On les appelait les trains Corail, puis Intercités pour tenter de leur redonner un peu de modernité, puis Trains d'Équilibre du Territoire, puis, arrive ce nouveau rapport qui pourrait bien sonner le glas de nombreuses lignes ferroviaires mettant à mal villes moyennes et territoires
Le rapport Duron, du nom du député du Calvados qui en assurait la rédaction, fait réagir partout en France. Là où les Trains d'Équilibre du Territoire (TET) sont mis à mal par la stagnation de leur fréquentation. Ces TET ont été imaginés il y a quelques années pour financer les déficits d'exploitation par l'État sur le modèle des TER financés par les régions. Les députés ont ainsi validé en 2010 ce mode de rémunération de la SNCF, l'opérateur ferroviaire historique, en charge de leur exploitation. Qualifiant leur décision "d'engagement fort..." Les TET coûteraient entre 300 et 400 millions d'euros chaque année. Et donc normalement compensés par l'État. En théorie, car l'État ne veut plus payer. Ou du moins, par pour n'importe quelle type de desserte.
Dans les Pays de la Loire, la SNCF souhaiterait faire sortir du régime des TET, les lignes Quimper Nantes et Caen Le Mans Tours. En les transformant en TER, et donc à la charge des régions. Le rapport Duron envisage même le transfert par autocar de la ligne Caen Le Mans Tour, arguant du fait que la desserte autoroutière le permettrait avec autant d'efficacité.
Des réactions
Les réactions des politiques n'ont pas tardé. Il y avait bien eu une réaction collective la semaine passée, avant la publication mardi du rapport dénonçant la perspective d'un scénario noir pour les Intercités. Les réactions individuelles arrivent en ordre dispersé. Les parlementaires ont voté des décisions défavorables aux TET, pour certains d'entre-eux il est difficile de rendre compte des effets de la décision dans sa propre circonscription.Pour Jacques Auxiette, président (PS) de la région des Pays de la Loire, le diagnostic est bon, les conclusions mauvaises.
"Je partage évidemment le diagnostic posé par la Commission DURON même si je n’en partage pas les conclusions. Depuis des décennies les TET souffrent d’un sous-investissement chronique de la part de l’Etat et de la SNCF tant dans les infrastructures que dans le matériel roulant. Les TET manquent de lisibilité et à cause d’une trop faible qualité de service ne sont plus adaptés aux nouveaux enjeux ferroviaires et aux nouvelles mobilités des citoyens".
"L’avenir du transport ferroviaire ce n’est pas le remplacement des trains par des cars comme le prévoit la Loi Macron", Jacques Auxiette renouvelle ainsi avec force la demande adressée par les Régions au Gouvernement pour qu’un débat se tienne au Parlement : "il appartient au Parlement de définir, en concertation étroite avec l’ensemble des parties prenantes et notamment les élus locaux, une nouvelle politique d’aménagement ferroviaire de notre territoire qui réponde pleinement aux défis du 21ième siècle et aux besoins de mobilité des habitants.
Il est vital d’anticiper l’avenir des transports ferroviaires, enjeu majeur d’aménagement et de développement durable du
territoire, mais surtout d’activités pour nos industries et d’emplois à un moment où l’on légifère sur la transition énergétique
et où l’on doit agir pour le changement climatique".
Pour Bruno Retailleau (UMP) président du conseil général de Vendée et tête de liste UMP-UDI aux régionales dénonce "Une vision comptable qui risque d’aggraver la fracture territoriale".
"Ce rapport démontre qu’une fois de plus, le PS nage en pleine contradiction : c’est le même Philippe Duron qui, en 2013, prônait la desserte ferroviaire des territoires et l’entretien du réseau existant lorsqu’il présidait la commission Mobilité 21, et qui veut aujourd’hui supprimer une partie des dessertes locales sur les trains Intercités ! Où est la logique ?
De même, nous nous sommes battus pour engager la modernisation de la ligne Nantes-Bordeaux, obtenant l’inscription de ce projet dans le contrat de plan État-Région, et on nous explique aujourd’hui que la ligne TET Quimper-Nantes sera supprimée, ce qui aura des conséquences sur le trafic de la ligne Nantes-Bordeaux. Ce rapport traduit une dérive grave en matière d’aménagement du territoire : celle qui consiste à privilégier la logique de rentabilité sur la logique de proximité. C’est une vision comptable et parisienne des territoires, à laquelle cède une nouvelle fois le Parti socialiste. La gauche a abandonné la ruralité et aggrave la fracture territoriale entre la France des métropoles et la France périphérique, celle des petites communes et des villes moyennes. Pire, elle organise la décroissance sur nos territoires, en particulier dans les Pays de la Loire, avec l’enlisement du projet de Notre-Dame-des-Landes ou les trahisons du gouvernement sur l’A831. Que ce soit en matière ferroviaire, autoroutière ou aéroportuaire, notre région subit un véritable déclassement et ces menaces de fermetures de lignes en Pays de la Loire en sont une nouvelle illustration".
Pour Michel Hunault, conseiller régional (UDI) des Pays de la Loire il faut "Maintenir les trains Intercités, éléments essentiels du désenclavement des territoires ruraux". Et d'affirmer "qu'il faut une modernisation au lieu d’une suppression. À l’image de la seule liaison ferroviaire Quimper-Nantes-Bordeaux, dont la modernisation est prioritaire. La mise en place d’un schéma interrégional du transport ferroviaire, pour une meilleure coopération entre les régions de la façade Atlantique".
Pour Ronan Dantec, sénateur (EELV) de la Loire-Atlantique, "Les lignes et les trains dits "Intercités" sont aujourd’hui vétustes, l’ouest et particulièrement la Bretagne sont mal desservis, le prix du train est élevé et la qualité des services rendus par l’offre ferroviaire s’avère très insuffisante.
Ce rapport se télescope également avec le débat sur les Lignes Nouvelles Ouest Bretagne Pays de la Loire (LNOBPL) qui s’est tenu fin 2014 et début 2015. Alors que Réseau Ferré de France (RFF) doit rendre sa décision courant juin, la fermeture envisagée par le rapport pour la ligne Nantes-Quimper contraste symboliquement avec les milliards d’euros que l’État serait prêt à engager pour gagner quelques minutes entre Paris et Brest ou desservir l'aléatoire aéroport de Notre-Dame-des Landes, priorités contestées par nombre de participants à ce débat."