Quand en 2018, l'eau salée pénètre dans l'enceinte du musée Cocteau, lors d'impressionnantes inondations, on donnait peu cher de l'avenir des oeuvres de l'artiste. Deux ans plus tard, l'heure est à l'optimisme.
"Quand j’ai vu les œuvres évacuées par les pompiers, j’avoue j’ai eu peur." Une peur aujourd’hui en partie dissipée pour Françoise Léonelli, la conservatrice du musée Cocteau de Menton.Ce jour d'octobre, au premier étage du musée préhistorique une étrange scène nous est donnée à voir. Des dessins de l’artiste posés sur une table de dessin. Et du matériel comme une gomme, et une pince à épiler.
Au chevet du malade
C’est Eve Menei qui s’affaire autour des œuvres, un peu comme un docteur au chevet de son malade. Eve Menei est restauratrice d’oeuvres d’art, un métier de l'ombre. Pour les dessins abîmés, et vu leur état, ils sont restaurés sur place. C’est pourquoi elle vient dans les Alpes-maritimes pour trois demi-journées.
Au deuxième jour, tous les dessins de Cocteau, 27 au total, sont passés entre ses mains et doigts experts : "mon travail est en quatre étapes : constat d’état, nettoyage à sec ou humide, consolidation, remise à plat et montage."
En d’autres termes c’est se rendre compte de l’état des planches et selon le support, adapter le travail de restauration avec des précautions très impressionnantes pour ne pas endommager ces dessins à la valeur inestimable : "ils ont tous soufferts de l’inondation, on a là des traces de saletés, d’auréoles, des taches. Mon travail va consister à opérer un nettoyage avec une gomme en prêtant attention à la technique graphique. Pour les nettoyages humides, il s’agit de faire disparaître les sels de mer ou boue"
Pour certains support, le dessin a pu être dégradé, constate Eve Menei avec une certaine tristesse : "ici on a un halo bleu qui s’est formé, on ne pourra malheureusement rien faire, là une tache de boue qu’on pourra enlever mais si l’encre a pu fuser, le trait ne sera plus aussi net."
Ailleurs et pendant ce temps, d'autres œuvres de Cocteau sont en cours de restauration. C’est ce qu’explique la conservatrice qui se souvient du fameux jour où le musée fut indondé. Elle se remémore ce douloureux événement : "on a pu intervenir rapidement et seule une petite partie de la collection ne pourra pas être restaurée. Les secours avaient a l’époque sorti les collections des réserves, la priorité avaient alors été de les traiter et les sécher."
C’est alors que les restaurateurs comme Eve sont entrés en piste : "ils sont venus faire des constats sur place pour certains. Ensuite la partie restauration en tant que telle ne se fait pas ici pour l’essentiel." explique la conservatrice du musée Cocteau.
Ceux qui interviennent, qui sont à leur façon des artistes, ont besoin de leur atelier, leurs outils. Tout cela est difficile à déplacer. Ce sont donc les œuvres qui ont été acheminées chez eux.
La conservatrice a pu suivre les différentes étapes qui aboutiront à ce que les œuvres de Cocteau, on parle des dessins mais il y aussi des sculptures, réintègrent le musée. Avec ce constat qui résume tout : "On est ravis de revoir des œuvres qui sont très belles, qui ont retrouvé un éclat qu’on n’imaginait pas."
Mais il risque encore de s’écouler bien des mois avant que toute la collection ne regagne le musée cher aux mentonnais. Ici, on se refuse à avancer une date. Alors patience...