Fillette brûlée par de la soude caustique ingérée dans un restaurant de Pornic : le procès reporté au 22 juin

Le 1er août 2019, la petite Elisabeth, 22 mois, était intoxiquée par de la soude caustique qui lui avait été servie pour du jus de fruit dans un restaurant de Pornic dans le sud Loire. Le procès qui devait s'ouvrir ce mardi 26  janvier 2021 et reporté en juin.

Un an après la tragédie, en juillet 2020, les parents d'Elisabeth avaient accepté de témoigner revenant sur cette affaire et le calvaire subi, depuis, par leur petite fille. Nous vous proposons ce témoignage.

Le 1er août 2019, la petite Elisabeth, alors âgée de 22 mois, ses parents et sa soeur de 6 ans, Alexandra, se rendent à la Fontaine aux Bretons, un restaurant réputé de Pornic en Loire-Atlantique.

Les parents lui commandent un jus de fruits. La fillette en avale deux gorgées, le recrache, ils goûtent alors le contenu du verre.

"Elle s'est mise à hurler comme jamais, mon épouse, ne comprenant pas ce qui se passait, a pris le verre pour goûter également" nous avait raconté à l'époque le papa d'Elisabeth, "en panique, elle a commencé à crier "qu'est-ce que vous avez mis dans le verre ?".

Le père de la fillette prend alors le verre, "ça ne sentait rien donc je l'ai porté à mes lèvres et là j'ai senti une brûlure intense".


Une vie qui bascule en quelques secondes

La vie de cette famille parisienne, en vacances pour une semaine dans la région nantaise, bascule à ce moment là.

Elisabeth est conduite au CHU de Nantes, plongée dans un coma artificiel, son pronostic vital est engagé pendant plus de 24 heures après l'ingestion de la soude caustique contenue dans le verre. Sa bouche, sa langue, son palais, ses lèvres sont brûlés.

Ça lui a littéralement brûlé tout l'oesophage, ce n'est pas une brûlure comme on peut avoir qui se cicatrise. La soude caustique mange les tissus. Elle les mange en profondeur jusqu'à 24h après l'ingestion

            Arnaud Kob, le papa d'Elisabeth

"On a passé 11 jours en réanimation, après encore quelques jours en pédiatrie, se souvient Olga, la maman d'Elizabeth, on attendait une place à Necker (l'hôpital parisien spécialisé en pédiatrie, NDLR), ce qui était plus proche de notre domicile".

La fillette sera finalement transférée à Necker le 14 août.  

Elisabeth s'en sortira mais pour autant son quotidien et celui de sa famille en est totalement changé. 


De terribles nuits

Avec la soude caustique, "la cicatrisation se fait plus en profondeur donc l'oesophage devient plus dur et plus étroit".

"Toutes les 2-3 semaines, Elisabeth va à l'hôpital pour faire des dilatations, nous avait expliqué son papa en juillet dernier, ils passent des ballonnets et ils les gonflent pour essayer de réécarter les tissus, en espèrant qu'ils soient plus larges, on en est à 15-16 interventions et ils n'ont pas pu traiter tout l'oesophage", seulement le haut.

Au tout début,"c'en était à un point où elle n'arrivait même pas à avaler sa salive, chaque 5-10 minutes, elle devait cracher dans un verre".

"La nuit elle pouvait se réveiller 15, 20, 30 fois, elle s'asseyait, elle s'étouffait avec la salive, nous avait expliqué, à son tour, sa mère, ça a duré des mois et des mois". Le lit d'Elisabeth était alors installé dans la chambre de ses parents, les privant tout deux de sommeil.

Depuis le début de l'année 2020, un lit supplémentaire a été installé dans la chambre d'Elisabeth. Ainsi, l'un des deux parents veille en alternance sur les nuits de la fillette, afin que chacun puisse avoir un peu de repos.

Il y a eu des nuits blanches pendant des mois, là on peut avoir des phases de sommeil un petit peu plus longues

   Arnaud Kob, le papa d'Elisabeth

"Là ça va un peu mieux, un moment donné ça ne se referme plus entre deux dilatations donc il y a moins de réveils la nuit, expliquait en juillet 2020 le père d'Elisabeth, il y a en a toujours car, comme elle est alimentée la nuit, elle peut avoir des douleurs à son bouton (greffé à son abdomen afin de pouvoir être alimentée par une pompe), elle peut s'emmêler dans la pompe, elle peut se retourner sur le fil, du coup ça fait une occlusion, il se passe toujours quelque chose la nuit".


Un lieu bien connu de la famille

Dès août 2019, la famille avait porté plainte pour blessures involontaires dûes à un manquement aux consignes de sécurité.

En juillet 2020, l'enquête était toujours en cours et donc "confidentielle".

"Quand j'essaie d'obtenir des informations, on me dit qu'il manque encore des pièces, nous avait précisé Arnaud Kob en juillet dernier, je veux bien entendre que les choses peuvent être longues mais je ne sais pourquoi notre enquête met un an alors qu'on sait déjà le produit qui était dans le verre, on sait déjà qu'ils mettaient ce produit dans les bouteilles de jus de raisin et que c'était une habitude, qu'ils retiraient l'étiquette ou qu'ils mettaient une croix rouge dessus. Là, visiblement, sur l'étiquette il n'y avait pas de croix rouge".

"Cette bouteille est passée de l'endroit où on fait la plonge à la cuisine, de la cuisine au frigo et du frigo au verre de ma fille, donc il y a eu plusieurs personnes qui ont fait transiter cette bouteille
, il y a eu quelques fautes qui ont été commises".

"Le drame c'est qu'on connaissait parfaitement ce restaurant, ce qui nous a, en plus, ajouté du poids émotionnel, se souvient Olga Kob. En 2016 on a fêté mon anniversaire dans ce restaurant, en 2017 on y est passé, j'étais en fin de grossesse d'Elisabeth"

 

C'est un endroit où on emmenait nos enfants les yeux fermés

   Olga Kob, la maman d'Elisabeth

"C'était un endroit qu'on appréciait, on a loué une maison à 5 minutes de ce restaurant juste pour pouvoir y aller", indique la maman d'Elisabeth, avec ce drame, "on s'est bien déconnecté avec ce restaurant de tout ce qui est la vie normale. Je ne sais combien de temps ça va encore durer cette période"

"On se demande combien de temps ce restaurant va encore prospérer alors que notre vie s'est pratiquement arrêtée",
conclut-elle.  
 

Une enquête interne

J'ai repris la Fontaine aux Bretons un peu moins d'un mois avant cet accident

    Alexandre Gérard, propriétaire de la Fontaine aux Bretons

 Alexandre Gérard, propriétaire de la Fontaine aux Bretons, avait également éccepté de nous répondre en juillet 2020.

"A la suite de cet accident, j'ai diligenté avec les responsables du site une enquête interne pour tenter de comprendre ce qui c'était passé, raconte Alexandre Gérard, le patron de la Fontaine aux Bretons, on a mis en place des moyens correctifs immédiatement".

Le lave-vaisselle qui nécessitait un chargement manuel du détergent a été modifié "par le fournisseur de manière à ce qu'il n'y ait plus d'intervention humaine et que tout soit automatique".

"Nous avons contacté le fabricant de produit pour qu'il en change la couleur car il a la même couleur et la même viscosité que nos jus de fruits",
poursuit Alexandre Gérard.

"Nous avons également contacté notre syndicat professionnel pour témoigner", "pour éviter à tout prix que dans d'autres établissements puisse se reproduire une telle situation dramatique", précise également le patron de la Fontaine aux Bretons.

Ça fait un an jour pour jour que je pense à cette petite, que je pense aux conséquences que ça a pour elle, aux conséquences que ça a pour sa famille et à la façon dont ça pertube considérablement leur vie

   Alexandre Gérard

"L'établissement était piloté par des gens d'expérience, des gens qui avaient jusqu'à 20 ans d'expérience dans cet établissement", poursuit Alexandre Gérard qui se dit aujourd'hui, "navré de tout ça, navré des conséquences que ça pour cette famille, pour cette enfant".

Ce qu’Arnaud Kob de ce procès ?

" Une condamnation lourde. Pour moi c’est le procès de l’argent contre la santé. Les salariés du restaurant n‘étaient pas formés à la toxicité des produits, à leur manipulation. La Fontaine aux Bretons a été rachetée quelques mois avant l’accident par le groupe Innov’on. Ce sont des investisseurs. Ils font de l’argent mais cela implique des responsabilités".

Dans cette affaire, le propriétaire de l'établissement encourt trois ans de prison. Le procès devait ouvrir ce mardi 26 janvier à Saint-Nazaire, il est reporté au 22 juin.

 

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