Hervé Juvin, eurodéputé et conseiller régional des Pays de la Loire proche du Rassemblement national, a été condamné à une lourde amende pour violences sur son épouse en octobre 2022. Le chef du groupement politique d'extrême-droite lui demande de se retirer des groupes affiliés au parti.
Ancienne tête de liste du Rassemblement national (RN), Hervé Juvin, 66 ans, se voit écarté du parti d'extrême-droite à la demande de son président, Jordan Bardella.
La raison : l'eurodéputé et conseiller de la région Pays de la Loire a été condamné à une amende de 10 000 € en appel le 14 octobre 2022 pour des faits de violences commises sur son épouse.
Si Hervé Juvin n'est pas officiellement encarté au RN, Jordan Bardella lui demande toutefois de quitter les groupes affiliés au parti au Parlement européen et en région Pays de la Loire.
Mais le groupe RN au Conseil régional n’est pas sur cette ligne. Hervé Juvin va certes quitter son poste de président du groupe RN à la région, le 1er décembre. Mais pour son vice-président, Jean-Patrick Fillet, pas question d’appeler à sa démission.
"Cela me peinerait qu’il démissionne, car c’est quelqu’un que j’apprécie. C’est un intellectuel de talent, très intelligent, qui a eu un moment d’égarement".
Hervé Juvin, qui n’a pas répondu à nos sollicitations, restera également député européen, mais plus au sein du groupe Rassemblement National.
“Nous appelons Hervé Juvin à démissionner du Conseil régional”
Ce mardi 8 novembre, les réactions se sont multipliées notamment à gauche chez les conseillers régionaux du groupe Printemps des Pays de la Loire.
“Nous appelons Hervé Juvin à démissionner du Conseil régional”, ont demandé les 12 élues et élus.
Sa présence dans l'hémicycle régional n’est plus souhaitée, ni souhaitable. Elle serait une insulte aux victimes de violences conjugales, et aux associations qui se battent contre les violences sexistes
Les 12 élus du groupe Printemps des Pays de la Loire
“Une fois de plus, cela ne fait pas du bien à la politique” regrette Guillaume Garot, président du groupe Printemps des Pays de la Loire.
Un délinquant condamné par la justice pour des violences conjugales n’a pas sa place au Conseil régional
Guillaume GarotPrésident du groupe Printemps des Pays de la Loire
“En tant que représentante de la Région, la Présidente Christelle Morançais doit se positionner publiquement pour demander à Hervé Juvin de démissionner. La Région en sortirait grandie et gagnerait en crédibilité sur le terrain de la lutte contre les violences faites aux femmes”, estime Mahaut Bertu, conseillère régionale.
Christophe Clergeau, autre élu du groupe, a réagi l'un des premiers sur Twitter, en demandant la démission d'Hervé Juvin. "Je refuse de siéger à ses côtés", a écrit le conseiller régional qui a demandé à la présidente de région Christelle Morançais "de prendre position en urgence."
Contactée, la présidente de Région a répondu : "Les faits sont gravissimes. Je n’ai pas le pouvoir de lui imposer quoi que ce soit. Les politiques ne sont pas des juges. Mais Hervé Juvin est face à sa conscience".
Je ne vois pas comment il pourrait faire autrement que de démissionner de tous ses mandats. C’est une question d’honneur et de respect.
Christelle MorançaisPrésidente de la région Pays de la Loire
Les groupe Démocrates et Progressistes, auquel appartient François de Rugy, estime aussi que "la question de sa démission se pose enfin. Cette décision appartient à Hervé Juvin dans la mesure où la justice n’a pas prononcé de peine d’inéligibilité. Il faut rappeler que sans cette sanction pénale, la collectivité régionale n’a pas le pouvoir de le démettre de ses fonctions".
"C’est donc à lui de décider s’il peut encore représenter les habitants de la Région Pays de la Loire qui l’ont élu, sachant qu’il brille par son absentéisme aux séances du Conseil Régional des Pays de la Loire depuis les élections de juin 2021. C’est à lui de rendre son mandat, en responsabilité".
Un presque ministre de l'écologie
Hervé Juvin est ligérien et fier de l'être. Sa famille est originaire de Guémené-Penfao en Loire-Atlantique. Les 20 premières années de sa vie se sont déroulées à Nantes.
Une fois le bac en poche, Hervé Juvin entre à Sciences Po Paris puis débute une carrière d’essayiste et de conseiller auprès de dirigeants publics et privés dans le monde de la banque et des finances. Il sillonne l’Afrique pendant plusieurs années.
Véritable homme de l'ombre, Hervé Juvin a conseillé Raymond Barre dans les années 1990, avant de soutenir Corinne Lepage aux élections présidentielles 2002.
C'est en croisant le chemin de Marine Le Pen et en acceptant de travailler avec elle en 2007 que sa carrière politique prend un tournant qui le rapproche progressivement du ministère de l'écologie.
Hervé Juvin a posé les premières pierres du programme environnemental du RN lors de la Présidentielle 2022. Il met au point une "écologie nationaliste qui prône les circuits courts", et qu'il veut tester à l'échelle des Pays de la Loire. Une contribution qui lui a valu d'être considéré pour le poste de ministre de l'écologie, si le RN avait remporté l'élection.
Le mouvement "localiste"
En parallèle, il créé le "mouvement localiste", qui s’affirme comme complémentaire du Rassemblement national.
Il y développe le recyclage, l’isolation des bâtiments patrimoniaux, le développement des circuits agricoles au niveau régional, ou encore la défense de la pêche. A contrario, Hervé Juvin fustige les éoliennes en mer.
Son discours politique comporte son lot de paradoxe. Actionnaire de multinationales, il prône d'un même souffle le capitalisme local et la création de banque à l'échelle régionale.