Le Carnaval de Nice, c'est parti!

Ce samedi 16 février à 14h30 débute le Carnaval de Nice. La bataille de fleur lancera cette édition placée sous le signe du cinéma. Le Roi du Cinéma sera réduit en cendre le 2 mars, après deux semaines d'une fête toujours en évolution, après plus de 140 ans d'existence.

Le carnaval de Nice n'en est pas à son premier clap, puisque l'événement est né en 1873 (voir l'entretien de Nathalie Gauthard, chercheuse à l'Université Côte d'Azur, ci-dessous).
Cette 135ème édition, celle du Roi du Cinéma, débute samedi 16 février à 14h30 avec la bataille de fleurs sur la promenade des Anglais. 


Ce samedi soir, ce sera le corso illuminé qui viendra faire battre le coeur de Nice, place Masséna.
Un autre corso illuminé aura lieu mardi 19, prochaine date sur le calendrier de ce carnaval 2019, dont le programme s'étend jusqu'au 2 mars. 

  • La bataille de fleurs, une tradition très ancienne
Si le premier Carnaval de Nice date de 1873, la première bataille de fleur est située en 1876. Alphonse Karr, écrivain habitant Nice, en eut l'idée, Andriot Saëtone, fondateur du comité des fêtes, en fit une réalité. Elle eut lieu dès sa première édition sur la promenade des Anglais, qui restera le lieu de cet échange parfumé.
Le carnaval, un sujet d'étude : entretien avec Nathalie Gauthard, enseignante-chercheuse en anthropologie des arts vivants à l' Université Côte d'Azur
Professeure en Ethnoscénologie à Université Côte d'Azur, Nathalie Gauthard évoque les origines et le rôle du Carnaval de Nice, plus grand carnaval de France. Sur le thème du Cinéma, l’édition 2019 débute le 16 février et s’achèvera le 2 mars, sous les cendres du Roi.
 
  • Historiquement, comment est né le Carnaval de Nice ? Quel rôle avait-il ?
Chaque année à Nice, le Carnaval s’incarne dans une pluralité de manifestations festives à caractère touristique, social, et identitaire. Plusieurs mouvements s’affrontent et/ou se complètent : d’un côté les pouvoirs locaux représentés par la mairie et l’office du tourisme, de l’autre une galaxie de mouvements associatifs de tous bords.
Plusieurs postures idéologiques s’affrontent : d’un côté le carnaval officiel, héritier du carnaval créé, en 1873 par le comité des fêtes à l’adresse de la clientèle touristique – c’est-à-dire les riches hivernants venus profiter du climat niçois, de l’autre les tenants d’un carnaval plus traditionnel revendiquant un héritage populaire ancestral, soit la tradition carnavalesque de défoulement populaire et de subversion.
Déjà au sein de l’institution elle-même, c’est-à-dire du Carnaval officiel, les transformations esthétiques et scénographiques opérées au fil des années ont donné lieu à quelques mécontentements de la part des niçois qui y voient un délitement de leur culture locale au profit d’une esthétique mondialisée censée attirer une manne touristique.
Ce débat ne date pas d’aujourd’hui à Nice. En effet, l’invention du label « Côte d’Azur » et la promotion du territoire à la fin du XIXe siècle posait déjà les prémisses d’un débat entre cultures locales et tourisme global. Nice et ses environs sont une destination touristique depuis la fin du XVIIIe siècle. Le Carnaval officiel de Nice est donc né de la volonté de promouvoir commercialement une région. 
 
  • Le Carnaval dans sa globalité est-il une forme de satire sociale ? 
Le carnaval incarne la rupture avec le quotidien, le débordement et l’excès. Il prend des formes variées, des aspects divers et se décline sous des thématiques différentes. Il est composé de multiples facettes : l’ensauvagement, le renversement, le désordre, le comique, le grotesque, la bouffonnerie, le rire. En cela, il échappe à toute taxonomie (NDLR : classification en catégories homogènes) ou modélisation même si sa fonction ultime est de se soustraire aux contraintes du quotidien, de l’ordinaire, des conventions.
L’histoire nous enseigne que la censure s’est appliquée puis maintenue jusqu’à une période récente pour certaines pratiques carnaveslesques, notamment en Espagne où le carnaval était interdit mais contourné durant le régime autoritaire de Franco. L’analyse de la fête et des pratiques carnavalesques exige donc une approche pluridisciplinaire afin d’en circonscrire les différents paramètres. 

Néanmoins, les corsos carnavalesques niçois avec leurs esthétiques grotesques sont toujours détenteurs d’une charge satirique non négligeable
 
  • Aujourd’hui, le Carnaval de Nice est barricadé et payant. Il n’est plus la fête populaire que les niçois connaissaient. Mérite-t-il encore son nom ? 
Le carnaval officiel de Nice (qui regroupe plusieurs types de manifestations rappelons-le : corso carnavalesque, bataille de fleurs et carnaval des quartiers) est au centre de nombreuses critiques.  Des mouvements d’opposition ont vu le jour comme des carnavals indépendants dont le but est de créer une identité locale alternative et à contre-courant de la politique touristique mise en place et développée par la Mairie. Ce carnaval indépendant est actuellement animé par un collectif d’associations.
Ces mouvements contestataires existent à Nice depuis le début du XXème siècle en réaction à la politique économique locale tournée vers le tourisme. Ils visent à dénoncer les logiques mercantiles liées à l’industrie du tourisme et ses effets sur les identités locales. Le carnaval dans sa dimension marchande et produit d’une consommation de masse a toujours généré une économie non négligeable. Après avoir été répertoriée sur des listes locales, nationales ou internationales comme « patrimoine culturel immatériel », le carnaval est aujourd’hui catalogué dans des parcours touristiques, étape obligatoire du circuit réussi grâce à son caractère participatif. Le carnaval est une pratique, une expérience commune et partagée même s’il s’agit parfois d’«une mise en fiction du monde» (Marc Augé, L’impossible voyage. Le tourisme et ses images). 

A Nice, le Carnaval, qu’il soit indépendant ou officiel, renaît et se démultiplie chaque année. Les carnavals indépendants ont créé une cohorte de nouvelles manifestations festives issues d’associations alternatives, ainsi une fête de la « Santa Capelina », la fête des « travailleurs du chapeau » a été inventée avec une procession le 1er mai depuis le début des années 2000. En 2015, le dernier avatar de Carnaval est Lou Queernaval, 1er et unique Carnaval Gay de France. Gratuit et ouvert à toutes et tous et est associé au programme du festival officiel.
 
  • Sur quoi se concentrent vos recherches ? Quel est le champ d’étude d’une chercheuse en anthropologie des arts vivants ?
L’ethnoscénonologie étudie les arts de la scène et de la performance dans une optique transdisciplinaire qui croise les études en arts du spectacle/musicologie et sciences humaines. L'Université Côte d'Azur est pionnière en ce domaine car nous avons été les premiers à proposer une formation bi-disciplinaire Arts du spectacle/musicologie et ethnologie/anthropologie en France. J’ai également créé la Société Française d’ethnoscénologie, la SOFETH en 2007 (reconnue et labellisée ONG pour le PCI par l’UNESCO en 2016) qui organise chaque année des journées d’études dans des lieux à chaque fois différents, afin de favoriser tous types de partenariats.
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