Bois-d'Arcy : le Contrôleur des prisons recommande de "suspendre les incarcérations"

"Surpopulation", "désorganisation"... La recommandation du Contrôleur général des lieux de privations de liberté (CGLPL) pointe du doigt des "conditions de détention indignes" au centre pénitentiaire de Bois-d'Arcy (Yvelines).

Le CGLPL, l’autorité indépendante chargée de contrôler les conditions de prise en charge des personnes privées de liberté afin de s'assurer du respect de leurs droits fondamentaux, émet une recommandation rare : "suspendre les incarcérations" à Bois-d'Arcy. Dans ses recommandations, publiées ce vendredi au Journal officiel, le Contrôleur des prisons explique avoir constaté mi-septembre un taux d'occupation de 165% et une "désorganisation générale de la détention".

Des conditions de détention qui ne permettaient "de garantir ni la sécurité des personnes écrouées, ni celle des personnes qui travaillent au centre pénitentiaire", indique l’autorité. Elle estime ainsi "nécessaire" de "suspendre les incarcérations jusqu'à ce qu'une inspection générale de la justice confirme que la sécurité des détenus est assurée (...) et que leurs conditions de travail permettent aux surveillants d'assurer l'ensemble de leurs missions".

Au moment du contrôle, la prison comptait 867 détenus pour 530 places théoriques. "466 détenus sont hébergés à deux dans des cellules individuelles, 201 détenus sont hébergés à trois, toujours en cellule individuelle", détaille le CGLPL. Selon l’autorité, "la population détenue est accueillie dans des conditions dégradées et inadaptées".

"Les détenus ne disposent pas d'un espace suffisant pour vivre et se mouvoir en cellule.(...) L'espace toilettes n'est séparé du reste de la cellule que par des cloisons incomplètes", décrit le CGPLL. Le Contrôleur des prisons pointe par ailleurs le "désœuvrement" des détenus qui, "à part deux heures de promenade par jour", passent pour la plupart "l'essentiel de la journée en cellule". 

Une situation "préoccupante", reconnaît Eric Dupond-Moretti

De son côté, le ministère de la Justice a adressé au Contrôleur des prisons une série d'observations en réponse à ces recommandations, dans un document daté du 30 novembre également publié au Journal officiel. Eric Dupond-Moretti évoque une situation "préoccupante".

Le ministre de la Justice assure que "des courriers sont régulièrement rédigés par le directeur interrégional (des services pénitentiaires) à l'attention de la cour d'appel de Paris et de celle de Versailles" pour "souligner" la surpopulation carcérale à Bois-d'Arcy. "Une nouvelle lettre sera prochainement adressée à ce sujet", affirme-t-il.

Le CGPLL recommande par ailleurs de garantir aux détenus "le respect de leur santé et de leur intégrité physique", notamment face au risque d'incendie, ainsi que l'accès dans leur cellule à "une plaque chauffante, un réfrigérateur et à de l'eau chaude". Des photos publiées par l’autorité sur Twitter montrent des dispositifs de "chauffes" installés en cellule, bricolés avec des cannettes et des mouchoirs imbibés d'huile.

Une opération de rénovation électrique "actuellement en phase de travaux" et devant s'achever en 2024 "permettra de répondre à l'ensemble de ces préconisations", affirme de son côté Eric Dupond-Moretti.

"Il faut tout mettre en œuvre pour faire respecter le droit"

Le Contrôleur des prisons recommande également de garantir aux détenus une douche quotidienne. Dans ses observations, le ministre explique que les personnes incarcérées ont accès aux douches "a minima trois fois par semaine", conformément au code pénitentiaire, et que "celles qui participent à des séances sportives ont systématiquement accès aux douches du gymnase après la séance".

"Pour nous, la question n’est pas tant de savoir si suspendre les incarcérations à Bois-d’Arcy est faisable ou non. Il est surtout question de faire respecter le droit, il faut tout mettre en œuvre pour que ça soit le cas. On ne peut pas incarcérer des personnes dans des conditions dégradantes", souligne Pauline Petitot, chargée d’enquête à l’Observatoire international des prisons (OIP).

"Bois-d’Arcy est connu pour son système électrique particulièrement mauvais, qui s’ajoute à la surpopulation, l’insalubrité et la vétusté qu’on retrouve dans d’autres établissements franciliens. On connaît actuellement en France le taux d’incarcération le plus élevé depuis longtemps", déplore-t-elle. Pauline Petitot pointe du doigt "une carence d’activité", "une prise en charge défaillante", et "une situation d’insalubrité qui maintient les détenus dans des conditions particulièrement dégradantes".

Avec AFP.

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