Fermeture des urgences pédiatriques à Saint-Denis : "Les agents craquent, on est à bout"

Épuisement, crise sanitaire… En raison d’une pénurie de personnel, les urgences pédiatriques de l’hôpital Delafontaine réorientent la majorité des patients vers d’autres hôpitaux, se limitant aux cas les plus prioritaires.

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C’est un nouvel exemple de la situation de tension qui touche les hôpitaux franciliens. A Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), les urgences pédiatriques de l’hôpital Delafontaine sont fermées depuis le lundi 3 janvier. Covid, fatigue, sous-effectifs… Lundi, seulement 25 enfants ont été admis, alors que le service compte habituellement 110 à 120 passages par jour.

Seules les urgences vitales et les urgences thérapeutiques ou diagnostiques sont accueillies. Le service est en situation de délestage : les patients les moins prioritaires sont réorientés vers d’autres hôpitaux.

"Les organismes et les psychismes craquent"

"Nous n’avons malheureusement plus la possibilité de remplir correctement nos missions habituelles, en raison de défections multiples sur l’effectif paramédical, déplore le Dr Simon Escoda, le chef des urgences pédiatriques de l'hôpital Delafontaine. Nous subissons des vagues d’arrêts maladie, en chaîne, qui ne nous permettent pas d’accueillir dans de bonnes conditions de sécurité les usagers de la santé."

"On est dans une situation critique, pour plein de raisons, dénonce le médecin. D’un point de vue national, l’hôpital public est en grande difficulté. On parle depuis des années de la situation précaire des agents hospitaliers, du paramédical et du médical. Et depuis deux ans, les hôpitaux français, la Seine-Saint-Denis et l’hôpital Delafontaine en particulier se sont portés au front en ce qui concerne les différentes vagues Covid. Les trois derniers mois en pédiatrie ont été extrêmement difficiles. Nous avons subi une vague, inédite dans sa durée, de circulation de plusieurs virus concomitants."

"On partait déjà avec un sous-effectif, et l’ensemble des équipes paramédicales se sont portées au chevet de notre structure, et ont enchaîné les heures supplémentaires, avec des compteurs d’heures qui dépassent largement le raisonnable", poursuit le Dr Simon Escoda.

"Je n’ai qu’une crainte : que la situation sur Saint-Denis ne soit que le début d’un domino"

"Le résultat, c’est que les organismes et les psychismes craquent, alerte le pédiatre. Alors oui, il y a un mouvement de grève - complètement légitime - en rapport avec les effectifs. Un mouvement que moi, en tant que chef de service, j’appuyais largement, et qui a été entendu par la direction, avec un dialogue amorcé. Mais là, les agents craquent, on est à bout."

"Nous prenons en charge les enfants en grande détresse, pour le reste, nous ne sommes plus en mesure de faire notre travail, prévient-t-il. Il y a un sentiment d’épuisement, et de colère vis-à-vis de l’absence de prise de conscience sur l’état sanitaire des hospitaliers en France. Je n’ai qu’une crainte : que la situation sur Saint-Denis ne soit que le début d’un domino."

"Il y a eu des arrêts Covid, explique de son côté Muriel Signor, une représentante du syndicat Sud Santé. Après, il y a un épuisement psychique extrêmement important. Et il y avait déjà des arrêts depuis pas mal de temps."

"Il y a un manque de moyens pour créer des postes et faire le travail correctement"

Muriel Signor souligne également que la situation ne se limite pas à Saint-Denis : "On sait aussi que c’est la même chose dans d’autres urgences pédiatriques. Il y a eu plusieurs délestages à l’hôpital Robert-Debré, à Paris. C’est une situation qui ne touche pas uniquement l’hôpital Delafontaine."

"C’est au niveau national, il y a un manque de moyens pour créer des postes et faire le travail correctement, poursuit Muriel Signor. C’est inquiétant, c’est aussi difficile pour les urgences adultes. Il n’y a pas assez de postes." Aux urgences pédiatriques de l’hôpital Delafontaine, le délestage devrait durer encore au moins 48 heures, jusqu’à vendredi minimum.

En novembre dernier, les urgences pédiatriques de Longjumeau (Essonne) avaient également fait face à une nombre insuffisant de personnels, en raison d’une forte hausse d’absentéisme des infirmières et des infirmiers puériculteurs. Le service avait dû fermer en pleine épidémie de bronchiolite. Fermeture de lits, surcharge de travail, pressions sur les soignants, épuisement des personnels dans le contexte de la pandémie de Covid-19… D’autres hôpitaux franciliens étaient déjà concernés par la problématique.

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