Il y a tout juste dix ans, les "zadistes" de Notre-Dame-des-Landes affrontaient les forces de l'ordre dans le bocage lors de l'opération César. Nombre de ceux qui résident toujours sur place ont rallié le combat des anti-bassines des Deux-Sèvres. Ils étaient à nouveau mobilisés, sur le terrain, à Sainte-Soline le week-end dernier.
À Notre-Dame-des-Landes, il n'y avait pas grand monde ce week-end.
La plupart des habitants sont allés prêter main forte aux 150 organisations et associations anti-bassines qui appelaient à manifester près de Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres.
"Nous célèbrerons d'ici quelques jours les dix ans de résistance à l'opération César et le meilleur moyen pour nous de commémorer cette victoire, c'était de rejoindre ce nouveau front de résistance. Nous sommes environ 200 à vivre sur la zad et la plupart se sont rendues sur place. Forcément, les gens sont très touchés par la question de l'eau et du devenir des terres agricoles" explique Benoît des Soulèvements de la terre.
Ce n'était pas la première fois qu'ils faisaient le trajet pour rejoindre les miltants anti-bassines. Depuis plus d'un an, en fait, les habitants du bocage ligérien participent au mouvement "Bassines non merci" qui se mobilise contre la construction de 16 réserves d'eau, alimentées par la nappe phréatique, destinées à irriguer les terres cultivées de l'agriculture intensive. Le projet de retenue d'eau contre laquelle s'est cristallisée la mobilisation du week-end est l'une des plus importantes : d'une capacité de plus de 600 000 M3 d'eau, soit l'équivalent de 260 piscines olympiques. Une gabegie écologique pour ses détracteurs, dont la Confédération Paysanne.
Dans les deux-Sèvres, "comme un parfum de Notre-Dame-des-Landes"
Entre Notre-Dame-des-Landes et ce qui se passe actuellement à Saint-Soline, les points communs sont nombreux. On y retrouve les mêmes motivations ou presque, à quelques 10 ans d'écart. Au premier rang desquelles la défense "de biens communs qui ne doivent pas être privatisés", selon ces citoyens et ces militants.
"L'eau est un bien commun essentiel, comme l'étaient les terres de la Zad. Dans les Deux- Sèvres, les habitants ont monté des comités de défense de l'eau, ils se battent parce qu'ils ne veulent pas voir leurs terres s'assécher. On sait bien que cet enjeu est majeur, il n'y a qu'à voir ce qui s'est passé cet été pour mesurer la gravité de la situation".
"C'est vrai que ce week-end, il y avait un parfum de Notre-Dame-des-Landes" poursuit Benoît. "On retrouve dans cette lutte les même modalités d'action. La résistance concrète, sur le terrain, c'est ce qui a fait la force de Notre-Dame-des-landes. Il y a dix ans, une manifestation avait rassemblé 40 000 personnes sur la Zad, 500 tracteurs...les gens venaient de partout. Comme à la Zad, les habitants des Deux-Sèvres ont multiplié les recours juridiques pour faire échec à ces projets mais comme les mobilisations classiques n'ont pas fonctionné, ils ont décidé de résister concrètement, matériellement".
À Sainte-Soline comme à la Zad en son temps, les manifestatnts ont bravé les arrêtés préfectoraux interdisants les rassemblements. "mais on voit bien que les habitants des Deux-Sèvres, les élus, les syndicalistes, les gens de 7 à 77 ans, n'hésitent pas à venir quand même, à traverser la zone. Ils se sentent légitimes à dénoncer ces crimes contre l'eau" souligne encore Benoît.
Ce week-end les habitants de la Zad ont retrouvé à Saint-Soline des militants du marais poitevin et des Deux Sèvres qui, en novembre 2012, étaient venus à Notre-Dame-Des-Landes soutenir leur mouvement d'occupation du bocage et leur opposition aux forces de l'ordre. " Y aller pour rejoindre les opposants aux méga-bassines, c'est une manière de rendre la pareille, de mettre un reseau, une certaine expérience de l'action au service d'une autre lutte" soutient Benoît qui conclut "aujourd'hui tout un chacun voit bien à quel point il était nécessaire de préserver le bocage, l'histoire nous a donné raison, elle nous donnera aussi raison dans ce combat pour préserver les ressources en eau".