Face aux annonces de fermeture des urgences de nuit le week-end, dans plusieurs villes, le Syndicat SUD Santé 13 lance un appel au gouvernement pour déployer l’armée en soutien aux personnels hospitaliers.
À Arles, pour la première fois, le centre hospitalier avait annoncé que son service des urgences allait fermer les nuits de vendredi, samedi et dimanche, avant de se rétracter dans la journée. Un tâtonnement qui révèle tout de même un manque de personnel médical pour cet hôpital qui accueille environ 36.000 patients par an et fonctionne avec 40 % d’intérimaires pour combler les postes vacants.
L'armée en renfort dans les hôpitaux, une solution ?
Dans les quartiers nord, Kader Benayed, secrétaire départemental adjoint du Syndicat Sud Santé 13, s’est lui directement adressé au Président de la République il y a quelques jours.
L’objet de ce courrier : un appel volontaire à l’armée, en renfort dans les hôpitaux de France, et plus particulièrement ceux dans les Bouches-du-Rhône, face au manque cruel de personnel. "C’est une manière désespérée de tirer la sonnette d’alarme" justifie-t-il.
Depuis des années au centre hospitalier Edouard Toulouse, le personnel s’oppose à la fermeture d'unités de soin. Et pourtant, deux d’entre elles, relatives à la préparation à la sortie (soins prolongés) vont fermer le 31 mai et à la fin de l’année 2022. L’unité des soins intensifs pour adolescents, elle, devrait fermer temporairement à partir du 1er juin.
"Le niveau de scandalité a atteint son paroxysme" lâche le jeune homme, préférant volontairement un mot qui n’existe pas dans le dictionnaire. "Nous sommes la cinquième puissance mondiale et aujourd’hui un citoyen qui paye ses impôts n’est plus sûr d’avoir les soins nécessaires" s’indigne-t-il.
Pour lui, la solution est toute simple : "Au lieu d’aller déployer l’armée à l’étranger, on devrait l'orienter sur la santé des Français, l’une des priorités nationales."
Son frère est militaire et Kader Benayed ne cesse de répéter à maintes reprises l'urgence sanitaire qui touche la ville : "Nous sommes dans une véritable pénurie médicale et tout le monde devrait mettre la main à la patte. On doit réquisitionner des médecins supplémentaires et l’armée comme en temps de guerre."
Face à la pénurie d’aides-soignants, Kader Benayed réclame aussi de redonner de l’attractivité au territoire. "Dans les quartiers nord, on devrait bénéficier d’une prime de secteur difficile. Nous n’avons toujours pas gain de cause mais en Seine-Saint-Denis ils sont en phase de test. Un système de prime à 10.000 euros avec obligation de servir pendant cinq ans dans la fonction publique" explique-t-il. Avant d’émettre une critique : "Le problème, c’est qu’on se retrouve encore une fois face à une inégalité de traitement entre le nord et le sud. Ce n’est plus une fracture mais un cratère !"
Pour lui, la réduction des offres de soins va de pair avec l’actualité dramatique de ces derniers jours à Marseille. Des attaques au couteau répétées, en pleine rue, par des personnes souvent déséquilibrées mentalement. "On ressent un sentiment de culpabilité car on ne peut pas prendre en charge toutes les personnes qui ont besoin de soins psychiatriques" martèle le secrétaire départemental adjoint du Syndicat Sud Santé.
C’est aussi pourquoi il a souhaité saisir Emmanuel Macron sur l’état sanitaire de la ville. "S’il aime Marseille, qu’il nous le prouve. Et pas qu’avec son plan car, pour l’instant, Marseille n’est grand que dans sa tête ! Et comptez sur nous pour saisir les nouveaux ministres de la santé et des armées dès qu’ils seront annoncés cet après-midi !"
Une pénurie d'aides-soignants qui touchent plusieurs départements
Dans le Var, même constat sur le manque de personnels mais ils ne vont pas jusqu’à solliciter l’armée. Loïc Guilleux, du syndicat Sud Santé 83 alerte cependant sur l’absorption de l’activité de l’hôpital de Draguignan par celui de Fréjus, depuis la fermeture des urgences dracénoises la nuit.
Depuis des mois, avec le collectif inter-urgences, ils sont en grève (avec mouvement reconductible) pour avoir du personnel suffisant. "On s’inquiète pour cet été de voir les urgences qui se ferment à droite et à gauche" lance-t-il, d’une voix grave, au bout du téléphone.
Ils ont été reçus par la direction de l’hôpital de Fréjus hier qui leur a répondu être dans l’attente des sorties d’école pour renforcer le personnel et leur permettre de partir en vacances. Des promesses d’embauches d’infirmiers qui devraient donc entrer en vigueur dans les semaines à venir.
"On a aussi obtenu de l’ARS, et avec la participation de la Région, un budget de 20 millions d’euros à investir pour aménager l’ensemble du service des urgences de Fréjus, le moderniser et l’adapter" se réjouit-il avant de préciser que les travaux devraient débuter d’ici la fin de l’année.
Une manifestation il y a un mois leur a aussi permis d’attirer l’attention de la direction. En réponse : l’arrivée d’un brancardier, de deux aides-soignants, de quatre infirmiers diplômés d’Etat et de deux cadres de proximité en permanence.
"Les raisons de ce manque de personnel aide-soignant sont nombreuses : le départ des non-vaccinés, le ras-le-bol de la profession, l’impression de ne pas faire son travail correctement" explique Loïc Guilleux.
Mais pour lui, il y a surtout une autre piste inquiétante à prendre en compte : le système parcoursup. "Les élèves qui entrent dans les écoles d’infirmiers n’ont plus la même vocation qu’à l’époque. Ils découvrent même la profession ! Il n’y a plus d’entretien préalable pour évaluer leur motivation. Résultat : le quart de la classe laisse tomber au bout d’un ou deux ans seulement ou même avant la fin de la première année" regrette-t-il.