Des victimes pas considérées comme telles car du "mauvais côté" de la promenade des Anglais : si la prise en charge s'est améliorée entre les attentats de Paris et celui de Nice, le volet indemnitaire accuse d'importants ratés.
Lors de l'attentat du 14 juillet à Nice, qui voit un Tunisien à bord d'un camion foncer sur la promenade des Anglais, faisant 86 morts et plus
de 400 blessés, la prise en charge des victimes se révèle moins chaotique.
Un espace d'accueil centralisant les différents organismes d'aide est ouvert très rapidement. Un numéro d'urgence mieux dimensionné répond aux appels. "L'information est mieux passée", reconnaît Georges Salines, président de l'association "13 novembre, fraternité
et vérité".
Ce qui n'a pas empêché, pour certaines familles, une attente "intenable" jusqu'à la confirmation du pire, regrette Anne Murris, cadre de l'association Promenade des anges dont la fille a été tuée à Nice.
Des représentants du FGTI, le fonds de garantie qui indemnise les victimes du terrorisme, sont envoyés immédiatement dans la capitale azuréenne. Une première. Toutes les associations concernées dénoncent pourtant les ratés du volet indemnitaire.
En plein délire
Le FGTI établit des critères stricts pour déterminer qui est victime : les personnes présentes sur la voie de circulation du poids lourd sont indemnisables, mais pas celles qui étaient sur l'autre voie, pourtant distante de quelques pas, car le fonds considère qu'elles étaient "protégées par les palmiers du terre-plein central", raconte Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS attentats.
Pour cette membre du conseil d'administration du FGTI, l'indemnisation a subi une "régression" entre Paris et Nice.
Autre écueil: la LUV (liste unique des victimes), document central des attentats du 13 novembre. Seules les personnes qui y figurent sont officiellement considérées comme victimes.
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Compétent en matière terroriste, le parquet de Paris, se charge également de l'établir à Nice. Cette liste est établie très rapidement et n'a pas été actualisée depuis l'été.
En conséquence, la majeure partie des 480 "personnes hospitalisées" après l'attentat de juillet, pour qui "il n'y a pas de débat" quant à leur qualité de victimes, ne figurent pas sur la LUV niçoise, s'étrangle Mme Rudetzki.
Beaucoup n'ont donc pas bénéficié des prestations auxquelles elles avaient droit, telles que la gratuité des soins, ni reçu de première provisions financières, regrette-t-elle.
Pire, un couple de fausses victimes, condamné début décembre à Grasse à trois et six ans de prison pour avoir fraudé le FGTI à hauteur de 60.000 euros, était inscrit sur les LUV du 13 novembre et du 14 juillet, tempête Stéphane Gicquel, le patron de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs.
Le délai de "deux mois" constaté à Nice pour déposer un plainte relative à l'attentat est également démesurément long, ajoute-t-il.
"La situation de Nice est beaucoup plus difficile à appréhender qu'à Paris car il y avait des milliers de personnes dans les rues", remarque Juliette Méadel dans un entretien avec l'AFP. Elle annonce la création d'une "liste partagée" en remplacement de la LUV niçoise, qui permettra la prise en charge de "toutes les victimes".
Cinq mois après le drame, "811 victimes ont reçu 9,54 millions d'euros", quand "2.109 demandes d'indemnisation" ont été faites, soit un nombre "considérable", observe la secrétaire d'Etat, qui tranche: "Il n'y a pas eu de couac".
- Avec AFP -