Témoignage. "Jusqu'au bout, j'irai. Je parlerai" : rescapée d'Auschwitz, Denise Holstein, 97 ans, raconte l'horreur des camps

Publié le Écrit par Marianne Leroux et Jean-Bernard Vitiello

À l'occasion de la Journée de la déportation, Denise Holstein, déportée à Auschwitz, se confie au micro de France 3 Côte d'Azur. Elle fêtera ses 97 ans, le 6 février prochain.

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Originaire de Normandie, Denise Holstein, aujourd'hui Antiboise, a été déportée au camp de Drancy puis à Auschwitz et enfin à Bergen-Belsen. Elle a survécu aux nazis avec une combativité hors normes. "J'avais un sacré caractère, je crois. Ma devise, c'était "Ils ne m'auront pas"", raconte-t-elle.

Son interview par Jean-Bernard Vitiello, Ali Benbournane et Pascal Martin.

"J'étais plus que mon numéro"

Juive, avec une étoile jaune bien affichée, elle a été arrêtée à 16 ans puis séparée de ses parents dans le premier camp en France. Elle s'occupait d'enfants orphelins mais un jour les Allemands l'ont transféré vers la Pologne.

"Je suis partie en wagon à bestiaux avec tous les petits enfants. Et quand on est arrivés à Auschwitz, on a fait partir les petits enfants d'un côté, dont un petit bout'chou qui n'avait pas ses chaussures, qui pleurait, mais il est parti pieds nus directement à la chambre à gaz. Je ne pouvais pas imaginer que quelques minutes après ces enfants seraient tous brûlés".

En quelques secondes, elle comprend que ses parents aussi ont péri. Denise aura la vie sauve parce qu'elle est jugée jeune et en forme pour travailler. "On a tout de suite été emmenés à la douche. On nous a pris toutes nos affaires, on nous a rasé et tatoué. Je suis le numéro A16727 et j'étais plus que ça", confie-t-elle avec beaucoup d'émotion.

Elle a passé des mois dans ce camp à transporter des pierres ou du matériel sous le regard et les coups des commandants SS. Denise a côtoyé la mort en permanence.

À chaque fois qu'on allait à la douche, on se disait que c'était notre tour. Parce que ça se passait ainsi, ils emmenaient des gens à la douche et au lieu de les doucher, ils les brûlaient. À un moment donné, j'avais une diarrhée épouvantable, j'avais les jambes gelées. On a eu jusqu'à -40 et on sortait le matin pendant 1h30 d'appel avec cette température. Je ne sais pas comment j'ai résisté. 

Denise Holstein.

Devoir de mémoire

En 1945, juste avant la libération d'Auschwitz par les Soviétiques, Denise est envoyée dans un autre camp de la mort à Bergen-Belsen. Elle ne pèse plus que 35 kilos. Quand les Anglais arrivent au milieu des cadavres, il est impossible pour elle d'être heureuse.

"Bien sûr on s'est rendu compte mais on n’était pas sûr de vivre. On était tellement épuisés, je ne peux pas dire que c'était une joie complète. On n’était pas sûr de survivre à ça".

Pendant des années, Denise n'a rien dit et puis à la retraite, elle a décidé d'intervenir dans les établissements scolaires et de retourner dans le camp avec des collégiens pour montrer l'horreur. "Je voudrais qu'au moins quand vous serez dans des facultés plus tard, je vous en supplie n'oubliez pas Auschwitz, n'oubliez pas Birkenau, j'aurais fait quelque chose d'utile", dit-elle aux élèves dans les années 1990.

30 ans après, aujourd'hui retirée à Antibes, elle ne peut plus se déplacer, mais elle n'a pas renoncé à témoigner. "Il faut se battre pour que les gens comprennent tout ce qu'on leur raconte, que c'est vrai, que ça s'est passé comme ça. Je n'ai plus beaucoup de force, mais le peu que j'ai, jusqu'au bout j'irai. Je parlerai".

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