Après une 3 jours d'audience, les 5 prévenus ont enfin été entendus à la barre, dans le tribunal de justice installé dans un hall du parc Chanot, à Marseille. J-C Mas estime que le gel non conforme placé dans les implants mammaires défectueux était "meilleur" que le Nusil, gel homologué.
Vendredi, Jean-Claude Mas et ses co-prévenus ont enfin été entendus devant le tribunal correctionnel de Marseille. Ceux-ci, anciens cadres de PIP, ont décrit une usine où tout le monde savait et oscillait entre peur du patron et peur du licenciement.
Dans la matinée, M. Mas avait défendu son gel "maison": "Je prétends que je n'ai pas fait prendre de risques", a déclaré le septuagénaire, jugé pour "tromperie aggravée" et "escroquerie" pour avoir, dans les années 2000, rempli les prothèses
d'un gel de silicone industriel non autorisé.
"Au niveau cohésivité, je suis certain, j'affirme qu'il était supérieur au Nusil (le gel conforme, ndlr)", a-t-il répété, montrant parfois un léger agacement. Dans l'après-midi, l'agacement a franchi un cran, quand le procureur Jacques Dallest l'a interrogé sur ses déclarations en garde à vue, dans lesquelles il traitait les plaignantes de femmes "fragiles" en quête "de fric".
Beaucoup de femmes dans la clientèle de la chirurgie esthétique "ne sont pas bien dans leur peau", "sont fragiles", a répondu Mas, provoquant un brouhaha dans la salle et s'attirant un "connard" venu des sièges des victimes. Vêtu de son large blouson marine, regardant la présidente, droit, les yeux écarquillés, il a expliqué avec assurance tenir la formule de son gel d'un chirurgien plasticien varois, pour qui il avait travaillé au début des années 80.
L'enquête a montré que l'usage du gel non conforme au lieu du Nusil avait permis à la PME un gain annuel d'un million d'euros.
Selon les autorités sanitaires, un quart des prothèses retirées des porteuses étaient défectueuses (perspiration du gel, rupture des enveloppes), générant notamment des réactions irritantes.
Tous les salariés de l'entreprise connaissaient l'existence de ce gel, mais Mas imposait sa volonté, a affirmé un autre prévenu, Loïc Gossart, 39 ans, ex-directeur production. Selon lui, "100% des salariés, hors les commerciaux France, étaient au courant".
Il relève que le retour au gel conforme qu'envisageait Claude Couty déplaisait aussi "aux syndicats" car, plus cher, il aurait entraîné un surcoût et des risques de licenciements dans un contexte de difficultés économiques de la société de 120 salariés.
Autre prévenu, Thierry Brinon, 53 ans, directeur technique depuis 2006. Les plaintes de chirurgiens en 2008 "ont commencé à me faire douter de la culture de l'entreprise", a-t-il dit. Quand Mas lui demande de "travailler sur le gel" et qu'il refuse, "il confie cette mission à mon ingénieur".
L'ex-directrice de la qualité, Hannelore Font, entrée en 1999, à 22 ans, chez PIP, assure que dès 2004 elle pensait "que les choses pouvaient changer". Mais c'est en 2009 qu'elle bloque la sortie de lots. Très vite, elle s'effondre. "Je tiens à m'excuser de n'avoir pas été à la hauteur", sanglote-t-elle.
Les cinq prévenus encourent cinq ans de prison.