Des eaux de baignade toujours propres mais pour combien de temps encore ? Le défi des communes du littoral

Campagnes de sensibilisation, interdictions diverses, aménagements, les communes du littoral tentent de maintenir leurs plages et eaux de baignades propres. Un défi pour l’avenir car l’océan ne peut pas tout nettoyer et il n’est pas impossible qu’un jour, on se retrouve face à des interdictions de baignade l'été.

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Fouler pieds nus le sable chaud, déplier sa serviette de plage avec une sensation de douce chaleur sur la peau, se glisser tranquillement dans une petite houle rafraîchissante. Des sensations attendues lorsque la saison estivale arrive.

Mais pour combien de temps encore nos plages resteront ces lieux accueillants que nous aimons à retrouver pendant les vacances ? Tout dépendra de nos capacités à les protéger.

Les 10 commandements de La Baule

Cet été, la communauté d’agglomération de La Baule, Cap-Atlantique, va relancer une campagne de sensibilisation à destination de ses habitants et des touristes. Le 7 juillet, cette opération énoncera les "10 commandements" à suivre pour préserver le littoral.

Pour faire connaître ces préconisations, Cap-Atlantique a choisi d’utiliser l’humour avec un personnage de bande dessinée. Mais en coulisses, la situation suscite quelques inquiétudes. Certes, la qualité des eaux de baignade de ces communes du nord-ouest de la Loire-Atlantique reste satisfaisante, "elle est bonne" nous dit-on, mais on constate au fil des années qu’elle se dégrade et de plus en plus souvent.

C’est pourquoi, dans ses "10 commandements", la campagne de sensibilisation pointera du doigt quelques évidences que beaucoup négligent.

Crottes de chiens et crottins de chevaux

Ramasser les déjections canines est indispensable. Si ce réflexe s’installe sur les trottoirs des villes, il n’est pas encore une évidence sur les plages. Or, ces déjections favorisent le développement de bactéries.

Déjà, certaines communes ont interdit des plages aux chiens. D’autres y réfléchissent.

Même chose pour les amateurs de sport équestre qui aiment à galoper sur la baie. Il leur faut prévoir de ramasser le crottin de leur monture.

La campagne alertera aussi sur la mauvaise idée qui consiste à nourrir les goélands et mouettes, gros producteurs de déjections.

"La qualité des eaux de baignade se dégrade progressivement, et on sait d’où ça vient, confirme Vincent Loustaunau, le directeur de la communication de Cap-Atlantique, l’agglomération qui regroupe 15 commune de La Baule, en Loire-Atlantique, jusqu’à Pénestin, dans le Morbihan.  On sait comment endiguer ce problème mais il faut que chacun fasse un effort."

"L’eau est propre et de bonne qualité, mais si on continue comme ça, un jour, l’interdiction de baignade arrivera"

Vincent Loustaunau

Directeur de la communication de Cap-Atlantique

Interdire une plage à la baignade, même en pleine saison touristique, l’Agence Régionale de la Santé estime la chose possible si le résultat des analyses l’exige.

"151 sites de baignade en eau de mer sont accessibles au public et surveillés par l’ARS, nous dit-on à l’Agence Régionale de Santé des Pays de la Loire. Le contrôle sanitaire des eaux de baignade est mis en œuvre par l’ARS durant la saison balnéaire. Il porte sur l’ensemble des zones accessibles au public où la baignade est habituellement pratiquée par un nombre important de baigneurs et qui n’ont pas fait l’objet d’une interdiction permanente. Si au cours de la saison, un résultat témoigne d’une dégradation de la qualité de l’eau de baignade, des prélèvements de contrôle sont réalisés dans les meilleurs délais jusqu'au retour à une situation conforme à la réglementation en vigueur, afin de garantir l’absence de risque sanitaire pour les baigneurs. Le cas échéant, les communes peuvent interdire temporairement la baignade."

Ce qui a d’ailleurs été le cas fin juin sur la plage de Porcé, à Saint-Nazaire.

Ce que cherche l’ARS dans les eaux de baignade, ce sont les contaminations d’origine fécale dont la présence d’escherichia coli et d’entérocoques intestinaux sont les marqueurs.

"Les eaux usées provenant des habitations, les déjections des animaux et les effluents d'élevages rejetés dans le milieu et qui pollueraient des sites de baignades, peuvent être la cause d'une mauvaise qualité de l'eau, détaille l’ARS. La pluie peut également provoquer des débordements des ouvrages de collecte et de  traitement des eaux usées ou des ruissellements importants sur des surfaces souillées."

Ainsi, après la longue période de sécheresse que nous connaissons actuellement, de gros orages pourraient avoir des conséquences sur la qualité des eaux de baignade.

L’agence publie ses analyses à proximité des zones de baignade et sur son site internet.

"A ce jour, il n’y a aucune dégradation de la qualité de l’eau sur les sites de baignade en eau de mer de la région. Tous les résultats sont satisfaisants" assure l’ARS en signalant cependant le cas isolé de la plage de Porcé.

Mais l’Agence Régionale de la Santé ne peut évidemment pas s’engager pour l’avenir. Quels effets pourraient avoir le réchauffement climatique ? Une précision de l’ARS nous donne un début de réponse :

"Dans les eaux de mer, nous dit-elle, les conditions d'ensoleillement et de température, mais aussi la composition de l'eau, peuvent favoriser la prolifération d'algues microscopiques (phytoplancton ou algues planctoniques) qui sont responsables de phénomènes "d'eaux colorées", vertes, rouges ou brunes. Parmi ces algues, certaines génèrent des toxines qui peuvent provoquer à certaines concentrations des troubles de santé, dont la gravité varie selon les espèces d'algues présentes."

A noter aussi l’épisode qu’a connu la plage de La Baule à la fin de ce mois de juin avec une forte arrivée d’algues vertes non toxiques, due à la chaleur et aux apports azotés des estuaires de la Loire et de la Vilaine.

 

"Ici commence la mer"

 

L’effort à faire ne concerne pas que les balades sur la plage, il se situe aussi dans chaque maison dont il convient de nettoyer les gouttières où les bactéries se développent si l’eau y stagne. Si La Baule, dispose de stations de traitement des eaux usées de ses habitants (75 000 habitants l’hiver, 350 000 l’été), elle n’a pas de réseau lui permettant de "nettoyer" ses eaux pluviales qui sont directement rejetées à la mer. D’où l’importance de ne pas les charger en détritus divers et variés.

"Ici commence la mer" peut-on lire près de grilles d’eaux pluviales. Comprenez : si vous jetez votre mégot ou tout autre déchet dans ces grilles, il passera hors de votre vue mais il ira directement à l’océan. Ces inscriptions alertant le quidam sur les conséquences d’un mauvais geste, la ville de Saint-Nazaire les a adoptées également. Depuis 2021, cette signalétique est apposée en divers lieux et 135 nouvelles plaques vont être ajoutées cet été sur les trottoirs, près des avaloirs d’eaux pluviales et des corbeilles. 

A Saint-Nazaire, on a aussi interdit tous les animaux domestiques sur les plages surveillées ouvertes à la baignade.

La plage de Porcé un temps interdite à la baignade

Le nettoyage des réseaux d’eaux pluviales qui sont situés près des plages est effectué avant la saison estivale, nous assure-t-on. Une campagne de vérification du bon raccordement des logements aux réseaux, eaux pluviales, eaux usées, a aussi été lancé sur l'agglomération. 15% de raccordements non conformes ont été détectés.

"Une amélioration notable de la qualité de l’eau de la Grande plage de Saint-Nazaire a été vérifiée, souhaite préciser la communauté d'agglomération. Le classement est passé d’insuffisant à suffisant entre 2021 et 2022. Toutes les semaines, entre juin et septembre, la Ville de Saint-Nazaire effectue des prélèvements afin de contrôler la qualité des eaux de baignade des six plages surveillées de la Ville."

Mais toutes ces précautions n'ont pas empêché une inquiétude sur le site de la plage de Porcé, à l'ouest de la ville. Elle a été fermée à la baignade par précaution durant quelques jours.

"Au lieu de se satisfaire des prélèvements faits par l'ARS, explique Eric Cotta maire-adjoint à l'urbanisme de la ville, on fait trois prélèvements supplémentaires par semaine. Et quand on a des doutes, après de forts orages, du fait des ruissellements, on interdit la baignade et on lève cette interdiction après de nouveaux examens. Comme à Porcé. On est trois à quatre fois plus exigeants que ne le fait l'ARS !"

Pourquoi la plage de Porcé plus qu'une autre ? L'élu avoue n'avoir pas obtenu d'explications malgré des recherches poussées. La proximité de la Loire, du chenal menant au port, les courants marins...

"C'est très compliqué, dit Eric Cotta, on a du mal à se l'expliquer."

Mais globalement, estime-t-il, la situation s'améliore. "Trois plages ont été labellisées pavillon bleu, ajoute-t-il. On a fait de très gros efforts depuis 15 ans."

Des plages interdites aux fumeurs

Aux Sables d’Olonne, en Vendée, on a pris depuis longtemps la décision d’interdire les plages aux chiens, chaque année, du 1er avril au 30 septembre. Et cette année, il a été décidé d’étendre à toutes les plages urbaines l’interdiction de fumer, testée en 2022 sur la seule plage de Tanchet, au sud.

 "On est labellisé démarche qualité eaux de baignade", précise fièrement Loïc Potier, le responsable du secteur plage de la ville. Un label décerné par le ministère de la santé.

La note "excellent" a été accordée aux plages de la cité balnéaire vendéenne. À noter que La Baule, est juste en dessous avec la note "bon".

"En plus des analyses commandées par l’ARS (11 prélèvements par saison estivale sur 7 points), ajoute Loïc Potier, la ville a un prestataire extérieur qui effectue de l’avant jusqu’à l’après-saison des analyses complémentaires."

Si ces analyses venaient à pointer une dégradation de la qualité des eaux, la commune ne pourrait pas vraiment agir immédiatement mais, au moins, tenter d’identifier la source de la pollution.

Des mesures bien comprises

Quant aux eaux de pluie, elles ne sont pas déversées directement dans l’océan mais passent d’abord par un bassin de rétention pour décantation.

Une dernière précision : les douches de plage ont été retirées depuis 2015. Trop consommatrices d’une eau potable que ce département peine à produire.

Les interdictions édictées pour protéger les plages sont faites respectées par les maitres-nageurs-sauveteurs et les médiateurs de plage.

"Elles sont bien comprises" assure Loïc Potier.

On estime que chaque jour, en pleine saison, 30 000 personnes fréquentent les plages de la commune, jusqu’à 50 000 lors des grosses affluences.

Faire prendre conscience de la fragilité de l’environnement et de la réalité d’une dégradation régulière des eaux de baignade pour obliger à acquérir les réflexes nécessaires est le défi des communes du littoral. Il est indispensable de faire évoluer les pratiques. Et ce n’est impossible. On a connu d’autres révolutions par le passé.

"Aujourd’hui, ça paraitrait aberrant de fumer dans un bar", rappelle Vincent Loustaunau, le directeur de la communication de Cap-Atlantique.

Des larmes de sirène toujours visibles

Reste à motiver aussi les "routiers" des océans, ces cargos qui ont leur part dans la pollution des plages et eaux de baignade en perdant de temps en temps une partie de leur chargement.

En témoignent les "larmes de sirènes", ces petites billes de polystyrène toujours visibles sur certaines plages du Pays de Retz et dont l’arrivée avait été signalée en janvier dernier. Il y a cinq mois. Elles sont toujours là.

Non, l’océan ne lave pas tout. Et le baigneur n’est que la dernière victime des mauvaises pratiques, après l’écosystème.

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