À 4 ans, Juliette perd un œil, à 27 ans, elle crée des prothèses oculaires

Victime d’un accident en forêt, à 4 ans, Juliette Simonneau perd l’usage de son œil gauche. Elle a transformé cette épreuve en vocation, puisque aujourd'hui, elle crée des prothèses oculaires pour redonner confiance à ceux qui, comme elle, ont perdu un œil.

"Je ne me souviens pas d'avoir vu de mes deux yeux. Ça a touché l'iris et le nerf optique, et je suis devenue aveugle instantanément. Je me souviens seulement d'avoir été emmenée à l'hôpital et d'avoir voulu mon doudou." Si on ne le sait pas, il est difficile en regardant Juliette de savoir quel œil est une prothèse.

À 12 ans, une décision radicale

Aujourd’hui appareillée, ça n’a pas toujours été le cas pour la Nantaise qui a gardé son œil aveugle longtemps. Après son accident, Juliette enchaîne les visites à l’hôpital. ”J'avais des glaucomes, beaucoup de tension dans les yeux”. Son œil endommagé continue de la faire souffrir. 

À 12 ans, j’ai dit stop, j’en avais marre d’avoir mal.

Juliette Simonneau

Sa décision aboutit à l'éviscération de son œil et la mène chez un oculariste, autrement dit, un professionnel qui crée des prothèses oculaires.

La révélation professionnelle

C’est là, au milieu des pigments et des étagères remplies de matériaux, qu'elle a une révélation : "J’ai vu les étagères avec tous les pigments et je me suis dit, c’est ça que je veux faire, c’était trop beau", se remémore Juliette.

Seulement, il n’existe pas de formation dédiée en France. "J'ai passé mon brevet et puis je me suis dit, c'est bon, c’est fini l’école. Je n’aimais pas ça, mais j’ai continué." Le bac en poche, elle commence une formation de prothésiste dentaire à Liège, en Belgique, qui lui permet d’acquérir une précision manuelle et un sens artistique essentiels dans son futur métier.

Une fois la formation réussie, la jeune Nantaise s’engage dans une formation en ergothérapie. "Je préparais mon mémoire quand mon oculariste m’appelle pour me demander ce que je fais." Il lui propose un poste dans son laboratoire à Mauves-sur-Loire. Sans hésiter, elle quitte la Belgique pour commencer cette nouvelle aventure professionnelle.

Aujourd’hui âgée de 27 ans, Juliette Simonneau est toujours apprentie oculariste. "Avant de pouvoir passer le diplôme universitaire, il faut avoir travaillé minimum trois ans dans un laboratoire. Aujourd’hui, je n’ai pas le droit de toucher un patient."

Alors la jeune femme fabrique les prothèses, qu’elle réalise avec une attention particulière. Du moulage en silicone à la peinture minutieuse de l’iris, jusqu'au maquillage final de la prothèse, rien n’est laissé au hasard. 

Les patients arrivent avec beaucoup de questions et sont parfois tétanisés.

Juliette Simonneau

Son ambition : créer une clinique de l'œil

Environ une personne sur 500 en France est appareillée d’une prothèse oculaire. "Ça concerne bien plus de monde qu’on ne le pense."

C’est pourquoi, dans ses rêves les plus fous, Juliette souhaiterait avoir "une clinique de l'œil où tout serait centralisé pour offrir une prise en charge complète des patients. Ils pourraient y consulter un ophtalmologue, un oculariste, et bénéficier d'un véritable accompagnement sur place."

Un lieu d’échanges entre patients, où ils pourraient partager leurs expériences, "ils pourraient se donner des conseils pratiques, comme emmener des gouttes oculaires en avion ou éviter les courants d’air près d'une fenêtre de train pour ne pas assécher la prothèse. Des petits conseils utiles comme ça…"

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