Pierre Hinard est un ancien responsable qualité de Castel Viandes, l'entreprise d'abattage et de découpe de viande basée à Châteaubriant, au nord de la Loire-Atlantique. Dans son livre "Omerta sur la viande", il dénonce les dérives dont il a été témoin de 2006 à 2008.
"J'étais vraiment témoin de dérives vraiment trop récurrentes, avec des remballes et du recyclage de viande avariée que je mettais en destruction et qui réapparaissait une journée, deux jours après" , explique-t-il à nos collègues de France 2.##fr3r_https_disabled##Des pièces de boeuf plusieurs fois congelées et décongelées, de la viande périmée revendue, des asticots dans les steaks, Pierre
Hinard dit avoir été témoin entre 2006 et 2008 de pratiques totalement insalubres.
Il raconte des ouvrières "livides", qui doivent trancher une "viande verdâtre", à l'odeur "écoeurante", vouée normalement à la poubelle.
A l'époque, la société fournit notamment la grande distribution (Auchan, Système U), les traiteurs industriels (Lustucru, William Saurin) et la restauration rapide (Flunch, McDonald's).
L'auteur, licencié en 2008, a déjà témoigné de ces pratiques en 2013, ce qui a conduit à l'ouverture d'une information judiciaire et à la mise en examen du chef d'entreprise et de deux cadres en juin et juillet dernier, pour "tromperies" sur la marchandise et pour "mise sur le marché de produits d'origine animale préjudiciables à la santé", pour des faits commis de 2010 à 2013.
Le dirigeant est également soupçonné d'"obstacle ou entrave à l'exercice des fonctions des agents habilités".
Ces premières mises en cause ont aussi conduit la Direction générale de l'alimentation (DGAL), qui dépend du ministrère de l'Agriculture, à procéder à six mois de "contrôles renforcés" entre mars et septembre 2013.
Un rapport "favorable" a été publié après la dernière inspection début octobre. L'agrément sanitaire, obligatoire pour ce type d'entreprise, n'a pas été levé.
Les services vétérinaires du ministère ne sont pas épargnés par Pierre Hinard. "Mon histoire illustre les dérives d'un système dénoncé par la Cour des comptes" qui, en février 2014 pointait l'insuffisance des contrôles et des sanctions menés par la DGAL, rappelle-t-il.
Parmi les clients de Castel, McKey, fournisseur de McDonald's en steaks hachés, a assuré à l'AFP avoir cessé ses approvisionnements depuis mars 2013.
Après avoir suspendu ses achats, Flunch les a repris "depuis un an", après des "analyses négatives" et le maintien de l'agrément sanitaire de l'abattoir, selon Olivier Descamps, son directeur général.
Les deux sociétés sont parties civiles dans le dossier judiciaire, selon le parquet de Nantes.
Selon leurs porte-parole, Système U travaille toujours "sur de petites quantités" avec Castel Viandes, tout comme Auchan qui estime n'avoir "aucun élément qui donne de preuves réelles sur ces allégations".
Pourtant, Pierre Hinard insiste : il veut avec ce livre, publié chez Grasset, mettre fin à des pratiques qu'il a échoué à faire changer quand il était en place.
"Ce système existait avant que j'arrive, j'ai mis toute mon énergie à le changer. Mais la direction repassait systématiquement derrière moi quand je faisais envoyer cette viande à la destruction", se souvient l'ingénieur agronome.
Pour Me Benoit Chabert, avocat de Castel, le livre de Pierre Hinard "est un non-événement". Tout le contenu est "diffamatoire et calomnieux" et sert a faire la "promotion" de l'activité d'élevage de l'auteur. Castel Viandes ne reconnait "aucune infraction" et se "réserve la possibilité" de porter plainte pour diffamation, a-t-il indiqué.