Saint-Nazaire : la Brittany Ferries renonce à son navire fonctionnant au gaz naturel

La Brittany Ferries renonce à commander aux chantiers STX France l'un des plus grands ferries "écologiques" du monde, aux chantiers STX, les réactions oscillent entre attentisme et colère contre la politique environnementale et industrielle du gouvernement

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Les conditions nécessaires à la réalisation du plan GNL porté par Brittany Ferries ne sont pas réunies aujourd'hui, j'ai donc décidé de suspendre le volet GNL de notre plan de transition écologique",

affirme le président de la compagnie Jean-Marc Roué, disant avoir pris cette décision avec "beaucoup de regrets et de lassitude".

Début 2014, la compagnie avait annoncé un plan ambitieux consistant en la construction d'un ferry au GNL, l'installation de filtres à fumée (scrubbers) retenant les émissions d'oxyde de soufre sur trois navires et la conversion de trois autres plus récents au GNL, pour un coût de 400 millions d'euros.
Le ferry, désigné sous le nom de code Pegasis, devait être construit aux chantiers STX de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) pour un coût de 270 millions d'euros. Long de 210 m, il devait être un des trois plus grands navires fonctionnant au GNL au monde.

L'ensemble de ces investissements devait permettre à la compagnie de se mettre en conformité avec les normes sur les émissions des gaz d'échappement de la convention Marpol, qui évoluent à partir du 1er janvier 2015. A partir de cette date, les émissions d'oxyde de soufre devront être réduites de 99% et celles d'oxyde d'azote de 80%.

"Il nous est impossible actuellement de nous engager sur un plan de transition écologique avec un niveau d'investissement très élevé auquel viennent s'ajouter, faute d'exemption temporaire, des dizaines de millions d'euros par an de surcoûts en carburant liés à l'utilisation du gasoil en substitution du fuel, pendant la période nécessaire à la conversion des navires", a expliqué Jean-Marc Roué, regrettant une "double peine" pour la compagnie.


Direction de STX et syndicats réagissent

STX France dit regretter la décision de la Brittany. STX "étudie les conséquences de cette décision en matière de perte de chiffre d'affaire et surtout de charge de travail", tout en estimant que "la bonne situation du carnet de commande ainsi qu'une activité commerciale forte devraient vraisemblablement permettre de limiter fortement les conséquences de cette décision".

Du côté des syndicats on est beaucoup moins conciliants. "C'est une situation tout à fait inacceptable",pour Jean-Marc Perez, délégué syndical FO aux chantiers. "Nous interpellons à nouveau le gouvernement qui est actionnaire du chantier pour qu'il prenne ses responsabilités afin de faire en sorte que cette commande puisse trouver un financement".

La CFDT espère qu'il ne s'agit que d'un report en soulignant que ce sont des emplois qui sont en jeu, "tant pour STX, qui devait construire là le démonstrateur de son savoir-faire dans le domaine de la propulsion au gaz, que pour Brittany Ferries qui ne pourra pas compter sur ce navire neuf". Et de souligner l'absence de politique industrielle et environnementale du gouvernement :

la transition énergétique et le recours à des énergies plus "propres" ne devraient pas être de simples discours. Il faut aussi, derrière, des actes forts et ce projet en est un !"


Une réglementation acceptée, mais difficile à mettre en œuvre

Pour répondre à la nouvelle réglementation, les compagnies peuvent soit équiper leurs navires de scrubbers, soit changer de mode de propulsion, soit abandonner le fioul lourd au profit du gazole, moins polluant mais actuellement de 50 à 80% plus cher, selon Armateurs de France.
"Les compagnies maritimes ont de sérieuses difficultés" pour faire face à la nouvelle réglementation, assure Éric Banel, délégué général de l'organisation professionnelle, soulignant le "contexte particulièrement dégradé" pour le secteur. "Il est trop tard pour agir sur la réglementation soufre, elle entrera en vigueur et sera appliquée par les entreprises, après c'est une politique plus globale que nous réclamons en faveur de la compétitivité des entreprises maritimes travaillant sous pavillon français", a-t-il ajouté.

Seul point positif, la Brittany Ferries installera tout de même des filtres à fumée sur les trois navires initialement prévus pour être convertis au GNL, pour un investissement compris entre 70 et 80 millions d'euros.
Les chantiers de Saint-Nazaire avaient déjà eux-mêmes suspendu la commande en septembre, la compagnie maritime n'ayant pas bouclé son plan de financement.

Le reportage de la rédaction



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