Un producteur de foie gras comparaît jeudi devant le tribunal correctionnel de La Roche-sur-Yon, après avoir été cité pour "sévices graves et actes de cruauté" par L214, l'association de défense des animaux, qui milite contre le gavage.
En novembre 2013, l'association L214 publiait une vidéo dénonçant les conditions de gavage des canards dans des fermes sous contrat avec la société Ernest Soulard, basée dans la commune de L'Oie (Vendée). Une société qui fournit de grandes tables parisiennes.
Le chef multi-étoilé Joël Robuchon avait décidé de suspendre ses approvisionnements chez ce fournisseur après la diffusion de ces images, sur lesquelles on voyait des canards cantonnés dans des cages individuelles, ne pouvant pratiquement pas bouger. D'autres grands chefs dont l'écossais Gordon Ramsay avaient eux aussi de suspendre leur approvisionnement auprès de la société Soulard.
La vidéo tournée par L214
L214 a porté plainte début 2014 pour "sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux" et pour "mauvais traitements envers un animal". L'association poursuit la société Soulard sur citation directe, une procédure sans enquête de police, où le tribunal juge sur les pièces produites par les parties.Pour l'association, ce "premier procès du gavage en France" va permettre "de discuter du fondement, de la légalité ou pas de cette pratique" et des "conséquences qu'elle peut avoir sur les animaux", explique Brigitte Gothière, la porte-parole de L214,
Nous ne sommes pas des barbares
"La société Ernest Soulard est visée car nous avions des éléments suffisants pour engager la procédure. Si la société est condamnée, cela aura évidemment une incidence sur la pratique du gavage, interdite par de nombreux pays", estime l'avocate de l'association, Hélène Thouy, précisant que le délit "d'actes de cruauté" est passible de "30.000 euros d'amende et deux ans d'emprisonnement"."Ce n'est pas le procès du gavage. La question est : est-ce qu'il y a eu maltraitance ou pas ? Nous allons démontrer pas à pas, minute par minute, que ce n'est pas le cas. Nous avons des éléments factuels pour démontrer que la vidéo est un montage (...) et que tout n'a pas été tourné chez nous", met en avant le directeur général d'Ernest Soulard, Roland Tonarelli, citant "des cages très sales sur un plan global", puis "d'un coup une cage très propre sur un plan serré".
La société vendéenne avait porté plainte peu après la diffusion de la vidéo pour "violation de domicile" et pour des dégradations. L'association L214 et deux de ses membres doivent comparaître également jeudi pour ces faits.
"Nous ne sommes pas des barbares (...). La vidéo a fait du mal aux producteurs et créé un climat de suspicion", déplore Roland Tonarelli, "convaincu" que l'entreprise "sortira blanchie de cette affaire".
L'Union européenne, qui a interdit les cages individuelles en 2011, a donné aux producteurs jusqu'au 31 décembre 2015 pour s'équiper de cages collectives pour le gavage.