Saint-Nazaire est bien connue pour son architecture d'après-guerre, centrée sur le béton. Point stratégique du mur de l'Atlantique bâti par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale, la cité portuaire a été détruite à 85 % par les bombardements alliés, puis est renée grâce au béton armé. Visite de ses bâtiments emblématiques.
Quand on se promène à Saint-Nazaire, il règne une sensation de quiétude. On est loin de s'imaginer que derrière le front de mer et ses immeubles d’avant-guerre intacts, le centre historique a subi des bombardements massifs pendant la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, les Alliés veulent faire tomber la poche de Saint-Nazaire.
Les halles et leur voûte de béton
À la sortie de la guerre, les Nazairiens doivent tout reconstruire. On fait appel à l’architecte Noël Le Maresquier. Il repense l’organisation de la ville et gère l’implantation des nouveaux équipements. Le marché des halles fait partie de ces lieux indispensables pour revenir à une vie normale.
"Pour faire simple, le centre-ville de Saint-Nazaire a été déménagé, et on décide de séparer le port et la ville, résume Emmanuel Mary, chargé du patrimoine de la ville de Saint-Nazaire. Or les halles sont un bâtiment central : il ne faut pas oublier qu'à l'époque il n'y a ni grande-surface, ni supermarché, donc c'est le premier point de ravitaillement de toute la population."
Toutes ces nouvelles constructions seront financées par les dommages de guerre. L’enjeu est de faire vite, on choisit donc le béton. "Le coup de génie du bâtiment, c'est la voûte, qui mesure quand même 4000 m² sans poteau, souligne Emmanuel Mary en levant les yeux. Elle prend la lumière uniquement du côté nord, pour limiter l'arrivée du soleil sur les marchandises. Puisque le soleil est le premier ennemi de la conservation de l'alimentation !"
Les lieux de culte sont aussi à reconstruire. Sur son ancien emplacement, la nouvelle église Saint-Gohard est réédifiée en béton. La structure, innovante à l'époque, est issue d’une collaboration entre architectes et ingénieurs. Le clocher est dissocié du bâtiment et comporte à son sommet des hauts parleurs, version moderne des cloches.
"Tout est années 1950, l'église n'a pas bougé. On est vraiment dans une capsule spatio-temporelle, vraiment au cœur des esthétiques de la période de la reconstruction, glisse Emmanuel Mary. La structure est très simple, on reconnaît la même volonté qu'on décelait aux halles : avec l'absence de pilier, de support intermédiaire, on laisse l'espace libre."
Objet bétonné non-identifié
La balade se termine par un autre bâtiment lui aussi énigmatique : une soucoupe géante de 83 mètres de diamètre. Cette coque autoportante a été construite dans un ancien marais, rebouché pour l’anecdote avec les décombres issus de la guerre. L’idée d’origine était d’y accueillir aussi bien des épreuves sportives que des événements culturels.
"Ce bâtiment est une calotte sphérique inversée et inclinée, qui a été réalisé en béton armé et coffré. C'est pour ça qu'on aperçoit des empreintes qui sont dues aux planches de bois du coffrage, précise Stéphanie Le Lu, chercheuse de l’inventaire du patrimoine de la ville de Saint-Nazaire. Ça a été une volonté des architectes et des ingénieurs de laisser cette empreinte de béton brute sur cette structure."
La soucoupe est le dernier bâtiment construit à Saint-Nazaire avec les dommages de guerre. Mais là encore, il y eut des péripéties. Les travaux débutent en 1963, sont interrompus par des faillites d’entreprises mais surtout par mai 1968. Officiellement inaugurée en 1970, elle fait encore le bonheur des sportifs.