Alain Delon est mort à 88 ans, l'acteur et le Festival de Cannes : je t'aime... moi non plus

L'acteur décédé aujourd'hui, dimanche 18 août, monstre sacré du cinéma français, a entretenu au long de ses 60 ans de carrière des relations compliquées avec le Festival du Film... Je t'aime moi non plus, jusqu'à la réconciliation, avec la Palme d'or d'honneur en 2019.

"Alain Fabien, Anouchka, Anthony, ainsi que (son chien) Loubo, ont l'immense chagrin d'annoncer le départ de leur père. Il s'est éteint sereinement dans sa maison de Douchy, entouré de ses trois enfants et des siens. (...) Sa famille vous prie de bien vouloir respecter son intimité, dans ce moment de deuil extrêmement douloureux", indique le communiqué envoyé par ses trois enfants à l'AFP ce dimanche 18 août.

Alain Delon est mort cette nuit. L'icône du cinéma français s'est éteinte à 88 ans.

"Je n'ai jamais pleuré pour autant de personnes"

Ce 19 mai 2019, effectivement, sur la scène du Palais des Festivals de Cannes, Alain Delon ne peut retenir ses larmes.

La mine un peu bougonne, mais surtout très ému, la légende du 7ème art français reçoit, à l'âge de 83 ans, sa première distinction personnelle de la part du plus grand festival de cinéma au monde : la Palme d'or d'honneur, remise par sa propre fille Anouchka, récompense toute sa carrière. Il l'accueille, avec le brin d'ironie qui le caractérise :

"Ce soir, c'est un peu un hommage posthume... mais de mon vivant"

Alain Delon

Entre le festival et la légende vivante du cinéma, la réconciliation n'a pas été facile. Le délégué général du Festival de Cannes, Thierry Frémaux, ne le cache pas à ce moment-là : "Nous sommes heureux qu'Alain Delon ait accepté d'être honoré par le festival. Il a pourtant longtemps hésité." 

Car en six décennies de carrière, les relations entre l'homme et le festival n'ont pas été faciles : marquées par autant de fâcheries et de polémiques que de bons moments. L'acteur mondialement reconnu n'avait jusqu'en 2019 jamais reçu de distinction personnelle à Cannes. Il en restait une pointe d'amertume qu'Alain Delon avait exprimée, lors de son arrivée ce 19 mai, au micro de notre journaliste Hélène Maman :

"Après 17 mois de carrière, ça me touche !"

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Alain Delon arrive au Palais des Festivals à Cannes le 19 mai 2019 pour y recevoir la Palme d'or d'honneur. ©FTV

En 60 ans, seulement huit montées des marches

La carrière d'Alain Delon, que rien ne prédestinait au cinéma, a pourtant débuté à Cannes. C'était en 1957. Le jeune homme est invité au festival par Jean-Claude Brialy qui l'a repéré dans le quartier Saint-Germain-des-Prés à Paris. Sa "gueule d'ange" a tout de suite séduit le monde du 7ème art. Il montera les marches pour la première fois dans son costume d'acteur trois ans plus tard, en 1961, pour le film "Quelle joie de vivre" de René Clément.

Il reviendra pour "L'Eclipse" de Michelangelo Antonioni qui décroche le Prix du jury en 1962, puis pour "Le Guépard" de Luchino Visconti, Palme d'or en 1963.

La même année, c'est comme décor de tournage que Delon retrouve Cannes. Avec Jean Gabin, il tourne, au Palm Beach, et sur la Croisette, "Mélodie en sous-sol" d'Henri Verneuil :

Au sommet de sa gloire, Alain Delon foule à nouveau le sol de la Côte d'Azur pour le tournage de "La piscine" de Jacques Deray en 1968. A Ramatuelle, dans le Var, il retrouve comme partenaire Romy Schneider. Le couple si glamour s'est séparé quatre ans plus tôt, mais à leur arrivée à l'aéroport de Nice, ils attirent tous les objectifs :



Retour sur la Croisette. En 1976, le film "Monsieur Klein" de Joseph Losey est froidement accueilli. Alain Delon s'en offusque. Première fâcherie avec Cannes. Elle s'amplifie en 1984 quand "Notre histoire" de Bertrand Blier (film qui vaudra à Delon le César du meilleur acteur) n'est pas sélectionné. L'acteur clame alors : "C'est un préjudice pour la France !" et qualifie au passage le comité de sélection cannois de "quatre ringards, dont trois critiques".
    
Il faudra attendre la présence en compétition de "Nouvelle vague" de Jean-Luc Godard, en 1990, pour qu'il fasse un retour à Cannes. Et quelle arrivée ! En hélicoptère, puis en bateau pour débarquer sous la Croisette. Un tacle aux journalistes. Un bain de foule. Alain Delon se paie le luxe de faire attendre Jean-Luc Godard en bas des marches du Palais. Le journaliste Jean-François Gringoire, qui couvre alors le festival pour FR3, s'en amuse dans son reportage du 18 mai 1990 : 

Même histoire deux ans plus tard. Pour la présentation du film "Le retour de Casanova", d'Edouard Miermans, Delon enfonce le clou. Le festival ne lui a pas toujours rendu tous les honneurs qui lui reviennent ? C'est pourtant lui, avec sa seule présence, qui crée l'événement sur la Croisette :


    
Puis nouvelle bouderie en 1997. Delon trop susceptible ? Le festival indélicat ? Toujours est-il qu'on ne l'a pas invité pour le 50ème anniversaire. En 2006, l'acteur déclare même qu'il ne montera plus jamais les marches. Avant de se raviser dès l'année suivante, où le crime est réparé, Alain Delon est invité pour le 60ème anniversaire. Il lance alors :

"Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis !"

Alain Delon, Festival de Cannes 2007

Après 15 ans d'absence, Alain Delon fait alors, le 20 mai 2007, une nouvelle arrivée événement sur la Croisette. Les journalistes de France 3 Sabine Gorny et Frédéric Tisseaux sont là :

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Extrait du reportage de Sabine Gorny et Frédéric Tisseaux, le 20 mai 2007, lors de l'arrivée d'Alain Delon, invité à Cannes pour le 60ème anniversaire du Festival international du film. L'événement sur la Croisette où les fans l'attendent en masse... Reportage pour France 3. ©FTV

En 2010, on revoit Alain Delon sur le tapis rouge en compagnie de Claudia Cardinale, pour la présentation de la version restaurée du "Guépard", 47 ans après sa Palme d'or. Puis en 2013 pour une version remasterisée de "Plein Soleil".

Il ne reviendra plus sur la Croisette avant ce 19 mai 2019, et la Palme d'or d'honneur pour l'ensemble de sa carrière.

On a alors voulu croire les relations entre l'homme et l'institution définitivement apaisées avec cet hommage à celui qu'une autre légende du cinéma français, son amie Brigitte Bardot, qualifiait quelques années plus tôt de "symbole vivant du chef d'oeuvre que la France a produit durant ce siècle".

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