Le rapporteur public a proposé mardi à la cour administrative d'appel de Nantes de confirmer la condamnation de l'Etat à indemniser un jeune homme blessé à l'oeil par une balle de gomme-cogne, tirée par un policier lors d'une manifestation lycéenne en 2007 devant le rectorat de la ville.
Dans son jugement rendu en novembre 2016, neuf ans après les faits, le tribunaladministratif de Nantes avait considéré que la responsabilité
de l'Etat était engagée pour "faute", mais qu'elle était partagée à 50% par la victime du tir, alors lycéen de 16 ans, celui-ci ne s'étant pas "désolidarisé"de la manifestation.
Les juges administratifs avaient condamné l'Etat à verser 48.000 euros au jeune homme, une décision dont le ministère de l'Intérieur avait
interjeté appel.
Lors de l'audience en appel, le rapporteur public a demandé de nouveau demandé la condamnation de l'Etat, mais a préconisé de fixer sa part de responsabilité à 75%, estimant que le tribunal administratif avait eu "la main lourde" en considérant que la faute était partagée à moitié par la victime du tir.
Le rapporteur public a suggéré que lui soit versée la somme de 72.000 euros. La cour administrative d'appel doit rendre sa décision le 25 juin.
Aujourd'hui âgé de 27 ans, Pierre Douillard avait quasiment perdu l'usage de son oeil droit après avoir été touché par un tir de lanceur de balles en caoutchouc de défense 40X46 mm ("LBD40"), lors d'une manifestation contre la loi sur l'autonomiedes universités, le 27 novembre 2007.
Cette arme "exceptionnellement dangereuse", qui était alors en cours d'expérimentation, avait été utilisée par un policier insuffisamment formé et de façon "disproportionnée", sa sécurité n'étant pas menacée quand il a tiré, a relevé le rapporteur public.
"La police expérimente des armes, les blessures se multiplient partout en France et on considère que les blessés, les victimes sont partiellement responsables car ils ne se sont pas désolidarisés, c'est indécent et scandaleux", a réagi Pierre Douillard après l'audience, disant espérer "l'épilogue judiciaire" de cette affaire.
"Ce partage de responsabilités revient à dire vous n'avez pas le droit de manifester", a souligné son avocat, Etienne Noël, qui réclame la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat "à 100%" et 172.000 euros de dommages et intérêts.
Au pénal, le tribunal correctionnel de Nantes avait relaxé le policier auteur du tir en avril 2012, considérant qu'il avait exécuté un ordre qui n'était pas manifestement illégal. La cour d'appel de Rennes avait confirméce jugement en octobre 2013.