Retour à la case départ et reprise des négociations : les partis de gauche tentent de désigner des candidats communs le 12 juin prochain, avec les insoumis en position de force. Ils veulent réussir aux législatives l'union ratée à la présidentielle. Quitte à mettre de côté les sujets qui fâchent.
« La France insoumise… pardon… ma langue a fourché, je voulais dire l’Union populaire ». Pour Olivier Salerno, militant insoumis, désormais chaque mot compte. Oubliez les partis, les partisans de Jean-Luc Mélenchon tentent de rallier à eux les autres forces de gauche, sous une bannière commune. Avec deux défis à relever : se mettre d’accord sur un programme commun, et se partager les circonscriptions, au nombre de 9 dans les Alpes-Maritimes.
Selon Robert Injey, leader des communistes niçois, il y a urgence :
S'unir autour des questions écologiques et sociales
Dans ce département comme au niveau national, avec 16.6% des voix au 1er tour de l’élection présidentielle, la France insoumise s’est imposée comme la première force de gauche. Ses militants entament donc les négociations avec la ferme volonté de faire valoir leurs idées.
"Notre programme, affirme Olivier Salerno, a été reconnu même par nos opposants comme étant l’un des plus étoffés. Il est clair, et depuis 2012 il convainc de plus en plus d’électeurs ». Il y a bien sûr quelques sujets, et pas des moindres, qui fâchent : l’Europe, l’Ukraine, le nucléaire.
Si c’est à prendre ou à laisser, on dira non
Laurent Lanquar-Castiel, secrétaire départemental EELV
"Il n’est pas question de se soumettre à la France insoumise", renchérit José Garcia Abia, secrétaire fédéral du PS. Mais ce militant expérimenté relativise : « Quand on a créé le programme commun avec François Mitterrand, le PC prenait quasiment ses ordres du côté de Moscou, il y avait l’invasion de l’Afghanistan : ça n’a pas empêché les communistes de négocier avec le PS. Chacun est resté sur ses bases pour l’international. Pour nous, il est hors de question de remettre en cause les traités européens ».
On doit marcher sur nos deux jambes, le social et l'écologie
Olivier Salerno, chef de file LFI dans la 1ère circonscription des Alpes-Maritimes
"Le taux de pauvreté est chez nous supérieur à la moyenne nationale, poursuit-il. Certains élus allument des contrefeux en faisant de l’islam un problème. On veut passer à autre chose. Les gens dans les quartiers, peu importe leur religion, ils galèrent. » Il en veut pour preuve le bon score de LFI à Nice, pourtant réputée très à droite.
La lutte des classes, pas la lutte des places
Voilà pour les idées. Reste l’autre casse-tête : les places. 9 circonscriptions, soit 18 candidats à désigner (députés et suppléants). Quasiment tous les partis avaient déjà leurs candidats. Les plus prudents les avaient nommés « délégués » ou « chefs de file » en attendant les investitures définitives. C’est le cas d’Olivier Salerno. Cet enseignant insoumis se prépare à faire campagne dans la très convoitée première circonscription, celle du député sortant LR Eric Ciotti. « Mais je milite pour la lutte des classes, pas la lutte des places. Je suis prêt à laisser la mienne.»
Ce sont d’ailleurs les instances nationales du parti qui trancheront. Une convention est prévue le 7 mai prochain en région parisienne.
Chez Europe Ecologie Les Verts, les représentants locaux semblent avoir plus de latitude pour avancer dans les négociations. Mais Laurent Lanquar-Castiel, prêt lui aussi à laisser sa place dans la 4ème circonscription, celle de Menton et de la Roya, ne veut pas voir son parti bradé. « Il n’y aura pas d’accord sur les 577 circonscriptions, peut-être sur les 150 premières, celles qui sont gagnables. Et là, les insoumis, les communistes et les socialistes tenteront de sauver leurs députés sortants ». Car aux dernières élections législatives, les écologistes, affaiblis par des candidatures concurrentes à gauche, n’ont remporté aucune circonscription française.
Pas d’accord à tout prix, c’est le discours national du parti. Au niveau local, Laurent Lanquar-Castiel aimerait par exemple une candidature écolo dans la circonscription de Valbonne, rare ville verte de la région, même sans accord à gauche.
Première petite victoire tout de même il y a quelques jours : toutes les forces de gauche du département, dont LFI, EELV, le PS et le PC, ont réussi à se mettre autour d’une table, celle du parti communiste niçois, pour se parler. "Il n’y a pas eu d’invective, ça s’est bien passé", se satisfait José Garcia Abia, secrétaire fédéral du PS. Plusieurs d'entre eux doivent se revoir ce soir, ultime réunion avant la décision finale.