Faute de structure administrative, le centre de vaccination de La Roche-sur-Yon ne peut rémunérer ses soignants, mobilisés depuis la mi-janvier pour la campagne vaccinale contre la Covid-19. La mairie se porte volontaire pour porter ce centre, mais exige un soutien financier important de l'ARS.
À La Roche-sur-Yon, le centre de vaccination de la rue Baumann tourne à plein régime depuis neuf semaines. Plusieurs centaines de Vendéens se font immuniser chaque jour, malgré un inconvénient de taille : le centre yonnais n'a ni existence administrative ni direction. À défaut, les personnels de santé actifs ou retraités mobilisés ici en urgence en janvier dernier investissent dans leur propre matériel. Ils multiplient également les tâches, parfois même hors de leur champ de compétence.
"Comme nous n'avons pas de personnel administratif, c'est moi qui réalise le planning des médecins, signale le Dr. Brigitte Tregouët, médecin-référente du centre de vaccination. On a 6 à 8 médecins, ça prend du temps et je n'ai aucun outil adéquat pour faire ça," ajoute-t-elle. Sans existence administrative, le centre ne possède pas de compte en banque et les personnels y travaillent depuis deux mois sans être payés.
"Éteindre l'incendie"
À l'image de Brigitte Tregouët, la Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Centre-Vendée a sollicité à la mi-janvier l'aide de nombreux soignants pour lancer efficacement la campagne vaccinale. Or, la CPTS n'a pas accepté de devenir la structure porteuse du centre car l'enveloppe promise par l'ARS est insuffisante pour faire fonctionner le centre et administrer ce dernier. C'est au-dessus de ses capacités (la CPTS compte deux salariés, NDLR).
La Ville de La Roche-sur-Yon pourrait se porter volontaire pour porter le centre. Le maire Luc Bouard s’engage à prendre les frais de fonctionnement à sa charge et à avancer des financements. L'élu ajoute qu’ils sont normalement à la charge de l’État, soit de l'ARS, dont il pointe les défaillances. Ce centre a un coût important : on l'estimera à 50 000 euros par mois en avril, lorsque le rythme de mille vaccinations par jour sera atteint. Une délibération spéciale sera votée au prochain conseil municipal.
En janvier, on est bien sûr venus en urgence pour éteindre l'incendie. Pendant qu'on s'occupait du feu, on attendait aussi la venue des pompiers. Mais ils n'ont jamais apparu et ça fait neuf semaines que ça dure !
Pas payés depuis neuf semaines
Mis à part la location de la salle et d'ordinateurs assurée par la Mairie et les doses fournies par l'ARS, le personnel soignant travaille presque en autarcie. C'est une pharmacienne qui fournit l'adrénaline, le gel hydroalcoolique, les sparadraps, sans que personne pour l'instant ne règle les factures.
"Nous devons accueillir les patients, réaliser l'injection, puis une surveillance post-vaccinale, veiller à ce que les patients respectent les gestes-barrière pour éviter que le centre ne devienne un cluster, énumère la médecin-référente. Les pompiers qui assuraient la sécurité, pas payés, ont bien failli se retirer, mais nous avons finalement pu nous entendre. Je me retrouve à faire un travail administratif qui n'est pas de ma compétence," soupire la praticienne.
Brigitte Tregouët regrette que la CPTS, la Mairie et l'ARS se rejettent chacun la responsabilité du centre, sans prendre de décision. "Je dois ensuite expliquer ces revirements aux personnels. C'est ironique : je me sens responsable des paies alors que je ne suis même pas payée pour ce que je fais ! glisse Brigitte Tregouët. Certaines infirmières, qui ne sont pas payées depuis neuf semaines, envisagent d'arrêter. Il y a des médecins qui peuvent travailler bénévolement un temps, mais ce n'est pas le cas de tout le monde."
"L'ARS des Pays de la Loire s'est engagée à payer l'ensemble des frais affairant à la vaccination, rappelle un responsable de l'organisme. Pour l'instant ce n'est pas le cas, faute de convention entre l'ARS et les différentes structures porteuses, collectivités locales, maisons de santé ou CPTS."
L'ARS se veut rassurante
Joint par téléphone, ce responsable indique que les neufs collectivités qui accueillent un centre de vaccination en Vendée ont chacune reçu un projet de convention" qu'elles devront chacune signer. Il assure qu'une décision nationale va intervenir "de façon imminente" pour encadrer les rémunérations des retraités et des remplaçants mobilisés pour la crise.
Ouvert le 18 janvier, le centre de vaccination de La Roche-sur-Yon a déjà vacciné plus de 4 550 patients au 15 mars, dont 1 930 ont reçu deux injections. En avril, les soignants comptent réaliser mille injections par jour... s'ils sont payés. Situé au 80 rue Baumann à La Roche-sur-Yon, le centre couvre une territoire qui concerne un quart de la population du département de la Vendée.