédacteur en chef, il nous a largement suggéré d’en changer la tonalité, en nous soufflant ce qui devait être la première phrase de la série. Cela m’a fait prendre conscience que je pouvais intégrer bien plus d’aspects réalistes dans l’histoire. Car même si j’avais déjà fait de nombreuses recherches sur le sujet, je n’étais pas sûre de ce qu’il fallait montrer. Suite à ça, j’ai vraiment compris que j’avais envie de mettre en scène des choses issues des témoignages que j’avais eus, et qu’on pouvait le faire de manière très frontale. Même si c’était surprenant pour un « shôjo » manga et que ce n’était pas habituel.

Quand j’allais à la rencontre de personnes concernées par le handicap, je sentais bien qu’elles avaient envie que je montre certaines choses qu’elles me racontaient.

Et petit à petit, cette série m’a permis de le faire.

  • Alors que les personnages sont très ancrés dans la société japonaise, votre série rencontre un grand succès aussi en France. Cela vous surprend ?
Oh là là, mais pour moi, c’est très étrange ! En réalité, c’est plutôt à moi de vous demander pourquoi les lecteurs francophones accueillent aussi bien mon manga !
Si je prends un exemple, les parents de Tsugumi, l’héroïne, s’opposent complètement à ce qu’elle se mette en couple avec Ayukawa. Bien sûr, au Japon, il y a des familles qui n’ont heureusement aucun problème avec des couples entre personnages handicapées et valides. Mais ce n’est pas toujours le cas. A un moment, le père de l’héroïne lui-dit :

Tu as l’intention de devenir Florence Nightingale ou quoi ?

(L'infirmière Florence Nightingale a donné son nom à un syndrome, symbole de la relation amoureuse entre une soignante et un patient.) 
Ça typiquement, c’est directement issu d’un témoignage, presque tel quel. Ce genre de pensée existe encore.
En lisant mon manga, on peut se dire que c’est le genre de jugement de valeur très archaïque… Et ceux qui pensent ça sont ceux qui sont probablement le plus ouvert et en avance.
D’un autre côté, cela a aussi permis à certaines personnes de comprendre le point de vue de certains parents. Il semble que ça sème un peu le doute chez les lecteurs et lectrices. Mais tout ça, ça se déroule au Japon… Je suis vraiment très curieuse de savoir comment les gens perçoivent mon manga ici, et à quel point votre pays est aménagé pour les personnes handicapés ou pas. Et quel genre de relations ont les personnes handicapées avec les « autres » ? Est-ce fluide ? Ou pas ?

Bon à savoir
Le festival est intégralement accessible aux personnes à mobilité réduite.
Selon les organisateurs, il existe une file prioritaire dans le hall 7 dédiée aux personnes à mobilité réduite et leurs accompagnateurs, aux familles avec de très jeunes enfants, aux femmes enceintes et aux personnes ne pouvant pas garder la station debout. Un justificatif ou un certificat médical pourra vous être demandé le cas échéant.
Sur présentation de la carte d’invalidité portant l’une des mentions suivantes : "besoin d’accompagnement" ou "cécité", l’entrée au festival est gratuite pour les accompagnateursdes personnes en situation de handicap (un seul accompagnateur par personne). 
Enfin notez que les personnes à mobilité réduite ou étant dans l’incapacité de rester debout dans les files d’attente peuvent s’adresser directement aux staffs (en gilet rouge) présents au niveau du Point dédicaces afin de passer en priorité.

 
Aux éditions Akata, Rie Aruga est également l'auteur d'un autre shôjo remarqué : Par-delà les étoiles. Suite à son succès d'édition, la série Perfect World a été adaptée en film live. Le tome 9 vient de sortir en librairie.
A découvrir la Bande annonce Perfect World :
Perfect World, résumé de l'histoire
Tsugumi, à 26 ans, travaille au sein d’une entreprise de design d’intérieur. Un soir, lors d’une soirée de travail, quelle est sa surprise de retrouver autour de la table Ayukawa, son amour de lycée ! Mais depuis la fin de leurs études, le jeune homme, impliqué dans un accident, est en fauteuil roulant. Certaine que jamais elle n’aura la force (et l’envie) de fréquenter un homme «au corps amoindri», la jeune femme va pourtant sentir quelque chose bouger en elle…
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