Des insultes par centaines, chaque semaine, sur les réseaux sociaux, par mail et par courrier... Ce qu'a vécu, et ce que subit encore Monique Rabin, députée socialiste de Loire-Atlantique, pour avoir publié, en octobre dernier, une "lettre au migrant inconnu", en faveur d'un accueil plus ouvert.
C'était en octobre dernier.... Des manifestations d'extrême droite, et même des tirs de carabine contre le centre du CCAS de Saint Brévin qui devait accueillir des migrants de Calais.
Alors que le gouvernement s'apprêtait à démanteler la jungle, ce vaste bidonville à ciel ouvert où des milliers de migrants attendaient l'opportunité de tenter le passage vers l'Angleterre, la question déchirait la ville de Saint Brévin, comme d'autres villes françaises.
C'est alors que Monique Rabin, députée socialiste, entre dans le débat, rappelant ses valeurs, dans une lettre ouverte.
La députée y défend des valeurs universelles, d'accueil, de solidarité, de dignité... L'éditorial, publié sur son site internet, puis dans la presse quotidienne régionale fait mouche. Les messages sont nombreux. Ceux qui la félicitent pour son engagement, mais aussi, les critiques, qui arrivent par centaines, en commentaires, sur le site internet, sur les réseaux sociaux, pour certains, par courrier."Bienvenue chez nous, tu y seras chez toi. Je ne sais pas qui tu es, ni d'où tu viens. Je ne sais pas ce que tu fuis : la guerre ? La faim ? La torture ? "
Pendant de longues semaines, les injures s'accumulent, à un niveau de violence et de vulgarité que n'avait jamais rencontré la députée socialiste.
"Un seul adjectif, le plus répandu, c'est la socialope. Parce que je suis socialiste, mais je suis aussi une Salope... Et il y a eu des mots beaucoup plus durs encore"
Beaucoup de ces messages semblent avoir transité par des sites reliés à l'extrême droite. Au-delà des insultes, il y a les menaces, à peine voilées, parfois même extrêmement précises....
"Quelqu'un m'a envoyé sur Facebook : on se rappellera, tes parents habitent à Laval. Mes parents ont 90 ans, ça m'a beaucoup choquée. J'ai eu le sentiment de même pas pouvoir les protéger"
Une violence que Monique Rabin n'est pas la seule à subir dernièrement...
A Nantes, depuis plusieurs années, des permanences d'hommes et de femmes politiques sont régulièrement visées
par des dégradations.
Pour Arnaud Leclerc, chercheur en sciences politiques, ces attaques révèlent un climat général, de crise sociale, économique, démocratique.
"Quand on est comme aujourd'hui dans une crise qui est en même temps politique, où on a le sentiment que l'élection régule moins, vous avez des individus qui considèrent qu'envoyer une expression par un bulletin de vote, ce n'est pas suffisant. Et donc ils vont avoir tendance à envoyer une expression très directe, souvent à des élus qui sont les cibles. En étant dans un vocabulaire très ordurier, très agressif. "
Pour Monique Rabin, ce harcèlement, qui se répète à chaque fois que sa lettre au migrant inconnu remonte sur les réseaux sociaux, a finalement renforcé le courage, celui d'affirmer haut et fort, des valeurs de partage, et d'humanisme.
► Notre reportage vidéo
Reportage Eléonore Duplay, Boris Vioche et Sophie Boismain
Intervenants : Monique Rabin, députée socialiste
Arnaud Leclerc, professeur de sciences politiques