Cette œuvre représente le portrait de l'une des victimes de ce massacre de manifestants algériens en octobre 1961. L'œuvre a été dégradée "de manière manifestement raciste" a dénoncé l'artiste.
Il y a deux mois, à l'occasion des 60 ans du massacre de manifestants algériens sous l'autorité du préfet de police de Paris de l'époque Maurice Papon, C215 avait peint au pochoir sur un mur de garage d'Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) un portrait d'une des victimes de cette répression, Ahmad Khalfi, avec l'inscription "Jeté dans la Seine le 17/10/1961".
Comme le montre une photo publiée samedi par l'artiste sur les réseaux sociaux, cette inscription a été effacée au burin et le portrait a été aspergé de taches rouges couleur sang. Un pénis a également été gravé sur l'œuvre.
"C'est très violent pour tous les Maghrébins et les gens qui peuvent s'identifier vraiment à lui (Ahmad Khlafi, NDLR). Ce n'est pas un personnage politique, c'est juste une victime d'un massacre qui a été commis dans des circonstances de racisme ordinaire. Et là, on perpétue tout ça", a regretté l'artiste, Christian Guémy de son vrai nom.
"C'est très triste. C'est une offense jetée au visage non seulement de la victime mais également des gens du présent", a-t-il ajouté.
"Je ne sais pas quand ça a été fait"
"Je m'en suis aperçu aujourd'hui mais je ne sais pas quand ça a été fait. C'est dans une petite rue, il n'y a pas beaucoup de passage", a-t-il expliqué. "J'ai essayé de rendre son portrait le plus vivant et le plus humain possible. Il est peint à hauteur d'homme, dans un quartier où il y a beaucoup de diversité en plus".
"A une époque où on parle de diversifier la représentation mémorielle dans l'espace public, on n'est pas sorti de l'auberge...", a-t-il déploré.
"Je vais laisser ce portrait comme cela pour l'instant. J'ai reçu un appel du maire d'Ivry et on le refera en plus grand dans une rue qui va être créée en bord de Seine cette année, la rue du 17 octobre 1961. Ce sera la meilleure réponse qui soit et ce sera un endroit où l'on pourra se recueillir dignement", a-t-il poursuivi auprès de France 3 Paris Ile-de-France.
Plusieurs dégradations ces derniers mois
En novembre, un autre portrait au pochoir de C215, celui du policier Ahmed Merabet, froidement assassiné par l'un des frères Kouachi en janvier 2015, a été dégradé à Paris. Le préfet de police avait porté plainte après que l'insulte raciste "bicot" ait été retrouvé sur ce portrait.
"Je fais des œuvres qui sont porteuses de réflexions citoyennes. C'est toujours le même type de dégradations : antisémitisme, déni du droit à l'avortement, racisme. C'est un peu la même mouvance", indique C215.
Pour la première fois cette année, la présidence française a reconnu que "plusieurs dizaines" de manifestants algériens "furent tués, leurs corps jetés dans la Seine" le 17 octobre 1961. Le bilan officiel ne dénombrait jusqu'à présent que trois victimes.
"Nous condamnons la dégradation dont a été l'objet C215, dont le travail est connu et reconnu en région parisienne et par les Ivryens", a réagi la mairie d'Ivry.
