La cour d'assises de Seine-Saint-Denis a condamné ce vendredi l'influenceur Keneff Leauva à 19 ans de réclusion pour avoir poignardé à mort un autre internaute après une dispute qui a débuté en ligne. Un homicide diffusé en direct sur internet.

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Après à peine une heure et demie de délibération, la cour d'assises a retenu une peine de 19 ans d'emprisonnement, en-deçà des 25 années de réclusion criminelle requises par le parquet. Le jury a considéré que Keneff Leauva n'a pas prémédité son geste, écartant donc le chef d'assassinat.

"Trash influenceur" sur Bigo Live

Les faits remontent au mois d'avril 2021. Cinq cents personnes sont connectées sur une "chat room" de l'application de vidéos en direct, Bigo Live. Keneff Leauva, 38 ans, et Mamadi T. pseudonyme de "Moussa VR6", s'écharpent en ligne. L'altercation est suivie par 500 internautes. Keneff Leauva est une figure de la petite communauté du live-streaming. Sorte de "trash influenceur", cet ex-chauffeur de VTC y a gagné ses galons : insultes, menaces de mort et propension à la bagarre qui amènent buzz et abonnés à cet accro des réseaux.

Un temps amis dans la vraie vie, Moussa et Keneff Leauva sont brouillés depuis quelque temps pour une histoire de coeur, qui a déjà valu à Moussa de frapper Leauva. Alimenté en ligne, le feuilleton de leur discorde fait bruisser la communauté Bigo.

La suite se passe dans la vraie vie. La victime, Mamadi T., alias "Moussa VR6" se présente vers 6 heures du matin au domicile de Keneff Leauva à Pantin en Seine-Saint-Denis pour s'expliquer. Une bagarre éclate entre les deux hommes. Moussa VR6 est poignardé à mort. Et cela en direct sur le réseau social.

La réputation de "clasheur" en jeu

Ce procès a mis en lumière les dérives d'un homme et d'un réseau social qui brouille les frontières entre le virtuel et le réel, où règne buzz et violence.

De toute la France, de tous milieux et tous âges, une kyrielle d'utilisateurs a plongé la cour dans l'atmosphère toxique du microcosme du live-streaming. Après des débuts relativement insouciants, "petit à petit, il y a eu des embrouilles, des clashs, des affichages qui sont montés d'escalade en escalade", a relaté une utilisatrice. Dans les "rooms à clash" très populaires, il est de bon ton de s'invectiver pour faire le buzz. "On intrigue sans arrêt, on médit sur les 'amis' d'hier, on se monte les uns contre les autres", a-t-il été expliqué.

"Il a compris un truc, c'est que sur l'application, si je me filme en train de chanter, de jardiner, je vais avoir dix personnes qui vont voir mon live. Mais si je suis dans les bagarres, les insultes, les déplacements pour aller taper des gens, je sais que je vais avoir toute une communauté", a résumé un autre internaute.

Cette réputation en ligne, Keneff Leauva n'hésite pas à la défendre hors ligne en traversant la France pour se castagner avec un contradicteur. Cet engrenage de la violence lui a déjà coûté une phalange arrachée dans une bagarre et un séjour de quelques mois en prison.

Alors quand Mamadi T. se présente à son domicile au petit matin en compagnie d'une autre internaute, Keneff Leauva est donc persuadé que son adversaire vient pour le frapper et diffuser son humiliation sur Bigo Live. "Après, les gens en auraient ri : 'c'est la deuxième fois que Keneff le bagarreur se mange une branlée sur les réseaux !'", a-t-il expliqué dans le box des accusés. Et de poursuivre : "Je pensais pas que c'étaient des coups fatals, je pensais que c'étaient des poinçons. J'me disais 'j'ai mis des piques, il va se faire recoudre'", s'est-il justifié à l'audience.

Avec AFP

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