Deux gendarmes accusés de n'avoir rien fait pour empêcher le lynchage de deux Européens, dont l'Angevin Sébastien Judalet, et un Malgache en 2013 sur la Grande Ile ont affirmé mercredi devant le tribunal d'Antananarivo avoir reçu l'ordre de protéger leurs casernes.
Le 3 octobre 2013, sur l'île touristique de Nosy Be (nord de Madagascar), un Français, Sébastien Judalet, et un Franco-Italien, Roberto Gianfala, avaient été roués de coups et brûlés par une foule déchaînée qui les soupçonnait d'avoir tué un enfant et d'avoir commis des actes pédophiles. Quelques heures plus tard, Zaidou, l'oncle malgache du garçonnet avait subi le même sort.
"J'ai reçu l'ordre de mon supérieur de me contenter de défendre la caserne, une priorité absolue au vue de la situation du 2 octobre", a expliqué mercredi Fabien Rakotosolofo, adjudant à la gendarmerie de Nosy Be, toujours en poste malgré son inculpation pour non-assistance à personne en danger.
Pendant deux jours, les 2 et 3 octobre 2013, la foule, exaspérée par les recherches infructueuses pour retrouver le petit garçon, s'en était en effet pris à la gendarmerie de Nosy Be.
"Lors des émeutes, dix gendarmes ont été blessés. Un a reçu une balle de la foule. L'ordre que j'ai reçu c'est "défense des casernes en attendant les renforts", a aussi dit à la barre l'autre gendarme accusé, le capitaine Rija Rakotomampianina.
Plus tôt mercredi, la Cour criminelle ordinaire d'Antananarivo avait terminé l'audition des 14 personnes poursuivies pour assassinat et séquestration, notamment l'audition de M. Manatoetsy (pas de prénom), dit Tsikombala, qui avait été identifié sur une photo prise au moment du lynchage des deux Européens.
"Je reconnais être vu sur la photo en train de tirer le "vazaha" (ndlr, Occidental en malgache), mais ce dernier était déjà mort au moment où la photo a été prise", a affirmé au tribunal Tsikombala.
Lors de sa garde à vue, l'agriculteur de 22 ans avait dénoncé plusieurs personnes, mais il a assuré mercredi avoir été victime de pressions policières au cours de son interrogatoire.
"Il faut que vous signiez ce PV sinon je tirerai sur vous", m'a dit le commandant de compagnie", a affirmé Tsikombala.
Parmi les autres accusés entendus à la barre mercredi, Jaovelo Said, un poissonnier de 28 ans, a assuré avoir été "torturé" par les gendarmes lors de son interrogatoire.
Jeudi, le tribunal doit visionner une vidéo prise par la foule lors du drame, avant d'entendre le réquisitoire du procureur et les plaidoiries des avocats. La date du verdict reste pour l'heure inconnue.
Au total 37 personnes - 35 civils et deux gendarmes - sont poursuivies dans cette affaire pour vandalisme, non assistance à personne en danger, et séquestration et assassinat. Tous plaident non coupable.