Jacques Auxiette, disparu ce vendredi 10 décembre à l'âge de 81 ans a eu, comme président du conseil régional des Pays de la Loire, une action particulière dans le développement des Trains Express Régionaux. Il en a fait un outil d'aménagement du territoire à part entière.
Jacques Auxiette connu comme maire de La Roche-sur-Yon en Vendée, et comme président du conseil régional des Pays de la Loire, a débuté dans la vie comme enseignant, puis proviseur de lycée. Il conservera tout au long de ses mandats électifs une attention particulière pour l'éducation et la laïcité.
COP et transition énergétique déjà
On le sait moins, il a été aussi le président extrêmement actif du Gart, le Groupement des Autorités Responsables des Transports. C'est assurément dans cette fonction qu'il a perçu le rôle essentiel des transports publics dans les mobilités quotidiennes de ses concitoyens.
En 2015, Jacques Auxiette s'exprimait sur la nécessité de développer les chemins de fer et la mobilité régionale au quotidien : "On dit parfois que c'est une industrie du 19ème siècle, le ferroviaire a encore un avenir, je crois, au moment où on parle de la COP 21, transition énergétique. Ce ferroviaire, ces transports collectifs jouent un rôle très important".
Le tweet du PDG de la SNCF
Une complicité mutuelle
Si Olivier Guichard avait, en son temps, fait avancer les Transports Express Régionaux sur la voie de l'autonomie de gestion et de leur développement par les régions, le moins que l'on puisse dire est que la question des trains n'avait pas particulièrement intéressé ses successeurs.
Aussitôt élu président du conseil régional des Pays de la Loire, Jacques Auxiette s'est emparé avec Gilles Bontemps, le vice-président en charge des transports, de la question ferroviaire.
Les deux ont formé, avoue volontiers Gilles Bontemps, "une complicité mutuelle, faite d'ambitions et de perspectives". Jacques Auxiette présidait également l'Association des Régions de France, il a souvent infléchi les choix de ces collègues présidents de région pour faire avancer les TER dont ils avaient la responsabilité.
Le cas du Nantes-Lyon
Dès sa prise de fonction à la région des Pays de la Loire, le président et son "ministre des transports" s'attaquent à la question de la ligne Nantes-Lyon en déliquescence. Jacques Auxiette "prend le train par les tampons" en invitant les journalistes à monter dans le train Corail avec lui à plusieurs reprises. Il discute avec les voyageurs, explique ce qui ne va pas, et brusque une SNCF qui avait l'habitude de ronronner et de faire ce qu'elle avait envie de faire, quand elle le voulait, avec les conseils régionaux.
Jacques Auxiette se construit ainsi une image politique régionale de défenseur des services publics ferroviaires et engage sa région dans un élan de modernisation sans précédent.
L'homme des tram-trains
La région consacre alors 735 millions d'euros à cette modernisation durant les deux mandats. Pour l'achat de 115 trains et le renouvellement des voies. "On était là pour faire bouger les choses, pour secouer là où sa patinait. Il avait une façon de mettre les pieds dans le plat quand ça n'allait pas, et il m'a souvent invité à le faire", se souvient Gilles Bontemps. Qui ne s'en est pas privé, c'était aussi dans son tempérament.
Le résultat de ces efforts, de ces investissements a été couronné de succès. Les voyageurs ont aimé, et ont pris le train ! L'augmentation de la fréquentation a montré des pourcentages à deux chiffres année après année.
Jacques Auxiette reprend à son compte l'idée du tramtrain lancée par Jean-Marc Ayrault de nombreuses années auparavant, et que la SNCF avait soigneusement tenue de côté. C'est lui qui entraine la région Rhône-Alpes dans l'aventure, pour permettre un achat groupé du matériel. "Nous étions à deux heures de la signature de la convention avec la SNCF, se souvient Gilles Bontemps, nous discutions avec le vice président de Rhône-Alpes, qui était intéressé, mais peu motivé, pour les lignes de l'Ouest de Lyon. Jacques m'a dit allez, assez discuté, il faut le faire, on signe !" Et depuis les tram-trains sont devenus réalité en France. Ironie de l'histoire Jean-Marc Ayrault devenu premier ministre, est venu inaugurer la ligne de Châteaubriant.
Au service du public
Jacques Auxiette est convaincu de la nécessité d'agir au mieux pour la collectivité et au plus près des besoins des habitants. Pour les lignes de Nantes vers Saint-Gilles-Croix-de-Vie ou Pornic, qui allaient à grande vitesse vers une fermeture totale tant leur état inspirait l'inquiétude des cheminots, l'État tergiversait, toujours sur une vieille stratégie de fermeture. Jacques Auxiette a alors proposé d'avancer le montant des travaux à cet État qui repoussait toujours à plus tard le remplacement des voies qui dataient d'avant la seconde guerre mondiale. La modernisation a pu être menée à bien, et sans délai, pour ces voyageurs du quotidien qui n'en pouvaient plus des rails cassés, de ces trains à 30 km/h et des retards à répétition.
Et Gilles Bontemps d'ajouter encore, toujours dans cette volonté de se mettre au service du public, que c'est avec Jacques Auxiette qu'a été prise en 2015 la décision du contournement ferroviaire de la raffinerie de Donges. Les trains traversant, non sans danger, la raffinerie par le milieu, héritage d'une époque peu soucieuse de sécurité collective. "Il est allé voir Total pour s'assurer, et avoir la certitude, de la pérennité du site, et a ensuite convaincu l'État et la SNCF d'engager les études et les travaux. L'inauguration aura lieu dans quelques mois", se plait à rappeler l'ex vice-président en charge des transports, aujourd'hui bien triste d'avoir perdu son ami.