Accident du travail. "Je ne sais pas dire à mes enfants de quoi est mort leur papa"

En 2022, deux personnes meurent par jour dans un accident du travail. Pierrick, le mari de Claudine Duchêne, a été victime d’un accident le 27 décembre 2021, il se trouvait seul sur son lieu de travail. Aujourd’hui, Claudine ne sait toujours rien sur les circonstances de l’accident, et revendique une meilleure prise en charge des familles par le gouvernement.

"Je ne sais pas dire à mes enfants de quoi est mort leur papa", déplore Claudine Duchêne. Leur vie a basculé, le 27 décembre 2021. Pierrick Duchêne, conducteur de presse pour l’enseigne Point.P de Geneston, est victime d’un grave accident du travail, il décédera quelques jours plus tard à l’hôpital. Depuis, elle n’a jamais eu d'informations sur les conditions de sa mort, malgré des enquêtes menées par l’inspection du travail et la gendarmerie. 

Pierrick Duchêne se trouvait-il au mauvais endroit au mauvais moment ? La seule chose que sait sa femme, c’est qu’il devait être en congé ce jour-là. Son chef lui avait demandé de venir travailler, car "il lui devait une demi-journée. Et puis, on ne peut pas se douter qu’on part au travail le matin sans revenir le soir ", ajoute Claudine. "À l’heure où je vous parle, je ne sais strictement rien de ce qu’il s’est passé. Simplement, que mon mari a été retrouvé en fin de matinée écrasé sous la machine dont il effectuait la maintenance. Cette machine aurait dû être à l’arrêt. Son binôme n’était pas là. C’est lui qui le retrouve, et qui nous dira qu’il s’est absenté une demi-heure. Pas de caméra, pas de témoin. Je n’en sais pas plus aujourd’hui".

Une première enquête, ouverte par la gendarmerie et clôturée en juillet 2022, n’a pas permis d’expliquer les circonstances de l’accident. "Je ne connais aucune conclusion de l’enquête de gendarmerie. Je ne sais pas ce qu’il s’est dit, ce qu’ils ont fait, les expertises, les résultats d’autopsie. Je ne sais rien", relate Claudine Duchêne. Une autre enquête menée par l’inspection du travail est toujours en cours.

Face à la lenteur de la justice, Claudine a rejoint le "collectif familles : Stop à la mort au travail", créé fin 2022. "Le collectif, c’est avant tout des gens qui ont tous la même peine, la même douleur, on rencontre tous les mêmes problèmes. Ces échanges nous permettent d’avancer, de nous aider pour tout ce qui est avocat, procès, assurance. Voilà, on échange beaucoup sur tout ça, parce qu’en France il n’existe rien, on n’est pas aidé. On est complètement seul. À part un gendarme qui vous dit qu’il faudra venir porter plainte pour homicide involontaire, le reste, c’est à nous de nous débrouiller", s’indigne Claudine.

Le 4 mars 2023, le collectif a été reçu au ministère du travail à Paris pour demander un plan de prévention de la sécurité au travail, un accompagnement des familles, ou encore une accélération des enquêtes de la justice. Claudine évoque également "une prise en charge psychologique, des aides financières, et que les obsèques soient systématiquement prises en charge par les entreprises. Mais aussi que les sanctions soient plus sévères, que les peines de prison ne soient pas que sur la personne morale, que l’homicide ne soit plus involontaire, mais volontaire". En réponse, un projet de loi, contenant un plan de prévoyance sur les accidents au travail, devrait voir le jour d’ici cet été.

La parole se libère. Matthieu Lépine, auteur du livre "L’hécatombe invisible" permet aux gens d’éveiller les consciences, il enquête depuis plus de 4 ans sur les accidents du travail mortels. Car le nombre de victimes continue d’augmenter : "l’année où Pierrick est décédé, c’était deux morts par jour au travail. Cette année, on est parti sur trois morts par jour", déplore Claudine.

Article écrit par Marine Saint-Germain

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