La France a proposé à la Russie de résilier officiellement le contrat portant sur la livraison des Mistral en remboursant près de 785 millions d'euros d'avances perçues, un montant que Moscou juge insuffisant, a rapporté vendredi le journal russe Kommersant
Selon le quotidien, Paris est prêt à rembourser à Moscou l'argent déjà versé pour ces navires une fois que les autorités russes auront accepté par écrit que les deux Mistral, dont la livraison est suspendue depuis novembre en raison de la crise ukrainienne, puissent être revendus par la France à une tierce partie.
Le Kremlin estime toutefois le préjudice subi par la Russie à près de 1,163 milliard d'euros et refuse tout accord pour une réexportation des navires avant que l'argent ne soit rendu, selon le quotidien économique qui cite des sources au sein du complexe militaire russe.
Moscou met notamment en avant les sommes dépensées pour la formation des 400 marins qui devaient constituer l'équipage, la constructions des infrastructures à Vladivostok, où devait être basé le premier Mistral, et la fabrication de quatre hélicoptères de combat.
Une proposition insuffisante
"Les projets de documents sont actuellement étudiés par le gouvernement russe, le ministère de la Défense et tous ceux engagés dans le contrat des Mistral", a expliqué au journal une source proche du dossier."La proposition de remboursement formulée par la France ne nous convient catégoriquement pas, ce dont le vice-premier ministre Dmitri Rogozine a informé" la partie française, a indiqué une autre source.
"Des discussions amiables sont en cours sur les conditions et l'avenir du contrat", a indiqué une source diplomatique française à l'Agence France Presse tandis que l'Élysée renvoie simplement aux récentes déclarations du chef de l'État français François Hollande.
Celui-ci avait admis pour la première fois fin avril que la France pourrait être amenée à "rembourser" les sommes déjà versées par la Russie pour l'acquisition des deux navires s'ils n'étaient pas livrés.
Un accord avant la fin du mois
Selon un vice-directeur du service russe de coopération militaire et technique, les deux pays mènent actuellement des consultations et s'attendent à aboutir à un accord avant la fin mai.Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a refusé vendredi de commenter la bataille de chiffres entre Paris et Moscou, réitérant les déclarations de Vladimir Poutine: la Russie est prête à recevoir soit les navires, soit l'argent engagé dans le contrat.
Le ministre russe des Affaires étrangères a de son côté affirmé que la question des Mistral ne relevait plus de la diplomatie ou la politique,
mais de la "sphère juridique et commerciale".
La France et la Russie ont conclu en juin 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy un contrat évalué à près d'1,2 milliard d'euros portant sur la livraison de deux portes-hélicoptères de classe Mistral.
Paris avait annoncé fin novembre le report "jusqu'à nouvel ordre" de la livraison du premier de ces bâtiments de projection et de commandement (BPC) construits à Saint-Nazaire (ouest), en raison de l'implication présumée de Moscou dans le conflit ukrainien.
Russes puis Chinois finalement ?
Le premier de ces navires, le "Vladivostok", devait être initialement remis à Moscou à la mi-novembre 2014, mais il est toujours au port de Saint-Nazaire, tout comme le deuxième navire, le "Sébastopol", du nom du port abritant la flotte russe en Crimée, péninsule ukrainienne annexée en mars 2014 par la Russie.Ces navires de guerre polyvalents peuvent transporter des hélicoptères, des chars ou des chalands de débarquement et accueillir un état-major embarqué ou un hôpital.
Selon nos confrères de France-Inter à Moscou, les deux BPC pourraient être revendus aux Chinois qui seraient intéressés, disposant eux-mêmes d'armements proches de ceux utilisés par les Russes.
AFP