À l'appel de plusieurs associations, une grande manifestation était organisée ce dimanche 11 juin qui prenait la direction du chantier du nouveau CHU de Nantes. Les manifestants voulaient dénoncer les projets d'extension de carrières qui fournissent les chantiers ou des sablières pour le maraichage industriel.
"Avant d'extraire et construire toujours plus, prenons le temps de penser notre avenir"
C'est l'un des slogans portés par les signataires de l'appel à manifester de ce dimanche 11 juin. Ce sont une quarantaine d'associations, parmi lesquelles La Tête dans le sable, Le cri du bocage, le groupement des agriculteurs bio 44, Pays de Retz environnement, Stop-Bure-en-Retz, YouthForClimate Nantes, la LPO 44, qui soutiennent cette manifestation et appelaient à prendre le départ d'un des cortèges en direction de Nantes où ils sont arrivés dans l'après-midi.
Deux cortèges
L'un des cortèges est parti de Héric, dans le nord de la Loire-Atlantique, zone où un projet de carrière à des fins de production de granulats est annoncé ainsi qu'un projet d'enfouissement de déchets du bâtiment.
Pendant ce temps, un autre partait de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu, près de Saint-Colomban, au sud de Nantes, où l'on s'oppose à l'extension de deux sablières.
Ces projets d'extraction ou d'enfouissement ont pour point commun de servir le secteur du bâtiment, c'est pourquoi, symboliquement, les manifestants convergaient vers Nantes où se trouve le projet de nouveau CHU, sur l'île de Nantes, très gourmand en sable et granulats. Nantes où un rassemblement est également prévu au Miroir d'eau, devant le château.
Un moratoire sur les carrières
Ce que veulent les associations qui appellent à cette manifestation, c'est une réflexion nationale sur le sens des grands chantiers projetés ou en cours et un moratoire sur les carrières. Pourquoi choisir de créer de nouveaux bâtiments plutôt que de rénover l'existant ?
Alors qu'on sait que le secteur économique de la construction, notamment responsable de l'artificialisation des sols, représente 43 % des consommations énergétiques annuelles françaises et 23 % des émissions de gaz à effet de serre.
Départ avec retard de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu
Alors que départ du cortège de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu était annoncé pour 9h30, c'est avec plus d'une heure de retard que les premiers tracteurs ouvrant la marche, ont commencé à rouler.
Derrière, de nombreux vélos, avec une ambiance festive et parfois même, familiale. Puis, en fin de cortège, d'autres tracteurs pour fermer la marche.
Sur le parcours qu'ont emprunté ces centaines de manifestants (1500 personnes selon une première estimation), on observait la présence de gendarmes en plusieurs lieux, occupés notamment à fouiller des coffres de véhicules, le préfet de Loire-Atlantique ayant publié un arrêté interdisant, entre autre, les artifices, le transport de carburant et "d'objet pouvant constituer une arme". Le cortège était également survolé par un hélicoptère.
"Des dégâts environnementaux phénoménaux."
"On arrive au bout du modèle extractiviste, déclare Julie Laernoes, député EELV de Loire-Atlantique, présente dans la manifestation. On ne peut pas aller en demandant plus de sable, plus de sable, avec des dégâts environnementaux phénoménaux. Il faut faire différemment, c'est ce que veut montrer le mouvement écologiste dans sa grande diversité."
Pour Sylvain Jallot, du collectif La Tête dans le Sable, les projets d'extension de GSM et Lafarge sont, aussi, dangereux pour la nappe souterraine.
"À terme, dit-il, avec les surfaces actuelles plus les extensions, c'est une surface de 400 hectares qui pourrait être impactée, c'est énorme, d'autant plus que ça se passe sur la nappe d'eau qui est importante pour le lac de Grand-Lieu. En plus, à côté, on a un développement complètement incontrôlé du maraichage industriel. Le message, c'est de montrer ce qui est en train de se passer dans nos campagnes pour servir la bétonisation de la ville et l'hyper développement de Nantes Métropole."
Le parcours du cortège changeait au fil de la matinée, pour prévoir des arrêts sur des lieux "emblématiques" du combat mené par les associations, carrières, exploitations maraichères...
► Voir le reportage de Céline Dupeyrat, Bertrand Tang, Julien Lanchas et Nathalie Saliou-Tendron.
Dans une exploitation industrielle, des plants ont été détériorés, des équipements d'irrigation ont été arrachés et des graines "paysannes" ont été plantées. Ailleurs, c'est dans une serre que les manifestants sont entrés et qu'ils ont dégradée.
Du gâchis de ressources
Sur son tracteur, Guillaume, qui se présente comme "maraicher-paysan" estime que la lutte, aujourd'hui, est sur l'accaparement des terres et des ressources.
"On est dans une période où on sait que les conditions climatiques liées au dérèglement vont changer la donne, dit-il. On doit s'adapter. On a affaire à un modèle industriel qui ne correspond pas aux enjeux. Je suis voisin de ce qui se passe ici, sur le nord de Saint-Colomban. 30% du sable qui est extrait et qui est une ressource finie, est utilisé pour les cultures maraichères, notamment de muguet. C'est du gâchis de ressources."
Un sit-in a eu lieu devant un site de la société BHR, qui produit du béton.
Le cortège a fini par rejoindre le centre-ville de Nantes en milieu d'après-midi, toujours dans une ambiance festive, mais sous haute surveillance policière. Il a rejoint d'autres manifestants, venus ce samedi s'opposer à la construction du nouveau CHU.
Après un passage devant l'actuel hôpital, les manifestants ont pris la direction du siège de Nantes Métropole où une "démonstration" d'écoconstruction a été faite. L'entrée du bâtiment a été murée par des bottes de paille.
Olivier Quentin avec Céline Dupeyrat, Bertrand Tang et Julien Lanchas.